La hausse des températures engendre des cascades de phénomènes climatiques au niveau mondial, menaçant la biodiversité, la société et l’économie. Les prises de décisions concernant les mesures de lutte contre le réchauffement climatique sont généralement effectuées sur des estimations de scénarios relatifs à chaque menace, de façon individuelle. Or, comme les phénomènes climatiques sont interdépendants, les scientifiques estiment que, combinés aux épisodes de sécheresse extrême, les impacts négatifs des hausses de températures sont significativement plus élevés que lorsque l’on considère ces menaces indépendamment. Dans ce sens, de nouvelles estimations de l’Université d’Oxford indiquent que 90% de la population mondiale sera touchée par des vagues de chaleur et une sécheresse extrêmes d’ici la fin du siècle, et ce même pour les scénarios d’émission de carbone les plus bas.
Le réchauffement climatique est sans doute l’une des plus grandes menaces pesant sur les générations à venir, et dont les conséquences se font peu à peu ressentir. Dans de nombreuses régions du monde, l’on constate en été des températures records, impensables il y a 10 ans. La péninsule indienne avait fait la une en mai 2022, avec des pics de température allant jusqu’à 43,5 °C, les plus élevées depuis près de 122 ans.
Les scientifiques estiment qu’au rythme actuel de la hausse des températures, la Terre dépasserait son seuil d’habitabilité d’ici 2100 et de nombreuses régions (dont la péninsule indienne, l’Afrique subsaharienne, les Émirats arabes unis …) seront inhospitalières pour l’homme la majeure partie de l’année.
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Des menaces qui pèsent sur les écosystèmes
Il est évident que ces températures extrêmes menacent considérablement les écosystèmes, abritant la biodiversité et fournissant également des services écosystémiques vitaux pour l’homme. Beaucoup d’écosystèmes, tels que les récifs coralliens, subissent d’ailleurs déjà de plein fouet l’impact de ces hausses.
La plupart des estimations des menaces à venir se basent généralement sur des phénomènes considérés individuellement. Or, la hausse des températures est liée à de nombreux autres phénomènes comme la sécheresse et la désertification, qui sont en amont liés à la diminution de la disponibilité de l’eau douce.
Rappelons également que la séquestration du carbone dépend de l’intégrité des écosystèmes. Plus un écosystème est intact et biodivers, plus sa capacité à séquestrer du carbone est élevée. Nombre d’études révèlent également que les formations primaires, ainsi que les espèces natives d’une région, ont établi au cours de leur évolution des systèmes racinaires complexes, leur permettant de mieux séquestrer le carbone que des écosystèmes secondaires. Le maintien de l’intégrité de ces écosystèmes végétaux dépend fortement de la disponibilité en eau douce, qui est elle aussi directement menacée par la sécheresse.
D’après les chercheurs de la nouvelle étude, en considérant conjointement la hausse des températures et la sécheresse extrême pour effectuer une nouvelle estimation, les conséquences sur les écosystèmes sont bien plus graves qu’on le pensait jusqu’ici. « La fréquence des risques aggravants extrêmes devrait décupler à l’échelle mondiale en raison des effets combinés du réchauffement et de la diminution du stockage de l’eau terrestre, dans les scénarios d’émissions les plus élevées », explique Jiabo Yin , professeur à l’Université d’Oxford et auteur principal de la nouvelle étude.
D’après les chercheurs, la baisse de la disponibilité de l’eau est susceptible de jouer un rôle plus important dans la diminution de la séquestration de carbone que les températures extrêmes. Selon leur rapport, plus de 90% de la population mondiale est exposée à des risques croissants jusqu’à la fin de ce siècle (incluant de fortes pertes économiques), même dans le scénario d’émissions de carbone les plus basses.
Des conséquences sur l’économie mondiale
Il faut également rappeler que le réchauffement climatique a des conséquences directes et indirectes sur l’économie mondiale, et non seulement sur la biodiversité. Les impacts négatifs de la hausse des températures et de la sécheresse seront beaucoup plus importants pour les populations les plus vulnérables et habitant en zone rurale. Ces dernières pratiquent par exemple pour la plupart une agriculture de subsistance (dans certaines régions du monde) et dépendent fortement des ressources en eau disponibles. Sans compter que des écosystèmes dégradés par la sécheresse ne sont plus en mesure de fournir les services vitaux à l’homme, pesant fortement sur l’économie des pays les plus pauvres.
Dans les pays émergents ou en voie de développement, les scénarios de sécheresse et de canicules à venir risquent d’augmenter davantage les inégalités sociales. Par ailleurs, les catastrophes naturelles deviennent plus fréquentes à mesure que le climat se réchauffe. De plus, ce sont souvent les pays les plus pauvres qui nécessitent le plus d’aide, parfois contraints de s’endetter pour répondre à ces catastrophes.
Les décisions sur les objectifs de développement durable nécessitent la prise en compte de toutes les données scientifiques disponibles et pertinentes. Les résultats de cette nouvelle étude, décrite dans la revue Nature Sustainability, montrent peut-être une facette encore inexplorée.