La réplication de l’ADN a été filmée pour la première fois, et le résultat n’est pas celui que nous attendions

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| James Graham/UC Davis
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Pour la toute première fois, des chercheurs de l’Université de Californie aux États-Unis ont réussi à filmer la réplication de l’ADN, et les résultats soulèvent de nombreuses questions sur son fonctionnement. Une découverte majeure concernant ce processus fondamental de la vie cellulaire.

En effet, les images en temps réel qui ont été enregistrées ont révélé que la réplication de l’ADN, cet élément fondamental de la vie, incorpore une quantité inattendue de « hasard ». Les résultats de cette étude pourraient nous mener à changer la manière dont comprenons la réplication génétique.

« C’est un véritable changement de paradigme, qui porte atteinte à beaucoup de sujets dans les ouvrages universitaires », explique Stephen Kowalczykowski, professeur en microbiologie et génétique moléculaire à l’Université de Californie, aux États-Unis. « C’est une manière différente de penser la réplication, ce qui soulève de nouvelles questions », ajoute le principal auteur de cette nouvelle étude.

La réplication est le processus au cours duquel l’ADN est synthétisée grâce à l’ADN polymérase. Ce mécanisme permet d’obtenir, à partir d’une molécule d’ADN, deux molécules identiques à la molécule initiale. En effet, la double hélice d’ADN se compose de deux brins de matériel génétique entrelacés, composé de quatre bases différentes : la guanine, la thymine, la cytosine et l’adénine (G, T, C et A).

La réplication se produit lorsqu’une enzyme, appelée hélicase, se déroule et décompose la double hélice en deux brins simples. Une seconde enzyme, appelée primase, attache une « amorce » à chacun des brins, et une troisième enzyme, appelée ADN polymérase, s’attache à cette amorce et ajoute des bases supplémentaires pour former une toute nouvelle double hélice.

Bien que nous connaissions déjà ce processus auparavant, la réplication n’avait encore jamais été directement observée. L’imagerie sophistiquée de l’équipe de recherche a permis de voir se créer de nouvelles hélices d’ADN, rendues lumineuses par une technique de coloration moléculaire.

Voici le processus de réplication filmé par l’équipe de recherche :

Le fait que les hélices doubles se forment à partir de deux brins s’étendant dans des directions opposées, signifie que l’un de ces brins est connu comme étant le « fil conducteur », qui serpente en premier, tandis que le second est le « fil traînant », qui suit le leader. Le nouveau matériel génétique qui est rattaché à chacun des brins durant le processus de réplication, est une correspondance exacte avec ce qui y était à l’origine.

Ainsi, au fur et à mesure que le premier brin se détache, les enzymes ajoutent des bases identiques à celles du support original et, tandis que le second brin se déchire et se détache, nous obtenons des matériaux identiques à ceux du fil principal original.

Les scientifiques ont longtemps supposé que c’était l’ADN polymérase qui coordonnait, d’une manière ou d’une autre, les brins durant le processus de réplication (de sorte qu’un brin ne dépasse pas l’autre et ne cause pas des mutations). Mais les images récemment capturées révèlent qu’il n’y a pas de coordination en jeu ici : chaque brin agit indépendamment de l’autre et aboutit à une correspondance parfaite, à chaque fois.

L’équipe a extrait des molécules d’ADN isolées provenant de bactéries E. coli et les a observées sur une lame de verre. Ils ont ensuite appliqué un colorant, qui se collait uniquement à une double hélice complète (et non à un seul brin), ce qui signifie que les chercheurs pouvaient donc suivre les progrès d’une double hélice lorsqu’elle formait deux nouvelles double hélices.

Et bien que l’ADN de bactérie soit différent de l’ADN humain, les deux utilisent le même processus de réplication, de sorte que ces images peuvent révéler beaucoup d’informations quant à ce qui se passe réellement dans notre corps.

L’équipe de recherche a constaté qu’en moyenne, la vitesse à laquelle les deux brins se répliquaient était à peu près égale, mais tout au long du processus, les chercheurs ont également constaté toute une série d’arrêts et de reprises surprenants, tandis que les brins agissaient comme deux entités distinctes.

Plusieurs fois, l’un des brins a cessé la synthèse, tandis que l’autre brin continuait le processus. Parfois, un brin commençait à se répliquer 10 fois plus vite que sa vitesse normale, apparemment sans aucune raison concrète. « Nous avons constaté qu’il n’y avait pas de coordination entre les brins. Ils sont complètement autonomes », explique Kowalczykowski.

Les chercheurs ont également constaté que, en raison de ce manque de coordination, la double hélice d’ADN a dû incorporer une sorte « d’interrupteur », qui empêcherait l’hélicase de se propager trop loin, afin que l’ADN polymérase puisse rattraper son retard en cas de besoin, pour l’un ou l’autre des brins.

Maintenant, la question est de savoir si les deux brins « fonctionnent de manière indépendante » comme le suggère cette séquence filmée, et comment est-ce que la double hélice peut-elle savoir quand minimiser les mutations en s’arrêtant ou en accélérant au bon moment. Les chercheurs vont donc devoir filmer d’autres séquences et effectuer de plus amples analyses afin d’aborder ces questions complexes.

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