Des scientifiques ont réussi à intégrer des nanotubes de carbone dans des neurones, afin de contrôler leur croissance et de restaurer les connexions électriques perdues entre les cellules nerveuses.
D’après une nouvelle étude scientifique, les nanotubes de carbone pourraient être utilisés en toute sécurité. Les chercheurs ayant mené la recherche espèrent pouvoir ainsi restaurer les fonctions neuronales aux personnes atteintes de lésions de la colonne vertébrale, par exemple.
Il faut savoir que les nanotubes de carbone possèdent des propriétés remarquables, qui ont également entraîné des avancées inattendues. En effet, ces nanotubes présentent une excellente conductivité thermique et électrique, ainsi qu’une grande résistance mécanique. Ils ont été utilisés pour fabriquer les fibres les plus solides et robustes jamais réalisées, des puces informatiques qui fonctionnent deux fois plus rapidement que les puces de silicium. Les nanotubes de carbone ont également permis de créer le matériau le plus noir du monde, le Vantablack.
Comme les nanotubes de carbone sont longs, fins et conducteurs, ils représentent le candidat idéal pour confectionner de véritables prothèses neuronales, permettant de restaurer les fonctions des voies neuronales endommagées. « Le matériau parfait pour construire des interfaces neuronales n’existe pas, mais les nanotubes de carbone sur lesquels nous travaillons ont déjà prouvé leurs grandes potentialités », a déclaré Laura Ballerini, l’une des chercheuses, de l’École internationale supérieure d’études avancées, en Italie. « Après tout, les nanomatériaux représentent actuellement notre meilleur espoir pour développer des stratégies innovantes dans le traitement des lésions de la moelle épinière », a-t-elle ajouté.
Pourtant, la nature fibreuse des nanotubes de carbone a soulevé des questions quant à leur sécurité et les place dans la même catégorie que l’amiante : une fibre minérale largement utilisée dans une vaste gamme d’applications, mais qui a déjà causé des maladies chez les personnes exposées. En effet, les caractéristiques physico-chimiques de l’amiante, associées à une capacité à se fractionner en particules microscopiques pour atteindre les alvéoles pulmonaires, et même migrer jusqu’à la plèvre, font qu’une inhalation importante de particules d’amiante est dangereuse, voire mortelle.
Mais concernant cette étude, les chercheurs ont chimiquement modifié la surface des nanotubes de carbone, afin qu’ils puissent être transformés en une encre de nanotubes de carbone, pour faciliter le traitement. L’encre a ensuite été déposée sur une surface de verre plate, puis a été chauffée à une température de 350 degrés Celsius, afin de créer une fine couche de nanotubes de carbone pure. Les neurones utilisés pour l’étude ont été récoltés à partir de l’hippocampe de rats de laboratoire puis directement déposés sur la fine couche de nanotubes. Après une période d’incubation à température corporelle, les cellules ont été testées pour constater l’efficacité de la conductivité et de la compatibilité avec la surface des nanotubes de carbone.
L’équipe de Ballerini est confiante et affirme que cette fois, les nanotubes peuvent être utilisés en toute sécurité : « Tout d’abord, nous avons prouvé que les nanotubes n’interfèrent pas avec la composition des lipides, en particulier le cholestérol, qui forment la membrane cellulaire dans les neurones », a expliqué Ballerini.
Mais il y a plus encore ! L’étude a également révélé que les cellules nerveuses se développant sur un lit plat de nanotubes de carbone, atteignaient la maturité bien plus rapidement que la normale. « Les nanotubes de carbone facilitent la croissance complète des neurones et la formation de nouvelles synapses. Avoir établi que cette interaction est stable et efficace, est un élément d’une importance fondamentale », explique Ballerini.
À présent, les scientifiques devront encore aborder plusieurs aspects importants, notamment concernant la mise en place et l’intégration des nanotubes de carbone, et découvrir avec exactitude la manière donc cela influencera la création et la structure des voies neuronales. « Si, par exemple, le simple contact [avec les nanotubes de carbone] provoquait une augmentation vertigineuse du nombre de synapses, ces matériaux seraient essentiellement inutilisables », a expliqué Maurizio Prato, un autre membre de l’équipe de recherche.
Mais les chercheurs restent confiants concernant l’utilisation des nanotubes de carbone en toute sécurité en tant que prothèses neuronales, et poursuivent désormais avec la prochaine étape de la recherche : les essais techniques. « Nous prouvons que les nanotubes de carbone fonctionnent de manière excellente en termes de durée, d’adaptabilité et de compatibilité mécanique avec le tissu. Maintenant nous savons que leur interaction avec le matériel biologique est aussi efficace. Sur la base de cette preuve, nous étudions déjà l’application in vivo, et les résultats préliminaires semblent être très prometteurs, également en termes de récupération des fonctions neurologiques perdues », ont expliqué les chercheurs.
L’étude a été publiée dans Nanomedicine : Nanotechnoloy, Biology and Medecine