2024 a officiellement été l’année la plus chaude jamais enregistrée et la première à dépasser (en moyenne) 1,5 °C au-dessus des niveaux préindustriels, selon les agences de surveillance climatique. Elle a dépassé le record de 2023 en atteignant 1,6 °C de réchauffement, marquant une nouvelle étape préoccupante dans la trajectoire climatique de la planète. Alors que les experts espèrent cette année un refroidissement avec le retour de l’effet La Niña, cet effet risque d’être faible, en raison des émissions toujours croissantes de gaz à effet de serre.
L’année dernière, la température moyenne mondiale était de 15,10 °C, soit de 0,72 °C supérieure à la moyenne entre 1991 et 2020 et de 0,12 °C supérieure à celle de 2023. Cela se traduit par une température de 1,6 °C plus élevée que la moyenne entre 1850 et 1900, ce qui en fait la première année de l’histoire des relevés météorologiques à dépasser 1,5 °C de réchauffement (l’une des limites établies par l’Accord de Paris), comme prédit par les experts.
L’Accord de Paris a pour objectif de limiter le réchauffement à 1,5 °C et bien en dessous de 2 °C. Bien que ces limites ne soient pas encore officiellement dépassées (car l’Accord considère la moyenne sur plusieurs années), « nous sommes désormais sur le point de dépasser le seuil de 1,5 °C défini par l’Accord de Paris et la moyenne des deux dernières années est déjà supérieure à ce niveau », affirme dans un communiqué du service Copernicus sur le changement climatique (C3S), Samantha Burgess, responsable stratégique du climat au Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme.
Afin de mettre cela en perspective, les températures les plus chaudes que la planète a connues il y a environ 3 millions d’années (au Pliocène) étaient de 3 °C au-dessus de la moyenne pré-industrielle. À cette époque, les niveaux de la mer étaient de plusieurs dizaines de mètres plus élevés qu’aujourd’hui. Les tendances actuelles indiquent que « nous avons atteint la moitié du réchauffement observé au Pliocène en seulement 150 ans », a déclaré Gavin Schmidt, directeur du Goddard Institute for Space Studies (GISS), dans un communiqué de la NASA.
D’après les données du C3S, juillet 2024 a enregistré la température journalière la plus chaude (une moyenne mondiale de 17,16 °C) et la température mondiale a atteint des records pendant plus de 10 mois consécutifs. De janvier à juin 2024, chaque mois a été plus chaud que le mois correspondant de toutes les années précédentes. Les 10 dernières années consécutives ont été les plus chaudes jamais enregistrées. Ces données concordent avec celles de la NASA et d’autres agences de surveillance climatiques.
Un nouveau record des niveaux de CO2 dans l’atmosphère
D’après les climatologues, les niveaux de réchauffement exceptionnels des deux dernières années sont en partie dus à l’effet El Niño, un phénomène climatique périodique caractérisé par une augmentation de la température océanique dans le sud du Pacifique. Il résulte de l’inversion des vents du Pacifique et modifie la circulation atmosphérique à l’échelle mondiale, provoquant ainsi une hausse globale des températures.
Cependant, bien qu’El Niño soit historiquement connu pour provoquer des températures caniculaires, celles actuelles sont principalement associées aux émissions anthropiques toujours croissantes de gaz à effet de serre. D’après l’Organisation météorologique mondiale (OMM), les niveaux atmosphériques de CO2 ont atteint 420 parties par million (ppm) en 2023, contre 280 ppm avant l’ère industrielle. Les données du C3S indiquent que les niveaux étaient de 2,9 ppm supérieurs à ceux de 2023 en 2024, atteignant ainsi un nouveau record de 422 ppm.
Bien que le taux de transition énergétique ait augmenté au cours des dernières années, la croissance de la demande énergétique semble avoir réduit les efforts dans ce sens. En outre, la réélection de Donald Trump pourrait impacter considérablement les efforts climatiques mondiaux, sous réserve des décisions concrètes que prendra son administration.
En tant que première puissance mondiale, les États-Unis jouent un rôle clé dans la lutte contre le réchauffement climatique. Or, le nouveau président n’est pas favorable à la poursuite des efforts du précédent gouvernement à cet effet. Il s’est engagé à augmenter la production de combustibles fossiles du pays et à assouplir les réglementations visant à limiter les émissions de gaz à effet de serre. Pour la deuxième fois en moins de dix ans, les États-Unis pourraient se retirer de l’Accord de Paris.
Un espoir de refroidissement avec le retour de La Niña ?
Selon Schmidt, « nous ne battrons pas tous les records chaque année, mais la tendance à long terme est claire ». « Nous en constatons déjà l’impact sous forme de précipitations extrêmes, de vagues de chaleur et d’augmentation du risque d’inondation, qui vont continuer à s’aggraver tant que les émissions continueront », avertit-il.
Parmi les exemples frappants figurent les inondations dévastatrices en Espagne et la saison des typhons exceptionnelle aux Philippines (6 en seulement 30 jours). On peut aussi citer les deux ouragans consécutifs qui ont frappé les États-Unis et plus récemment, les vastes incendies de forêt en Californie, incluant la région de Los Angeles.
« Comme toujours, il est difficile d’établir un lien entre un événement ponctuel comme cet incendie et un processus à long terme comme le réchauffement climatique. Ils sont à deux échelles totalement différentes. Mais quand on parle d’une période de sécheresse qui est la deuxième plus sévère depuis cent cinquante ans, il est évident que l’hypothèse sera évoquée », explique Christian Kull, spécialiste des feux de forêt à l’Université de Lausanne, à la Tribune de Genève.
Les experts espèrent cette année un refroidissement avec le retour de l’effet La Niña, l’inverse d’El Niño. Cependant, bien qu’il soit possible que 2025 ne dépasse pas le record de l’année dernière, cet effet de refroidissement sera faible si les tendances actuelles d’émissions de gaz à effet de serre se poursuivent. Le Met Office britannique estime que 2025 sera l’une des trois années les plus chaudes jamais enregistrées, juste après 2024 et 2023.
Vidéo de présentation de l’étude la NASA sur le réchauffement en 2024 :