Cannabis : le risque de cancer du foie serait réduit de 55% pour les consommateurs

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Le carcinome hépatocellulaire (CHC) est le cancer du foie le plus fréquent (90% des cas), représentant la quatrième cause de décès par cancer dans le monde. Les options actuelles de traitement ne s’appliquent qu’aux premiers stades du développement tumoral. Malheureusement, la moitié des patients connaîtront une récidive tumorale. Récemment, une équipe américaine a mis en évidence un lien clair entre la consommation de cannabis chez l’Homme et un risque minoré de 55% de développer un carcinome hépatocellulaire. Des études cliniques supplémentaires aideront à mieux comprendre le mécanisme par lequel divers ingrédients actifs, en particulier le CBD dans le cannabis, peuvent éventuellement réguler le développement du carcinome hépatocellulaire.

Le carcinome hépatocellulaire (CHC) est responsable de 500 000 à 1 million de décès par an. En France, la mortalité associée au CHC est d’environ 8000 décès par an. En cas de diagnostic de CHC après apparition des symptômes, la survie à 5 ans est estimée à 18%. Le carcinome hépatocellulaire (CHC), principal cancer primitif du foie, est presque toujours la complication d’une maladie chronique du foie appelée cirrhose. Les principales causes de cirrhose sont la consommation excessive et prolongée d’alcool, les infections chroniques par les virus de l’hépatite B et de l’hépatite C, et le syndrome métabolique (surpoids ou obésité, diabète, hypertension artérielle).

Le cannabis est la troisième substance psychoactive la plus consommée, dans le monde, après l’alcool et le tabac. Il a récemment été envisagé pour des applications cliniques. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), on estime actuellement qu’entre 128 et 232 millions de personnes dans le monde en consomment, et la légalisation grandissante du cannabis augmentera ce nombre dans un futur proche. Malgré son utilisation généralisée, les avantages cliniques du cannabis doivent encore être étudiés et pourraient peut-être apporter une solution au manque de traitements face à certains cancers.

En effet, ces dernières années, plusieurs essais cliniques ont testé l’efficacité de nouveaux agents, ciblant sélectivement le processus cancérigène du carcinome hépatocellulaire. Malheureusement, aucune amélioration significative du pronostic des patients n’a été obtenue jusqu’à présent.

Dans ce contexte, une équipe de chercheurs affiliés à la Cleveland Clinic et au Georgetown University Hospital à Washington DC a évalué la relation entre la consommation de cannabis et le CHC dans une cohorte de plus d’un million de sujets. Leurs données sont publiées dans la revue Cureus.

Une étude populationnelle hors norme

Afin d’étudier la possible relation entre le cannabis et le cancer du foie, les auteurs ont sélectionné parmi la base de données National Inpatient Sample (NIS) entre 2002 et 2014, des patients atteints de CHC et consommateurs ou non de cannabis.

Sur les 101 231 036 patients adultes du NIS de 2002 à 2014, les chercheurs ont identifié 996 290 (1%) patients consommant du cannabis, contre 100 234 746 (99%) patients ne consommant pas de cannabis. Le groupe des consommateurs de cannabis avait une prévalence plus élevée d’abus d’alcool, d’antécédents de tabagisme, de VHB, de VHC et de cirrhose du foie, pathologies précurseurs des carcinomes hépatocellulaires. Néanmoins, ils avaient une prévalence plus faible de CHC, d’obésité, et de calculs biliaires par rapport au groupe non consommateur.

De plus, les auteurs ont également identifié 111 040 (0,1%) patients atteints de CHC, dont 734 (0,7%) étaient des consommateurs de cannabis. En utilisant une régression logistique multivariée et après ajustement en fonction de la démographie des patients, des comorbidités et des caractéristiques hospitalières, ils ont estimé que les consommateurs de cannabis étaient 55% moins susceptibles de développer un CHC par rapport aux non-consommateurs de cannabis.

Du cannabis en traitement curatif ?

Le cannabis peut exercer son effet grâce à deux composés chimiques actifs, le tétrahydrocannabinol (THC) et le CBD, qui se lient à leurs récepteurs cannabinoïdes respectifs CB-1 et CB-2 dans le corps. Dans le foie, la signalisation du récepteur CB-1 stimule les cellules étoilées hépatiques, favorisant ainsi la stéatohépatite — maladie chronique avec accumulation de graisses dans le foie (stéatose) associée à une inflammation de l’organe (hépatite) — et la fibrose hépatique, processus cicatriciel dont l’évolution ultime est la cirrhose, complication majeure de nombreuses maladies du foie. À l’inverse, l’activation du récepteur CB-2 diminue l’infiltration des cellules immunitaires hépatiques, le stress oxydatif, les lésions hépatiques et la fibrogenèse entraînant donc l’inhibition de la cirrhose du foie.

De surcroît, certaines études sur des cellules de souris et de rats ont montré que les cannabinoïdes pouvaient inhiber la croissance des tumeurs, en causant la mort des cellules cancéreuses, en bloquant leur division ou encore en empêchant l’angiogenèse (production de vaisseaux pour nourrir la tumeur) tout en protégeant les cellules saines.

Par conséquent, CB-1 et CB-2 ont le potentiel de servir de cibles thérapeutiques. Sans compter que l’activité agoniste de CB-2 exercée par le cannabis, en particulier par le CBD, offre une explication aux observations de la présente étude. En termes simples, elle servirait de protection contre le CHC ou du moins permettrait un ralentissement de la progression de la maladie. De plus, le développement pharmaceutique de composés exerçant le double effet d’antagonisme CB1 et d’agonisme CB2 serait une avancée majeure dans la prise en charge des maladies hépatiques.

Les auteurs concluent : « À notre connaissance, il s’agit de la première et de la plus grande étude transversale basée sur la population de patients hospitalisés pour explorer l’association entre la consommation de cannabis et le CHC. En raison de la structure transversale de notre étude, nous ne sommes pas en mesure de tirer des effets de causalité directs. Par conséquent, nous suggérons des études cliniques prospectives pour mieux comprendre le mécanisme par lequel divers ingrédients actifs, en particulier le CBD dans le cannabis, peuvent éventuellement réguler le développement du carcinome hépatocellulaire ».

Source : Cureus

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