Dans une étude récemment publiée dans la revue Nature Photonics, des chercheurs avancent être parvenus à manipuler la trajectoire et la vitesse de la lumière à l’intérieur même d’un matériau, par le biais d’une structure cristalline en silicium spécialement conçue. Cette innovation pourrait avoir des applications dans les dispositifs photoniques tels que les lasers, la fibre optique et les écrans LED.
Composés d’une unique couche d’atomes, les matériaux bidimensionnels sont extrêmement fins et possèdent des propriétés électriques spécifiques. Parmi eux, le graphène se distingue par sa conductivité très élevée, permettant aux électrons de se déplacer très librement sur sa surface.
Cependant, l’application d’un champ magnétique au matériau modifie radicalement le mouvement des électrons, engendrant des niveaux d’énergie spécifiques appelés « niveaux de Landau ». Ces niveaux peuvent également être induits par des déformations physiques du matériau, telles que l’étirement. En étirant le graphène, les interactions entre les électrons sont modifiées, influençant les liaisons et les distances entre les atomes de carbone (composants du graphène), réduisant ainsi la conductivité du matériau.
S’inspirant de cet effet de déformation dans les matériaux bidimensionnels, des scientifiques ont cherché à reproduire un phénomène similaire non pas avec les électrons, mais avec les photons (particules de lumière). « Nous nous sommes inspirés du comportement des électrons dans les matériaux », affirme l’un des chercheurs dans un communiqué. Dans son étude, l’équipe montre être ainsi parvenue à manipuler de manière ciblée le déplacement de la lumière à l’intérieur d’un matériau, permettant le contrôle d’un faisceau lumineux au niveau microscopique.
Manipuler la lumière dans un cristal photonique
Pour atteindre leurs objectifs, les chercheurs, de l’Université de Delft aux Pays-Bas, en collaboration avec le centre de recherche néerlandais AMOLF, ont développé un cristal photonique. Ce matériau bidimensionnel est doté d’une structure composée de trous réguliers percés dans une couche de silicium, ce qui permet à la lumière de circuler aussi librement que les électrons dans le graphène. En apportant des modifications spécifiques à cette structure, l’équipe est parvenue à contrôler le mouvement des photons.
Au cours de diverses expériences, les chercheurs ont induit des déformations du matériau permettant de « manipuler » précisément la lumière pour obtenir des comportements spécifiques. Par exemple, ils ont pu bloquer ou rediriger la lumière à travers le matériau en utilisant uniquement ces déformations structurelles. Ils ont également créé des zones au sein du matériau dans lesquelles la lumière pouvait circuler librement ou être confinée, démontrant ainsi la précision de leur méthode de manipulation.
Des applications dans les technologies photoniques
Cette percée montre une capacité de ralentir ou même d’arrêter un faisceau lumineux au sein d’un matériau. Cela devrait conduire à des avancées majeures dans les technologies photoniques. Par exemple, il serait possible d’améliorer considérablement l’efficacité et la précision des lasers, ce qui serait particulièrement bénéfique dans le domaine médical.
D’autres technologies, telles que celles à la base des écrans LED, la fibre optique et les capteurs optiques pourraient également tirer avantage de cette innovation. Cependant, avant de concrétiser ces applications, les chercheurs doivent approfondir leur compréhension du comportement de manipulation. Selon eux, des recherches supplémentaires sont en effet nécessaires pour pleinement exploiter le potentiel de cette découverte.