Des physiciens du MIT ont découvert une nouvelle manière de libérer les pouvoirs supraconducteurs du graphène, le rendant notamment capable de faire circuler l’électricité avec une résistance nulle.
Le graphène est déjà un exploit en soit : avec juste un atome d’épaisseur, il est plus solide que l’acier, plus dur que le diamant, et incroyablement flexible. L’année dernière, des scientifiques ont trouvé le moyen de libérer ses capacités supraconductrices. Et aujourd’hui, pour la toute première fois, les scientifiques ont démontré qu’ils pouvaient atteindre un tout nouveau type de supraconductivité, seulement en mettant le graphène en contact avec d’autres supraconducteurs.
La supraconductivité est un aspect important, même pour un matériau comme le graphène. Les conducteurs standards tels que l’argent ou le cuivre sont bons pour transporter un courant électrique, mais les électrons qui les traversent rebondissent tout de même sur les imperfections du matériau, perdant de ce fait de l’énergie. Mais à l’intérieur des supraconducteurs, les électrons se couplent et se déplacent à travers le matériau comme s’ils ne faisaient qu’un, et ce sans perdre de l’énergie par friction. De ce fait, si nous pouvions trouver un moyen d’atteindre une supraconductivité à température ambiante, cela engendrerait des dispositifs électroniques bien plus efficaces, sans parler des lignes électriques. Actuellement, les entrerprises d’énergie subissent environ 7% de pertes en raison de la résistance électrique globale du réseau.
Jusqu’à présent, le graphène a prouvé être un supraconducteur qu’à des températures très froides, et il en va de même pour cette nouvelle expérience. Par contre, grâce aux autres propriétés remarquables du matériau, nous pourrions peut-être un jour l’utiliser pour créer de minuscules appareils électroniques, fonctionnant à grande vitesse et qui ne gaspilleraient pas d’énergie.
Lors de cette dernière étude, les physiciens du MIT ont pris un flocon de graphène et l’ont disposé entre deux couches d’aluminium, qui à basse température, se comporte comme un supraconducteur. L’équipe a ensuite refroidi l’ensemble de l’installation à environ 20 millikelvin (-273,13 degrés Celsius), activant ainsi les capacités supraconductrices de l’aluminium. Puis, les chercheurs ont démontré que cela modifiait radicalement l’état électronique du graphène et que ce dernier répondait à certaines des qualités des supraconducteurs.
« [Les supraconducteurs] donnent réellement au graphène des qualités supraconductrices », explique le chercheur principal, Landry Bretheau. « Nous avons constaté que ces électrons peuvent être considérablement affectés par les supraconducteurs », ajoute-t-il.
Mais il y a plus important encore : au lieu que les électrons du graphène agissent de manière individuelle, ils ont commencé à se coupler, un phénomène connu sous le nom de réflexion d’Andreev, permettant aux matériaux qui traditionnellement ne sont pas supraconducteurs, de transporter un « supercourant » qui s’écoule sans perte d’énergie.
Contrairement aux paires d’électrons dans les matériaux supraconducteurs traditionnels, connues sous le nom de paires de Cooper, les électrons du graphène se combinent par frustration, car ils sont tirés dans deux directions différentes par les supraconducteurs de chaque côté du sandwich.
« Les électrons dans un supraconducteur dansent harmonieusement par paires, comme un ballet, mais la chorégraphie des supraconducteurs gauche et droit, peut être différente. Les couples d’électrons dans le graphène central sont « frustrés » car ils essaient de satisfaire les deux manières de « danser ». Ces paires dites frustrées sont ce que les physiciens connaissent comme la réflexion d’Andreev : ils portent le supercourant », explique Bretheau.
Cet effet a été prédit pour la toute première fois en 1962, par le physicien britannique Brian David Josephson. Mais il s’agit de la première fois qu’il est possible de le prouver et de l’obtenir du graphène (ou de tout autre matériau bidimensionnel).
Cette technique offre non seulement un moyen plus simple de libérer le pouvoir supraconducteur du graphène, mais elle permet également d’accéder à la possibilité d’étudier des particules très intéressantes qui pourraient apparaître dans le graphène.
Par exemple, les particules de Majorana (ou fermions de Majorana), sont d’un intérêt particulier pour les chercheurs (il s’agit d’un fermion qui est sa propre antiparticule), car c’est ce qui est censé survenir lors des réflexions d’Andreev, et pourrait à l’avenir être utilisé pour concevoir des ordinateurs quantiques puissants. « Il y a un énorme effort fournit par la communauté de la physique pour rechercher des états électroniques quantiques exotiques. On prévoit, en particulier, que de nouvelles particules appelées fermions de Majorana apparaissent dans le graphène relié à des électrodes supraconductrices et exposé à de grands champs magnétiques », explique Bretheau. « Notre expérience est prometteuse car nous unifions certains de ces ingrédients », conclut-il.
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