Dans une étude publiée récemment dans Nature Astronomy, des astronomes révèlent la découverte d’un groupe d’au moins 70 planètes errantes (c’est-à-dire dépourvues d’étoiles hôtes) dans notre galaxie, en épluchant 20 ans de données issues de différents télescopes.
L’espace est un cimetière d’objets dérivants. Depuis les années 2000, les scientifiques ont ajouté aux satellites abandonnés par les hommes les planètes errantes, ou planètes vagabondes. Elles flottent dans l’espace interstellaire, libres de toute attache gravitationnelle puisqu’elles ne sont liées à aucune étoile.
Ces planètes errantes ont une masse comparable à celles de notre système solaire mais restent des objets cosmiques insaisissables qui intriguent les scientifiques. Une équipe de chercheurs européens vient pourtant de découvrir un groupe d’au moins 70 de ces nomades galactiques, dont certains ont une taille similaire à celle de Jupiter.
Étude de minuscules mouvements, de couleurs et de luminosité
Peu lumineuses parce que loin d’une étoile, ces planètes vagabondes sont difficiles à imager. Aussi, l’équipe a cherché à localiser les plus jeunes d’entre elles. En effet, encore quelques millions d’années après leur naissance, les planètes restent suffisamment chaudes pour briller encore un peu. Ainsi, elles peuvent être détectables par les capteurs sensibles des grands télescopes.
« Nous avons mesuré les minuscules mouvements, les couleurs et les luminosités de dizaines de millions de sources dans une vaste zone du ciel », explique Núria Miret-Roig, astronome au Laboratoire d’Astrophysique de Bordeaux (France) et à l’Université de Vienne (Autriche).
Les chercheurs ont compilé 20 ans de données issues de différents télescopes : le Very Large Telescope (VLT) de l’Observatoire européen austral, le Visible and Infared Survey Telescope for Astronomy (VISTA), le VLT Survey Telescope (VST) et le télescope MPG/ESO de 2,2 mètres situé au Chili.
« La grande majorité de nos données proviennent des observatoires de l’ESO (observatoire européen austral), qui étaient absolument essentiels pour cette étude. Leur large champ de vision et leur sensibilité unique ont été les clés de notre succès », explique Hervé Bouy, astronome au Laboratoire d’Astrophysique de Bordeaux (France) et chef de projet de la nouvelle recherche. « Nous avons utilisé des dizaines de milliers d’images à grand champ provenant des installations de l’ESO, correspondant à des centaines d’heures d’observations et littéralement à des dizaines de téraoctets de données ».
L’équipe s’est également servie du satellite Gaia de l’Agence spatiale européenne (ESA). Un succès pour la collaboration de télescopes terrestres et spatiaux afin de mieux comprendre l’Univers.
Potentiellement des « milliards de ces planètes géantes »
Ces travaux suggèrent qu’il pourrait y avoir de nombreuses planètes errantes, sans étoile, qui n’ont pas encore été découvertes. Le professeur Bouy estime qu’il pourrait s’agir de « milliards de planètes géantes qui flottent librement dans la Voie lactée ». Mais cette découverte est aussi une source d’indices pour comprendre la façon dont elles se développent.
Certains chercheurs pensent que les planètes vagabondes peuvent se former après l’effondrement d’un nuage de gaz trop petit pour former une étoile ou encore qu’elles ont été éjectées de leur système solaire et dérivent depuis. On ignore encore quelle hypothèse est la plus probable.
Les chercheurs espèrent que les nouvelles technologies, en particulier le prochain très grand télescope (ELT) de l’ESO, pourront leur permettre d’en savoir plus sur ces corps célestes mystérieux. L’ELT est actuellement en construction dans le désert chilien de l’Atacama et il devrait être opérationnel au cours de la décennie. « L’ELT sera absolument crucial pour recueillir plus d’informations sur la plupart des planètes errantes que nous avons trouvées », conclut Bouy.