Il est désormais possible d’extraire, « téléporter » et stocker l’énergie du vide avec des ordinateurs quantiques

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En utilisant des ordinateurs quantiques supraconducteurs, des chercheurs sont parvenus à extraire de l’énergie à partir du vide et à la « téléporter » vers un nouvel emplacement afin de la stocker pour une utilisation ultérieure. Bien que l’extraction de ce type d’énergie ait déjà été expérimentée précédemment, le moyen de la stocker efficacement faisait jusqu’à présent défaut. L’énergie ainsi stockée pourrait être utilisée pour d’autres tâches pour les ordinateurs quantiques ou d’autres appareils.

En physique, le vide « parfait » n’existe pas, même pour les espaces complètement dépourvus d’atomes. Dans le vide (dans le sens conventionnel du terme), la fluctuation des champs quantiques peut encore générer des particules virtuelles (une fluctuation quantique transitoire dont les caractéristiques sont proches de celles d’une particule ordinaire), conduisant à des phénomènes tels que la polarisation du vide (un processus au cours duquel un champ électromagnétique modifie la répartition des paires d’électrons virtuels et des positrons) et l’effet Casimir (une force attractive entre deux plaques parallèles conductrices). Les chercheurs préfèrent donc plutôt utiliser le terme « quasi-vide » pour qualifier cet état.

L’état quasi-vide possède également ce qu’on appelle « l’énergie du point zéro », l’énergie la plus faible dont un système quantique dispose. En 2008, Masahiro Hotta, un physicien de l’Université de Tohoku, au Japon, a proposé que l’intrication (ou enchevêtrement) quantique pourrait être utilisée pour extraire, téléporter et stocker cette énergie. Son protocole, baptisé « téléportation quantique » (QET), consiste à transférer de l’énergie entre deux qubits distants, donnant ainsi l’impression qu’elle est téléportée d’un endroit à un autre. Il nécessite également une communication entre les deux emplacements de ces qubits.

Cependant, bien que le protocole QET ait été éprouvé expérimentalement à l’aide d’ordinateurs quantiques supraconducteurs (utilisant des qubits supraconducteurs), il présente une importante limitation entravant l’utilisation de l’énergie extraite. Une fois extraite et téléportée, l’énergie se perd notamment dans l’environnement et ne peut être stockée, en raison de son extrême fragilité. « Par conséquent, le développement de méthodes pour stocker et exploiter l’énergie extraite est essentiel pour améliorer l’efficacité et l’utilité du protocole QET », estiment les experts, de l’Université de Purdue et de l’Université d’État de Caroline du Nord, dans leur nouvelle étude prépubliée sur la plateforme arXiv.

Un troisième qubit dédié au stockage de l’énergie

Afin de comprendre le protocole QET, il suffit d’imaginer que les deux qubits intriqués sont transmis à deux personnes distantes, par exemple Alice et Bob. Lorsqu’Alice effectue une mesure de son qubit, elle relève des informations sur ses fluctuations et augmente légèrement son énergie. Étant donné que les qubits sont intriqués, cela implique que le changement d’état du qubit d’Alice affecte également l’état de celui de Bob. Cependant, ce dernier ne peut pas observer directement ce changement d’état sans dévoiler à son tour son qubit, ce qui provoquerait à nouveau un changement dans la paire intriquée.

Pour que Bob puisse connaître l’état de son qubit, Alice doit ainsi lui communiquer les détails des mesures effectuées sur son qubit (celui d’Alice), la quantité d’énergie gagnée par la paire intriquée par le biais de son intervention, ainsi que la manière de l’extraire. Bob peut ensuite utiliser ces informations pour extraire l’énergie supplémentaire obtenue par son propre qubit. Les experts de la nouvelle étude ont amélioré ce protocole pour que cette énergie ne se perde pas, en faisant notamment en sorte que Bob la transfère à un troisième qubit dédié au stockage.

stockage energie vide
Graphique résumant le processus du protocole QET amélioré. Étape 1 : Alice et Bob préparent l’état fondamental à trois qubits. Étape 2 : Alice effectue une mesure locale sur le qubit A et communique le résultat à Bob. Bob utilise ensuite cette information pour activer le qubit C, ce qui le prépare à recevoir l’énergie du qubit B. Étape 3 : En utilisant à nouveau les informations d’Alice, Bob envoie une impulsion pour extraire l’énergie du qubit B, qui est alors stockée dans le qubit C pour une utilisation future. © Songbo Xie et al.

En testant le protocole amélioré avec un ordinateur quantique supraconducteur, les chercheurs ont montré qu’il était possible d’extraire de l’énergie à partir de l’état quasi-vide et de la stocker pour une utilisation ultérieure. « Nous avons validé expérimentalement ce protocole amélioré à l’aide d’ordinateurs quantiques supraconducteurs d’IBM, démontrant sa faisabilité et son potentiel pour de futures applications dans la manipulation de l’énergie quantique », ont-ils écrit dans leur document. L’énergie ainsi stockée pourrait par exemple être utilisée pour une boucle d’alimentation, pour l’exécution des tâches des ordinateurs quantiques.

Toutefois, d’autres experts qui ont commenté l’étude estiment qu’étant donné qu’elle a été effectuée sur un ordinateur quantique, l’expérience de la nouvelle étude s’apparenterait davantage à une simulation plutôt qu’à une démonstration empirique. Néanmoins, l’équipe prévoit d’explorer davantage le potentiel d’application de son protocole, en utilisant l’énergie stockée pour déclencher des réactions chimiques contrôlées — ce qui en ferait ainsi une vraie démonstration empirique.

Source : arXiv

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