Depuis près de 60 ans, les scientifiques savent que le produit chimique responsable de la réputation psychédélique des champignons hallucinogènes est un composé appelé psilocybine. À présent, les scientifiques sont prêts à produire en masse ce composé actif que l’on trouve dans ces champignons !
Ce que nous ne connaissions pas, c’était le processus biochimique de ce célèbre hallucinogène qu’est la psilocybine. Mais à présent, des chercheurs allemands ont identifié les quatre enzymes clés impliquées dans la fabrication du produit chimique, ce qui pourrait mener à la production de masse d’un nouveau produit pharmaceutique prometteur.
La psilocybine a été identifiée pour la première fois par le scientifique suisse Albert Hofmann en 1958, mais ce n’est que récemment que les chercheurs se sont repenchés sur elle, en tant que moyen sûr permettant de traiter des affections liées à l’anxiété, la dépression et à la dépendance. Biologiquement parlant, il faut savoir que la psilocybine est métabolisée en psilocyne (ces deux éléments possèdent des structures similaires à la sérotonine), ce qui affecte différentes régions corticales ou subcorticales du cerveau.
À présent, les scientifiques pensent qu’il pourrait y avoir un moyen sûr et efficace de synthétiser le composé afin d’effectuer des expérimentations, menant potentiellement à une production de masse. De ce fait, une équipe de chercheurs de l’Université d’Iéna en Allemagne, a séquencé les génomes des espèces de champignons hallucinogènes appelés Psilocybe cubensis et Psilocybe cyanescens, pour découvrir quels étaient précisément les composants chimiques permettant de créer la molécule en question.
Des études précédentes menées sur la biosynthèse de la molécule avaient déjà révélé les différentes étapes requises afin de transformer la molécule de tryptophane (un acide aminé essentiel) en une série de produits chimiques, comme la psilocybine. Bien que l’ordre des étapes soit au final légèrement différent, les scientifiques ont découvert que quatre enzymes étaient responsables de l’intégralité du processus.
Les scientifiques ont donc pu établir que ces enzymes sont tout aussi importantes par rapport au processus global que les gènes qui les encodent. « Nos découvertes permettent la production hétérologue de psilocybine dans un lieu contrôlé, à des fins pharmaceutiques, en utilisant des hôtes microbiologiques bien conçus », expliquent les chercheurs dans leur rapport.
Malheureusement, depuis le milieu des années 1960, la production de psilocybine à partir de champignons a été fortement réglementée, lui important une réputation de drogue altérant l’esprit des amateurs de fêtes, plutôt qu’un élément possédant une véritable vertu thérapeutique pour les maladies mentales. Cela a rendu plus difficile le fait de l’étudier, car la substance jugée illicite, a effectivement dissuadé de nombreux scientifiques d’approfondir les recherches quant à ses bienfaits potentiels.
C’est après quatre décennies d’ignorance dans le domaine de la science des psychédéliques, que des chercheurs ont souhaité étudier à nouveau comment des substances telles que le diéthylamide de l’acide lysergique (LSD) et la psilocybine se comportaient dans le cerveau. Depuis, les scientifiques ont prouvé que les psychédéliques pouvaient réduire les symptômes cliniques des troubles de l’humeur, des troubles affectifs, de la dépendance, et même aider en cas de maladies douloureuses telles que les céphalées en grappes.
Plus récemment, les chercheurs ont constaté que de petites doses de psilocybine pouvaient être utilisées en conjonction avec une thérapie, pour aider à « réinitialiser » le cerveau durant le suivi psychologique.
Concernant les risques, les principaux problèmes actuels auxquels les consommateurs de champignons magiques sont confrontés, proviennent de la mauvaise sélection de champignon (par exemple un spécimen toxique/mortel dans la nature, ou un champignon ayant trop peu, ou trop, de composés actifs) ou encore un comportement dangereux résultant d’une influence accrue résultant d’un abus. Pourtant, le psychiatre Adam Winstock assure que « les champignons magiques sont l’un des médicaments les plus sûrs au monde ».
Selon les scientifiques, par rapport à d’autres substances illicites telles que le LSD, la cocaïne et la MDMA, le risque de dommages causés par la prise de psilocybine serait au moins cinq fois moins élevé. En effet, dans une étude (l’Enquête Mondiale sur les Drogues, menée 2017) qui a été effectuée dans plus de 50 pays, avec quelques 119’846 personnes interrogées, le rapport affirme que les champignons magiques ont statistiquement un potentiel de préjudice bien inférieur par rapport aux autres drogues illégales.
Bien entendu, les chercheurs devront effectuer des études supplémentaires ainsi que des essais cliniques plus avancés afin de démontrer la véracité des vertus de ce composant.