Les climatologues ont récemment confirmé que 2023 a été officiellement l’année la plus chaude jamais enregistrée. Cela signifie que cette année (2024) pourrait être la première à surpasser de manière constante le seuil de 1,5 °C au-dessus des niveaux préindustriels. 2024 devrait ainsi donner un premier aperçu des changements et événements climatiques auxquels nous devrions nous attendre dans les années à venir.
L’année dernière a enregistré plusieurs records climatiques depuis les premiers enregistrements météorologiques. Les six derniers mois d’été dans l’hémisphère Nord ont notamment été les plus chauds jamais enregistrés. Les températures de surface moyennes au niveau mondial étaient de 1,34 à 1,54 °C supérieures à la moyenne préindustrielle. Alors que, malgré les records successifs, il n’y avait pas encore de consensus officiel faisant de 2023 l’année la plus chaude jamais enregistrée, les climatologues confirment désormais que c’est effectivement le cas.
Les élévations de la température de surface océanique ont été les principaux facteurs pour les augmentations inhabituelles de celles de l’air. Le principal facteur à long terme expliquant de tels événements est l’augmentation continue des concentrations atmosphériques de gaz à effet de serre. En effet, malgré les différents efforts visant à les diminuer — sans compter les innombrables avertissements des scientifiques, leur concentration dans l’atmosphère n’a cessé d’augmenter au cours des deux dernières décennies.
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D’un autre côté, on pourrait penser que le retour de l’effet El Niño en juillet dernier a également contribué à l’augmentation des températures mondiales. Cependant, la transition vers El Niño ne pourrait à elle seule expliquer les températures extrêmes enregistrées à la surface des océans, selon les climatologues.
Toutefois, bien que les températures soient plusieurs fois passées au-dessus de 1,5 °C, cela ne signifie pas que l’Accord de Paris a été rompu. En effet, cet accord tient toujours tant que les températures mondiales n’atteignent pas des niveaux constamment au-dessus de ce seuil. Néanmoins, les climatologues estiment qu’il pourrait être franchi pour la première fois au cours de cette année. Cela signifierait que 2024 donnera un aperçu des événements et des pertes (humanitaires et environnementales) à venir sous de telles températures.
Les récifs coralliens au bord du point de basculement
Le réchauffement climatique expose déjà la biodiversité à des températures dangereusement élevées, entraînant notamment des diminutions dramatiques de leurs populations et de leurs aires de répartition. Une étude a récemment révélé qu’avec des températures plus élevées de 1,5 °C, le nombre d’espèces exposées à des températures dangereuses pour leur survie augmentera de 15 %.
En d’autres termes, 15 % de la biodiversité mondiale pourraient subir de graves pertes démographiques et géographiques si les températures franchissent ce seuil de 1,5 °C au-dessus des niveaux préindustriels. Ce chiffre passerait à 30 % avec un réchauffement de plus de 2,5 °C.
Les premiers effets seront observés au niveau des récifs coralliens, ces écosystèmes peuplant les eaux peu profondes étant particulièrement vulnérables à l’élévation des températures. Malgré les efforts de conservation, ces récifs ne pourraient survivre à des températures planétaires dépassant le seuil de 1,5 °C d’élévation. Les chercheurs estiment que dans ce cas de figure, 99 % des coraux seraient trop souvent exposés à des températures trop élevées pour pouvoir se régénérer. D’autre part, il a récemment été estimé que les récifs coralliens seraient les premiers écosystèmes à atteindre un point de basculement écologique (seuil critique au-delà duquel un système se réorganise de façon irréversible).
Les pertes en matière de biodiversité seraient ainsi considérables. En effet, bien qu’ils n’occupent que 0,2 % des océans, les récifs coralliens abritent plus de 25 % de la biodiversité marine mondiale — soit plus d’espèces que tout autre écosystème sur Terre. D’un autre côté, ils fournissent une précieuse source de nourriture et de revenus pour au moins 1 milliard de personnes. Les pertes socioéconomiques à venir seraient ainsi considérablement élevées.
Quant aux écosystèmes terrestres, les impacts iraient des incendies de forêt extrêmes (comme celles récemment observées au Canada) à la désertification accélérée, en passant par la sécheresse. Les cycles de séquestration de carbone ainsi que les systèmes agricoles en seront gravement impactés.
Des températures menaçant notre survie
Les impacts de l’élévation des températures au-dessus de 1,5 °C ne se limitent pas uniquement à la biodiversité et à l’économie mondiale. L’être humain risque également de subir des impacts plus directs, les vagues de chaleur extrêmes pouvant entraver notre capacité à maintenir une température corporelle normale. En tenant compte de l’humidité de l’air, notre organisme ne peut survivre à des températures allant au-delà de 35 °C. Il s’agit entre autres du point critique au niveau duquel l’air est trop chaud pour que la transpiration puisse compenser et maintenir une température corporelle viable.
Des modélisations ont montré que les températures humides pourraient régulièrement dépasser les 35 °C si la planète dépasse constamment le seuil de 1,5 °C. En outre, la fréquence des températures humides dangereuses pour l’Homme a plus que doublé depuis 1979. Toutefois, cela affectera de manière différente les différentes régions du monde. Celles les plus susceptibles d’être affectées par des températures humides supérieures à 35 °C sont le golfe Persique, l’Asie du Sud et la plaine de Chine du Nord, selon les climatologues.
6 ans pour limiter le réchauffement à 1,5 °C
Selon les dernières estimations, il ne nous resterait que 6 ans pour limiter le réchauffement à 1,5 °C conformément à l’Accord de Paris. Il ne nous resterait notamment que 250 gigatonnes de budget carbone (la quantité nette de CO2 que l’humanité peut encore émettre tout en maintenant le réchauffement climatique en dessous d’un seuil donné) à dépenser avant 2030, pour ne pas franchir cette limite. Bien que ce délai semble dangereusement court, l’accord historique de la COP 28 concernant la transition hors des énergies fossiles redonne un peu d’espoir pour limiter le réchauffement planétaire.