À 33 ans, une ingénieure paraplégique entre dans l’histoire en allant dans l’espace

« J’espère vraiment que cela ouvre la voie à des gens comme moi, j’espère que je ne suis que le début. »

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Michaela Benthaus pose après l'atterrissage de la capsule Blue Origin, le samedi 20 décembre 2025, dans l'ouest du Texas. | Blue Origin
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Michaela Benthaus, une ingénieure paraplégique allemande, est devenue la première personne en fauteuil roulant à aller dans l’espace grâce à un vol privé de Blue Origin samedi dernier. Elle a pu laisser son fauteuil roulant derrière elle pour vivre quelques minutes d’apesanteur en compagnie de cinq autres passagers. Au-delà de la réalisation d’un rêve, Benthaus espère avoir contribué à améliorer l’accessibilité de l’espace aux personnes handicapées.

Fondée en 2000 par Jeff Bezos, le fondateur d’Amazon, Blue Origin a pour objectif d’effectuer des missions spatiales à la fois à des fins scientifiques et touristiques. Elle a connu des réalisations notables depuis sa création, avec le premier vol spatial habité (auquel Bezos a lui-même participé) en 2021.

L’entreprise travaille également avec la NASA dans le cadre de contrats liés notamment au développement de technologies spatiales, et est engagée avec celle-ci pour les futures missions habitées à destination de la Lune et au-delà. Le lancement et la récupération réussis de la fusée réutilisable New Glenn figurent parmi ses récentes réalisations à cet effet.

Avec le lancement du dernier équipage privé qui a emmené Benthaus, Blue Origin porte désormais le nombre de ses touristes spatiaux à 86, un chiffre qui marque une nouvelle étape dans l’ouverture des vols spatiaux à des profils variés.

Les vols spatiaux toujours plus accessibles

Gravement blessée à la suite d’un accident de VTT il y a sept ans, Benthaus est membre du programme de formation de l’Agence spatiale européenne (ESA) aux Pays-Bas. Âgée aujourd’hui de 33 ans, la jeune ingénieure a déjà expérimenté l’apesanteur lors d’un vol parabolique en avion en 2022. Elle a participé, un peu moins de deux ans plus tard, à une simulation de mission spatiale de deux semaines en Pologne. Ce parcours s’inscrit toutefois dans un cadre de formation et de recherche, sans lien direct avec le vol privé auquel elle a récemment pris part.

Toutefois, « je n’avais jamais vraiment pensé qu’un vol spatial ne serait jamais une option réaliste pour moi, car même en étant en pleine forme, c’est un milieu tellement compétitif, n’est-ce pas ? », a-t-elle déclaré à l’Associated Press. « Il n’existe pratiquement aucun précédent de personnes handicapées ayant voyagé dans l’espace », a-t-elle ajouté.

La seule personne avec un handicap autorisée à effectuer un vol spatial avant Benthaus était John McFall. Amputé de sa jambe droite à la suite d’un accident de moto, l’ancien athlète paralympique britannique n’a pas encore volé, mais a été autorisé médicalement et sélectionné pour une mission prévue vers la Station spatiale internationale (ISS), dans le cadre d’un projet de l’Agence spatiale européenne (ESA).

Cependant, la lésion permanente de la moelle épinière de Benthaus la prive de l’usage de ses jambes, tandis que McFall, lui, peut encore utiliser une prothèse et s’évacuer plus facilement d’une capsule spatiale en cas de problème. Néanmoins, Hans Koenigsmann, un ancien cadre de SpaceX qui a contribué à l’organisation du vol, a, avec Blue Origin, financé son voyage. Le prix de leurs billets n’a pas été divulgué.

D’autres touristes spatiaux de Blue Origin souffraient de handicaps (mobilité réduite, déficiences visuelles ou auditives, grand âge, …), mais jusqu’ici aucun d’un niveau comparable à celui de Benthaus. Son vol est une mission privée sans aucune implication de l’ESA.

« Il ne faut jamais renoncer à ses rêves, n’est-ce pas ? »

Mis à part le financement de son vol, Koenigsmann a également été désigné comme secouriste pour Benthaus. Elle s’est néanmoins entraînée au préalable avant le vol, avec la participation de son financeur à la conception et aux essais. D’un autre côté, la capsule New Shepard qui a été utilisée pour le vol n’a, selon Blue Origin, nécessité que des ajustements mineurs pour accueillir une personne de sa condition, cela grâce à un agencement conçu dans un souci d’accessibilité.

Les ingénieurs de Blue Origin ont également installé une planche de transfert pour faciliter son déplacement entre l’écoutille de la capsule et son siège. Un ascenseur spécial a été installé sur le pas de tir pour qu’elle puisse facilement accéder à la capsule, qui est située au sommet de la fusée à une hauteur équivalente à sept étages.

La capsule s’est élevée à plus de 105 kilomètres d’altitude et a offert plus de trois minutes d’apesanteur aux passagers, lors d’un vol qui a, au total, duré dix minutes. L’équipe de récupération sur Terre a déroulé un tapis après l’atterrissage pour que Benthaus puisse rapidement accéder à son fauteuil. « C’était une expérience géniale ! », s’est-elle extasiée. « Il ne faut jamais renoncer à ses rêves, n’est-ce pas ? » a-t-elle ajouté.

Lors des préparatifs et pendant le vol, la jeune femme tenait à faire le maximum de choses par elle-même, apparemment dans le but de démontrer cela : l’espace peut être rendu plus accessible aux personnes handicapées. « J’espère vraiment que cela ouvre la voie à des gens comme moi, j’espère que je ne suis que le début », a-t-elle indiqué au journal. Mis à part Koenigsmann, Benthaus partageait la capsule avec des chefs d’entreprise, des investisseurs et un informaticien.

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