Elon Musk évoque la possibilité d’un système de propulsion par antimatière

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| NASA's Goddard Space Flight Center
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À ce jour, le vaisseau conçu par SpaceX, le Starship, est alimenté par un carburant composé d’oxygène et de méthane liquides. Son lanceur phare, la fusée Falcon 9, utilise un mélange d’oxygène liquide et de RP-1, une forme de kérosène spécialement raffiné pour les lanceurs spatiaux. Mais dans un tweet daté d’hier, Elon Musk a laissé entendre qu’il songeait déjà à une tout autre forme de propulsion…

Il est désormais connu qu’Elon Musk aime faire ses annonces sur Twitter, de manière plus ou moins explicite. Ce tweet ne fait pas exception est a immédiatement suscité l’intérêt de tous ses followers. Tandis que le compte @WorldOfEngineering lançait le débat sur les fusées propulsées à l’antimatière, le PDG de SpaceX a clairement fait savoir que l’idée n’était pas si farfelue. Les futures fusées de la société fonctionneront-elles à l’antimatière ?

Effectivement, dans la science-fiction, l’antimatière est souvent suggérée comme carburant ou même comme arme pour des vaisseaux spatiaux futuristes. De quoi s’agit-il exactement ? Il s’agit de matière composée d’antiparticules. Les scientifiques n’ont jamais réussi à en produire en quantité significative, mais si c’était possible, cela pourrait conduire à une forme de carburant incroyablement puissante.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Une source d’énergie considérable

En effet, en 2006, la NASA précisait que seulement quelques dizaines de milligrammes d’antimatière suffiraient à propulser une mission humaine sur Mars. Plus récemment, en 2016, des physiciens ont émis l’hypothèse que la propulsion par antimatière pourrait être possible d’ici une décennie. Dans ce contexte, nombreux sont ceux qui commencent à penser que SpaceX travaille secrètement sur ce mode de propulsion inédit.

C’est dans les années 1930 que le physicien Paul Dirac découvrit qu’à chaque particule de matière correspondait une antiparticule, semblable en tout point (masse, durée de vie, spin), mais de charge opposée. Les membres du binôme se distinguent aussi par certaines de leurs propriétés quantiques. Par exemple, pour l’électron, il existe un anti-électron (aussi nommé positron). De la même façon, il existe des antiquarks, des antineutrons, des antiprotons et des anti-atomes. L’antimatière est considérée parfois comme l’image miroir de la matière. Lorsque les deux se rencontrent, elles s’annihilent et disparaissent en libérant une immense quantité d’énergie ; cette conversion complète en énergie est ce qui rend l’antimatière si puissante. Chaque annihilation d’antimatière libère deux milliards d’électrons-volts (2 GeV) d’énergie.

décélérateur antiprotons CERN
Le Décélérateur d’antiprotons du CERN produit des antiprotons de basse énergie pour étudier l’antimatière et « fabriquer » des atomes d’antimatière. © CERN

Aujourd’hui, l’antimatière fait l’objet de recherches actives. Au CERN, par exemple, les scientifiques étudient les propriétés des antiprotons à l’aide d’un décélérateur d’antiprotons. En 2002, l’engin a permis de produire pour la première fois de grandes quantités d’atomes d’antihydrogène. Quelques années plus tard, en 2011, les scientifiques du CERN annonçaient avoir réussi à produire et stocker des atomes d’antihydrogène pendant seize minutes, soit suffisamment longtemps pour les étudier en détail. L’anti-élément le plus lourd jamais observé est l’antihélium 4, qui se compose de deux antiprotons et deux antineutrons ; il a été produit en 2011, dans le Collisionneur d’ions lourds relativistes de Long Island, aux États-Unis.

Un voyage plus sûr et plus rapide vers Mars

Si l’antimatière intéresse tant les scientifiques dans le cadre de la conception de vaisseaux spatiaux, c’est qu’elle présente de nombreux avantages par rapport aux autres carburants disponibles, à commencer par une plus grande sécurité. En effet, c’est l’énergie nucléaire qui est aujourd’hui envisagée par la NASA pour envoyer l’Homme sur Mars d’ici à 2039 — la propulsion chimique conventionnelle, utilisée pour aller sur la Lune, impliquerait quant à elle six à neuf mois et une énorme quantité de propulseurs pour atteindre Mars.

Bobby Braun, directeur des recherches planétaires au Jet Propulsion Laboratory, précise que la NASA explore actuellement deux pistes : la propulsion nucléaire thermique (NTP) et la propulsion nucléaire électrique (NEP). Dans le cas de la NTP, un réacteur nucléaire remplace la chambre à combustion du moteur et utilise l’hydrogène liquide comme carburant. Dans la NEP, la chaleur générée par la fission nucléaire alimente en électricité un moteur à xénon capable de produire une accélération.

Mais les réacteurs nucléaires sont complexes (sans compter qu’ils sont radioactifs, même après épuisement du combustible !), donc davantage de choses pourraient potentiellement mal tourner pendant la mission. Un réacteur à positrons offrirait les mêmes avantages, mais s’avérerait beaucoup plus simple. En outre, le lancement du vaisseau serait également plus sûr. Si une fusée transportant un réacteur nucléaire explosait, elle pourrait libérer des particules radioactives dans notre atmosphère. En revanche, un vaisseau à positrons émettrait un jet de rayons gamma dans un rayon d’un kilomètre environ, qui disparaîtrait instantanément. Les premiers concepts de vaisseaux spatiaux alimentés par l’antimatière utilisaient des antiprotons, qui produisent des rayons gamma de haute énergie (capables de pénétrer dans la matière et d’altérer les molécules) lorsqu’ils s’annihilent. Des ingénieurs de la NASA ont donc travaillé sur un modèle basé sur des positrons, qui eux, produisent des rayons gamma d’énergie beaucoup plus faible.

Autre avantage de la propulsion à l’antimatière : la rapidité. Un vaisseau basé sur la propulsion à antimatière pourrait mener un équipage sur Mars en une quarantaine de jours selon les estimations. Avec des vitesses de propulsion d’environ 40% de la vitesse de la lumière, une telle technologie pourrait éventuellement réduire les temps de trajet vers le système stellaire Alpha Centauri voisin à moins d’une décennie !

L’un des principaux défis à résoudre pour concrétiser ce vaisseau spatial à positrons reste le coût de production de ces antiparticules, qui sur Terre, sont générées dans des accélérateurs à particules. « Une estimation approximative pour produire les 10 milligrammes de positrons nécessaires pour une mission humaine sur Mars est d’environ 250 millions de dollars en utilisant une technologie en cours de développement », précisait le Dr Gerald Smith de Positronics Research en 2006. Des coûts qui diminuent à mesure que les recherches avancent dans ce domaine… Autre défi à relever : trouver un moyen de stocker ces antiparticules, qui anéantissent toute matière qu’elles rencontrent. Elles doivent en effet être contenues au moyen de champs électriques et magnétiques.

Pour le moment, SpaceX compte sur son système de lancement réutilisable pour envoyer des humains sur Mars à bord du Starship : seul un vaisseau capable de voler souvent et à faible coût peut permettre de compenser les coûts liés aux quantités de carburant utilisées. L’idée de la société est de positionner un vaisseau Starship en orbite terrestre basse via son lanceur réutilisable, puis d’envoyer un second vaisseau-tanker à sa rencontre pour remplir ses réservoirs avant qu’il n’entame son périple vers la planète rouge. Mais il se pourrait qu’Elon Musk envisage aujourd’hui d’étudier la faisabilité d’un Starship propulsé à l’antimatière…

Sources : NASA et Forbes

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