Les 12 derniers mois ont tous enregistré des records de température, dépassant à chaque fois la limite de 1,5 °C au-dessus de la moyenne préindustrielle. Selon le dernier rapport du Copernicus Climate Change Service (C3S), ces records successifs sont en partie dus à l’effet El Niño. Cependant, d’autres dépassements pourraient encore être attendus au rythme actuel des émissions de gaz à effet de serre (GES).
Pour établir des rapports climatiques sur plusieurs décennies, le C3S s’appuie sur les données ERA5, la cinquième génération de réanalyses pour le climat et la météorologie mondiale des 8 dernières décennies. Ces analyses sont effectuées sur la base de milliards de mesures provenant de satellites, de navires, d’avions et de stations météorologiques du monde entier.
Alors que l’année 2023 est officiellement la plus chaude depuis le début des enregistrements météorologiques, cette année est en passe d’obtenir le nouveau record. D’après les dernières données ERA5, le mois de juin dernier a été le plus chaud jamais enregistré à l’échelle mondiale avec une température moyenne de l’air de 16,6 °C, soit 0,67 °C au-dessus de la moyenne entre 1991 et 2020 et 0,14 °C au-dessus de juin 2023.
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La température moyenne entre juillet 2023 et juin 2024 est supérieure de 0,76 °C par rapport à la celle de 1991-2020 et 1,64 °C plus élevée que la moyenne préindustrielle. Cela signifie que les températures ont dépassé la limite de 1,5 °C pendant 12 mois consécutifs. Bien que cela soit inhabituel, une série de records plus ou moins similaire a déjà été enregistrée entre 2015 et 2016.
Cependant, « il s’agit de bien plus qu’une simple bizarrerie statistique et cela met en évidence un changement important et continu de notre climat », explique dans un communiqué le directeur du C3S, Carlo Buontempo. « Même si cette série spécifique d’extrêmes prend fin à un moment donné, nous serons obligés de voir de nouveaux records battus à mesure que le climat continue de se réchauffer. C’est inévitable, à moins que nous ne cessions d’ajouter des GES dans l’atmosphère et les océans », ajoute-t-il.
En Europe, le mois dernier était 1,57 °C plus chaud que la moyenne de 1991 à 2020, ce qui en fait le mois de juin le plus chaud jamais enregistré pour le continent. Les températures les plus élevées ont été enregistrées dans les régions du sud-est et en Turquie. Ailleurs dans le monde, des températures anormalement élevées ont été observées dans l’est du Canada, l’ouest des États-Unis et du Mexique, le Brésil, le nord de la Sibérie, le Moyen-Orient, le nord de l’Afrique et l’ouest de l’Antarctique.
En outre, la superficie de la banquise arctique était 3 % inférieure à la moyenne, tandis que celle antarctique était 12 % inférieure. Cette dernière constitue la deuxième étendue la plus faible pour un mois de juin, la première étant l’année dernière, lorsque la surface de la banquise en Antarctique était 16 % inférieure à la normale.
L’Accord de Paris bientôt rompu ?
Selon les climatologues, cette série de températures anormalement élevées serait en partie due à l’effet El Niño, qui a duré de juin 2023 au mois de mai de cette année. « Le climat continue de nous alarmer – les 12 derniers mois ont battu des records comme jamais auparavant – causés principalement par nos émissions de gaz à effet de serre et par l’augmentation supplémentaire due à l’événement El Niño dans le Pacifique tropical », explique Samantha Burgess, directrice adjointe du C3S.
Cependant, alors que les températures sont censées se stabiliser avec la fin d’El Niño et le retour de La Niña, les climatologues pensent que les températures pourraient tout de même continuer à augmenter. Les températures étaient notamment inférieures à la moyenne dans l’est du Pacifique équatorial en raison du début de l’effet La Niña, mais celles de l’air au-dessus de l’océan sont restées à un niveau inhabituellement élevé dans de nombreuses régions. Certains experts estiment d’ailleurs qu’il y a 95 % de chances que 2024 surpasse 2023 en matière de records de températures.
D’un autre côté, bien que la limite de 1,5 °C ait été dépassée durant une année entière, cela ne signifie pas encore que l’Accord de Paris a été rompu. Établi en 2015 par près de 200 pays, il s’agit notamment d’un engagement visant à limiter la hausse des températures mondiales à 1,5 °C au-dessus du niveau préindustriel au mieux et en dessous de 2 °C dans le pire des cas. Les dépassements sont considérés comme véritablement effectifs seulement si ces températures sont maintenues sur une période de 20 à 30 ans.
Toutefois, ces limites pourraient être dépassées plus tôt que prévu si le rythme actuel d’émission de GES persiste. En outre, même si le réchauffement était maintenu à 1,5 °C, cela nous rapprocherait de multiples points de basculement pouvant provoquer des phénomènes météorologiques toujours plus extrêmes, des famines, des destructions massives d’écosystèmes, … Par exemple, un réchauffement de 1,5 °C maintenu sur plusieurs décennies provoquerait la disparition de 70 à 90 % des récifs coralliens. Or, ces récifs abritent 25 % de la faune marine de la planète, dont la survie de millions de personnes dépend.
Les prémices de ces impacts ont déjà commencé à se faire sentir à travers le monde. Des incendies dévastateurs ont récemment ravagé la Californie en raison d’une sécheresse extrême, tandis que la Chine, le Kenya et d’autres régions en Afrique, ont subi des inondations meurtrières.