Une étude révèle que peindre les toits en blanc ou les recouvrir d’un revêtement réfléchissant est plus efficace pour évacuer la chaleur des grandes villes que les toits végétalisés, les jardins urbains ou les panneaux solaires. Des modélisations ont montré que ces toits rafraîchissants font baisser la température extérieure de 1,2 °C en moyenne et jusqu’à 2 °C dans certaines zones. Ces résultats suggèrent une option d’adaptation climatique pour les villes relativement simple et peu coûteuse.
Avec le réchauffement climatique, les grandes villes sont particulièrement vulnérables aux températures élevées en raison de leur propension à accumuler la chaleur. Cela donne lieu à un effet dit « d’îlot de chaleur », qui peut à la fois entraver le confort des citadins et provoquer une mortalité élevée pendant les pics de chaleur estivale.
En conséquence, les plans d’urbanisation modernes se concentrent actuellement sur les moyens d’atténuer les îlots de chaleur. Parmi les stratégies proposées figure l’augmentation de la couverture végétale dans les zones urbaines (au niveau des toits, des murs des bâtiments et du sol). Cette technique permet à la fois de réduire les températures à l’intérieur et à l’extérieur des bâtiments tout en contribuant à améliorer la qualité de l’air. Cette stratégie est par exemple appliquée depuis plus de deux décennies dans des grandes villes comme Tokyo ou Singapour et commence à être popularisée dans les villes européennes, dont Paris et Amsterdam.
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Les panneaux solaires peuvent également être utilisés à la fois en tant que source d’énergie électrique et comme surfaces réfléchissantes pour atténuer la chaleur. Ils peuvent réduire la température de l’air extérieur en augmentant l’albédo (la capacité d’une surface à envoyer le rayonnement solaire vers l’espace) des toits. Se basant sur la même stratégie, des toits construits avec des matériaux hautement réfléchissants (appelés « toits frais ») sont également proposés.
Cependant, ces stratégies ne sont pas toujours suffisantes pour atténuer la chaleur et la climatisation reste ainsi essentielle pour protéger les citadins, surtout dans les villes au climat désertique comme Phoenix et Las Vegas (aux États-Unis). Or, pour rafraîchir l’intérieur des bâtiments, la climatisation évacue la chaleur vers l’extérieur, ce qui accentue davantage les îlots de chaleur.
D’un autre côté, bien que leur efficacité ait été évaluée dans plusieurs villes à travers le monde, peu d’études ont été effectuées pour comparer les différentes stratégies d’atténuation proposées. En outre, l’analyse des impacts de chaque intervention à l’échelle d’une ville spécifique est généralement entravée par le manque de données géographiques. Cela implique qu’il est souvent difficile de fournir une estimation précise des impacts potentiels que les interventions pourraient avoir à l’échelle d’une ville.
La nouvelle étude, menée par une équipe de l’University College de Londres (UCL), est l’une des premières à inclure une modélisation climatique urbaine évaluant les effets de différents systèmes de gestion de la chaleur, notamment les « toits frais » peints en blanc, les panneaux solaires sur les toits, les toits verts, la végétation arborée au niveau du sol et la climatisation.
Jusqu’à 2 °C de réduction des températures extérieures
La nouvelle simulation est basée sur un modèle climatique tridimensionnel de Londres pendant les deux jours d’été les plus chauds que la ville ait connus (en 2018). Les températures avaient culminé à 35,6 °C. L’objectif était d’évaluer l’impact des différentes stratégies d’adaptation climatique sur la température extérieure.
D’autre part, « comme nous nous attendons à ce que certaines de ces stratégies ne soient pas applicables à tous les bâtiments, nous fournissons des scénarios réalisables pour comparer le maximum hypothétique avec une mise en œuvre plus réalisable », ont expliqué les chercheurs dans leur étude, détaillée dans la revue Geophysical Research Letters.
Les scientifiques ont constaté que les toits frais ont surpassé toutes les interventions en abaissant les températures extérieures de la ville de 1,2 °C en moyenne. Certaines zones étaient même de 2 °C plus fraîches. « Nous avons testé de manière approfondie plusieurs méthodes que des villes comme Londres pourraient utiliser pour s’adapter et atténuer le réchauffement climatique, et nous avons découvert que les toits rafraîchissants étaient le meilleur moyen de maintenir les températures basses pendant les journées d’été extrêmement chaudes », indique dans un communiqué de l’UCL Oscar Brousse, auteur principal de l’étude.
En comparaison, la végétalisation urbaine ne réduisait les températures que d’environ 0,3 °C. Toutefois, bien que les effets pendant la journée soient négligeables, la transformation des espaces verts urbains en espaces verts arborés à feuilles caduques permettrait de refroidir les températures pendant la nuit. Cependant, cela pourrait aussi augmenter la quantité de vapeur d’eau dans l’air, ce qui pourrait induire un effet inverse. En outre, cette stratégie offre d’autres avantages tels que le drainage de l’eau de pluie et l’augmentation de la biodiversité et du bien-être urbain. Les panneaux solaires, quant à eux, arrivent en deuxième position, abaissant les températures urbaines de 0,5 °C tout en offrant un avantage énergétique.
En revanche, bien que la climatisation améliore le confort des résidents à l’intérieur des bâtiments, ils contribuent à une augmentation des températures externes de 0,15 °C en moyenne et jusqu’à 1 °C dans certaines des zones les plus denses de la ville. Ce réchauffement pourrait être légèrement atténué si les climatisations étaient alimentées par l’énergie solaire.
Bien que l’étude ne se base que sur deux jours de données de simulation, les résultats concordent avec ceux de précédents travaux concernant le potentiel des toits rafraîchissants. D’autre part, ces derniers sont relativement faciles et peu coûteux à déployer en comparaison des autres stratégies. Les experts espèrent que leur étude comparative pourra éclairer les prises de décisions futures pour rendre les villes plus résilientes face au réchauffement climatique.