Un nouvel élément (120), l’Unbinilium, pourrait bientôt figurer dans le tableau périodique des éléments

Comportant 120 protons, il deviendrait ainsi l’élément le plus lourd à ce jour.

Bientôt un élément 120 figurera dans le tableau périodique des éléments selon les scientifiques
| Marilyn Sargent/Berkeley Lab
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Des chercheurs sont récemment parvenus à produire l’élément 116, baptisé Livermorium, en utilisant un procédé impliquant le titane 50. Pour cela, ils ont créé un faisceau d’atomes de titane chargés qu’ils ont ensuite précipité sur une cible de plutonium afin de l’introduire dans un accélérateur de particules. Cette expérience constitue un grand pas vers l’insaisissable « îlot de stabilité » et la synthèse potentielle de l’élément 120, l’Unbinilium. Ce nouvel atome, comportant 120 protons, deviendrait ainsi l’élément le plus lourd.

Dans le tableau périodique des éléments, à partir du numéro atomique 104, se trouve la région des éléments dits « super-lourds ». Le plus lourd jamais créé jusqu’à présent est l’oganesson, synthétisé pour la première fois en 2002. Ces poids lourds des éléments, qui n’ont jamais été observés dans la nature, ont en commun un noyau comptant un nombre de protons et de neutrons supérieur à 103 (soit plus de 206 nucléons). Plus le noyau atomique est lourd, plus un élément est instable et désintègre facilement (et rapidement).

Hiromitsu Haba, qui dirige le groupe de recherche sur les éléments super-lourds au Centre RIKEN Nishima au Japon, a déclaré : « La recherche des éléments super-lourds au-delà de 118, l’Oganesson, s’avère être un défi de taille ». Alors qu’Haba et son équipe du RIKEN se concentraient à produire l’élément 119, des chercheurs du laboratoire américain Lawrence-Berkeley (LBNL) attirent davantage l’attention de la communauté scientifique.

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Depuis la fin des années 1950, qui a marqué le début de la compétition pour la découverte de nouveaux éléments, les scientifiques du LBNL ont découvert 16 des 118 éléments connus à ce jour. Parmi les premiers éléments super-lourds synthétisés par le cyclotron du laboratoire LBNL, il y a le rutherfordium (l’élément a été nommé d’après le physicien Ernest Rutherford). Aujourd’hui encore, dans cette course à la synthèse d’éléments plus lourds, des chercheurs du LBNL ont réalisé un nouvel exploit en produisant l’élément 116. D’après Haba, il s’agit d’une réalisation « révolutionnaire », puisqu’elle pourrait mener à l’élément 120.

Une chance sur mille milliards

Les chercheurs qui parviennent à synthétiser des éléments lourds peuvent les nommer avant qu’ils ne soient intégrés dans le tableau périodique. Cependant, ce n’est pas la seule raison qui les motive. Il y a aussi l’îlot de stabilité, la région hypothétique du tableau périodique où sont répertoriés de nouveaux éléments super-lourds qui pourraient « survivre » plus longtemps. Jusqu’à présents, les abords de cet îlot de stabilité n’ont jamais été atteints, étant donné que pour cela, il faut surmonter la répulsion électrostatique entre deux noyaux chargés positivement et les forcer à fusionner. Dans ce cas, comment les chercheurs du LBNL ont-ils procédé pour produire le Livermorium ?

« Nous avons été choqués, très surpris et très soulagés de constater que nous n’avions pas fait de mauvais choix dans la mise en place des instruments », affirme dans un communiqué Jacklyn Gates, responsable du groupe « éléments lourd » du laboratoire. Elle a déclaré qu’il n’y avait qu’une chance sur mille milliards pour que leur découverte soit le fruit du hasard. L’équipe a dévoilé les détails de son expérience lors de la réunion Nuclear Structure 2024 à Lemont, dans l’Illinois.

Selon Gates, la clé de leur réussite réside dans l’implication du titane 50 (un isotope rare qui ne représente que 5 % de tout le titane sur Terre). L’équipe a vaporisé du titane 50 dans un four spécial à une température de 1 650 °C avant de canaliser la vapeur résultante en un faisceau à haute énergie. Le faisceau a ensuite été introduit dans un accélérateur de particules : le cyclotron. Cet appareil génère un champ électromagnétique qui contraint les noyaux atomiques à se débarrasser de certains électrons. Ensuite, le cyclotron pousse ces noyaux atomiques à se précipiter à grande vitesse vers d’autres atomes stationnaires.

Dans l’expérience visant à créer l’élément 116, l’utilisation du cyclotron a permis aux chercheurs de faire atteindre une vitesse d’environ 30 millions de mètres par seconde (10 % de la vitesse de la lumière) aux atomes de titane, qui ont par la suite percuté du plutonium. Après 22 jours d’opérations avec l’accélérateur d’ions lourds du laboratoire, les scientifiques ont décelé la signature de deux atomes de Livermorium. Bien entendu, ces deux atomes se sont désintégrés rapidement.

Même si l’expérience du LBNL a été hasardeuse, le prochain objectif ambitieux avec la fusion du titane 50 est la création de l’élément 120. En revanche, cela nécessitera des collisions avec du californium. « Il faut faire le travail de base et se frayer un chemin jusqu’à l’élément 120 », estime le professeur Michael Thoennessen de l’Université d’État du Michigan.

De son côté, Jennifer Pore, chercheur du groupe éléments lourds du Berkeley Lab, a déclaré : « Lorsque nous essayons de fabriquer ces éléments incroyablement rares, nous nous trouvons à la limite absolue des connaissances et de la compréhension humaines, et rien ne garantit que la physique fonctionnera comme nous l’espérons. La création de l’élément 116 avec du titane valide que cette méthode de production fonctionne et nous pouvons maintenant planifier notre chasse à l’élément 120 ».

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