4 systèmes climatiques clés pourraient bientôt s’effondrer, selon une étude

Des conséquences dévastatrices à l’échelle planétaire.

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Une étude suggère que quatre éléments de basculement climatique clés pourraient s’effondrer au cours des trois prochains siècles en raison de la hausse inquiétante des températures mondiales. Il s’agit notamment des calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique occidental, de la forêt amazonienne et de la circulation méridionale de retournement de l’Atlantique. Ces basculements pourraient avoir des conséquences dévastatrices à l’échelle planétaire.

Les éléments de basculement climatiques sont des systèmes planétaires complexes pouvant entrer en transition de manière brusque et linéaire, en réponse au réchauffement climatique. Ces systèmes ont maintenu la stabilité du climat terrestre pendant des milliers d’années et une légère augmentation de la température mondiale peut les faire s’effondrer de façon irréversible. Leur importance est telle que les impacts de leur effondrement s’étendront à l’échelle planétaire.

Parmi ces éléments figurent les sous-systèmes de la cryosphère tels que la calotte glaciaire du Groenland et celle de l’Antarctique occidental, la circulation méridionale de retournement de l’Atlantique et les sous-systèmes de la biosphère comme la forêt amazonienne. D’autres éléments clés de basculement incluent également le pergélisol boréal et les récifs coralliens tropicaux. La plupart de ces systèmes sont interconnectés et l’effondrement de l’un pourrait engendrer des cascades de basculement par le biais de processus complexes d’interactions et de rétroactions.

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Cependant, la plupart des modèles climatiques ne simulent pas de manière précise les effets de rétroaction et les interactions entre ces éléments de basculement, en raison de limitations informatiques. Afin de combler les lacunes, l’équipe, de l’Université de Postdam et de l’Université Humboldt de Berlin, a étudié les risques de basculement de plusieurs systèmes climatiques selon des scénarios de réchauffement correspondants aux politiques actuelles.

Un effondrement potentiel de l’AMOC d’ici 15 ans

Signé par 175 pays le 22 avril 2016, l’Accord de Paris vise à limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C au-dessus de la moyenne préindustrielle et en dessous de 2 °C. Cependant, des études ont montré que pour le moment, les politiques actuelles concernant le climat devraient entraîner un réchauffement de 2,6 °C par rapport au niveau préindustriel d’ici la fin de ce siècle, si elles sont maintenues. De plus, même si l’on parvenait à limiter la hausse des températures à 1,5 °C, un dépassement temporaire au-dessus de ce seuil serait à prévoir.

Afin d’évaluer les impacts de ces niveaux de réchauffement sur les piliers de basculement climatique, l’équipe de la nouvelle étude s’est concentrée sur la circulation méridionale de retournement de l’Atlantique (AMOC), la forêt amazonienne, la calotte glaciaire en Antarctique (WAIS) et celle du Groenland (GIS) — 4 systèmes étroitement connectés.

Leurs analyses ont montré que si les politiques climatiques actuelles sont maintenues, elles pourraient entraîner un risque d’effondrement de 45 % d’ici 2300, et ce, même si les températures étaient ramenées en dessous du seuil de 1,5 °C. En effet, même si ce seuil était respecté, d’autres facteurs tels que la déforestation et la hausse de production de combustibles fossiles sont à considérer.

De précédents rapports ont par exemple montré que si les prévisions actuelles de production de combustibles fossiles sont réalisées, les quantités produites pourraient être le double de celles nécessaires pour maintenir le réchauffement en dessous de 1,5 °C, d’ici 2030. En outre, si le rythme actuel de déforestation en Amazonie est maintenu, la forêt tropicale pourrait entamer une transition irréversible vers un écosystème de savane ou de prairie.

D’autre part, le risque que ces piliers s’effondrent augmente tous les 0,1 °C de réchauffement au-dessus du seuil de 1,5 °C fixé par l’Accord de Paris et s’accélère considérablement au-dessus de 2 °C. Selon les chercheurs, ces risques sont particulièrement élevés pour l’AMOC qui pourrait s’effondrer dans les 15 prochaines années et pour l’Amazonie qui pourrait se transformer en savane d’ici 2070.

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Graphique montrant les plages de risques de basculement pour tous les scénarios d’émissions. a. À moyen terme (jusqu’en 2300) et b. à long terme (50 000 ans), le risque étant dérivé de la trajectoire médiane de température étant représentée par des points centraux et la plage s’étendant du 10e au 90e percentile de température. c. Température maximale du dépassement, d. Température de stabilisation à long terme par rapport à l’ère préindustrielle, avec 1,5 °C en pointillé, et e. durée du dépassement au-dessus de 1,5 °C jusqu’en 2300. © Tessa Möller et al.

Des conséquences dévastatrices pour la plupart irréversibles

L’effondrement de ces systèmes aura des conséquences dévastatrices à l’échelle mondiale et qui seraient pour la plupart irréversibles, même si l’on parvenait à limiter le réchauffement à 1,5 °C à l’avenir. L’AMOC par exemple, pourrait modifier drastiquement le climat d’une grande partie de l’Europe. En effet, elle agit comme un canal transportant saisonnièrement l’eau chaude des océans de l’hémisphère Sud vers l’océan Atlantique, ce qui permet à l’Europe de bénéficier de températures beaucoup plus élevées que l’Amérique du Nord.

L’effondrement du courant séquestrerait ainsi la chaleur dans les océans australs, tandis que l’Atlantique connaîtrait des températures significativement plus froides. Dans le sud, cela provoquerait des tempêtes tropicales extrêmes et accélérerait la fonte de la WAIS — ce qui à son tour pourrait provoquer une élévation du niveau de la mer. Dans le nord en revanche, l’ensemble des systèmes agricoles s’effondrerait en raison des températures trop froides. Des études ont précédemment suggéré que le basculement de l’AMOC pourrait diminuer le climat européen jusqu’à 3 °C, un niveau de basculement qu’aucune mesure d’adaptation ne pourrait pallier, selon les chercheurs.

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Risque de basculement pour chacun des quatre principaux éléments de basculement climatique étudiés, la calotte glaciaire du Groenland (GIS), la calotte glaciaire de l’Antarctique occidental (WAIS), la circulation méridionale de retournement de l’Atlantique (AMOC) et la forêt amazonienne (AMAZ). a. Risque de basculement à moyen terme (jusqu’en 2300). b. Risque de basculement à long terme (équilibre du modèle). L’ axe des x représente les incertitudes de la réponse climatique, avec une probabilité de 90 % que le résultat de la température dépasse la limite inférieure (10e percentile) et une probabilité de 10 % que le résultat de la température dépasse la limite supérieure (90e percentile). © Tessa Möller et al.

Le basculement de la forêt amazonienne engendrerait, quant à lui, une perte dramatique de biodiversité ainsi qu’une réduction de sa capacité à séquestrer du carbone et de sa résilience aux incendies. Cela provoquerait à son tour une augmentation des niveaux de CO2 dans l’atmosphère, favorisant davantage l’effet de réchauffement. En outre, la forêt contribue également à réguler les précipitations pour une grande partie du continent américain et en assure ainsi la production agricole.

Toutefois, l’ampleur et les impacts de ces effondrements restent incertains, étant donné que les interactions entre les éléments de basculement sont à double sens. Dans certains scénarios, l’effondrement de l’un pourrait contribuer à stabiliser l’autre. La fonte du GIS ou du WAIS pourrait par exemple potentiellement stabiliser l’AMOC. Cependant, ces effondrements auraient tout de même des impacts planétaires considérables. Les chercheurs estiment ainsi que la meilleure option pour limiter les impacts reste la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Source : Nature Communications

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