En effectuant des fouilles dans la cité antique de Kafr El-Sheikh (l’actuel Tell el-Faraeen), des égyptologues ont mis au jour un gigantesque observatoire astronomique datant du 4e siècle avant notre ère. S’étendant sur plus de 850 mètres carrés, il s’agit du plus grand et du plus ancien de son genre dans la région. Il aurait servi à marquer des événements religieux, politiques et agricoles avec une impressionnante précision pour l’époque.
L’Égypte antique possède une histoire astronomique extrêmement riche. L’étude des objets célestes était omniprésente dans la culture de la civilisation. Son calendrier astronomique était utilisé non seulement pour marquer l’écoulement du temps, mais également pour déterminer les dates des rituels religieux et politiques, tels que l’exécution des offrandes et les couronnements. Il était également utilisé en tant que calendrier agricole et de navigation, permettant notamment de suivre les crues saisonnières du Nil.
La civilisation égyptienne est d’ailleurs à l’origine du calendrier de 365 jours et de l’établissement de la durée d’une journée (24 heures). Elle a intégralement cartographié le ciel nocturne et possédait ses propres constellations et signes zodiacaux. L’observatoire récemment découvert par l’équipe d’archéologie du ministère du tourisme et des antiquités local, souligne la richesse de ces héritages millénaires. Selon Mohamed Ismail Khaled, secrétaire général du Conseil suprême des antiquités d’Égypte, il s’agit d’une étape importante qui « confirme l’ingéniosité et l’habileté des anciens Égyptiens en astronomie depuis les temps anciens »,
Un gigantesque complexe astronomique de 850 m2
Le nouvel observatoire a été découvert sur le vaste site archéologique du temple de Bouto, à environ 80 kilomètres à l’est de la ville d’Alexandrie. Il s’agit d’une déesse égyptienne anthropomorphe (représentée sous la forme d’un cobra dressé) également connue sous le nom de « Ouadjet » et considérée comme la protectrice de la Basse-Égypte et de la fertilité des sols et des eaux.
Construit en terre crue, l’édifice s’étend sur plus de 850 mètres carrés, ce qui en fait le plus grand et le plus ancien observatoire du 4e siècle avant notre ère. Sa structure et les différents outils trouvés à l’intérieur indiquent de manière fiable qu’il a été utilisé pour observer et enregistrer les mouvements du Soleil et des étoiles. Bien que de conception relativement rudimentaire, ces outils offraient un calendrier solaire étonnamment précis lié aux rites religieux, aux couronnements des pharaons et à l’agriculture.
Le complexe astronomique comprend une entrée orientée vers l’est pour observer les levers de Soleil, un espace central ouvert en forme de « L » soutenu par des colonnes et un haut mur en briques de terre incliné vers l’intérieur. Selon le ministère, cette structure correspond au style habituellement utilisé pour les entrées des temples, soulignant son importance religieuse.
L’élément le plus remarquable de l’observatoire est un grand cadran solaire incliné, indiquant l’heure en fonction de la position du Soleil. Il comprend une rangée de dalles en calcaire de plus 4,8 mètres surmontées de 5 blocs de calcaire plats, dont 3 disposés à la verticale et deux à l’horizontale. Ces derniers présentent des traces de lignes gravées marquant l’ombre projetée par l’inclinaison du Soleil, indiquant ainsi les heures de la journée.
L’équipe a également mis au jour un grand bloc de pierre dans une pièce circulaire. Ce bloc est jouxté par une dalle centrale surmontée de deux autres blocs, l’un disposé du côté nord et l’autre du côté ouest. Cette disposition suggère qu’ils étaient utilisés pour suivre les levers et les couchers de soleil. Une série de cinq autres petites salles servaient probablement à stocker d’autres outils de mesure.
Une subtile combinaison de science et de religion
L’observatoire comprenait en outre une autre grande salle ayant probablement servi de tour d’observation. Elle comporte des inscriptions indiquant les levers et les couchers de soleil pendant les trois saisons de l’Égypte antique, ainsi que d’autres mesures du temps. Elle est également ornée de différentes représentations religieuses liées au ciel, peintes sur trois murs enduits d’un mortier jaunâtre.
Parmi ces représentations figure par exemple un bateau de rituel doté de huit niches et de deux rames à l’arrière. À l’avant du bateau sont représentés la tête d’Horus et l’œil d’Oudjat, des symboles à la fois liés au cosmos et au culte de la déesse. D’autre part, Horus est le fils d’Ouadjet. Son œil droit symbolise soit le Soleil, soit « l’étoile du matin » (Vénus), tandis que son œil gauche représente la Lune ou « l’étoile du soir » (Vénus dans sa phase de coucher).
D’autres objets religieux ont été mis au jour, incluant des statues d’Osiris, de Némès et de Ptah, des poteries, des tables d’offrandes et des bijoux. Ces objets et représentations soulignent une subtile combinaison de science et de religion, des pratiques probablement très importantes à une époque extrêmement instable de l’histoire de l’Égypte ancienne. En effet, le temple de Bouto a été exploité au cours d’une période de transition majeure où plusieurs puissances étrangères commençaient à prendre le contrôle de l’empire.