Des chercheurs ont développé une structure de type quasi-cristal générant des mini-vortex de lumière pouvant transporter d’énormes quantités de données. Elle est composée de nanoparticules métalliques très précisément agencées pour générer n’importe quel type de vortex — en interagissant avec un faisceau de lumière contenu dans un champ électrique. En étant appliquée aux fibres optiques, la structure pourrait transporter 8 à 16 fois plus d’informations que les systèmes actuels.
La transmission d’informations à l’ère numérique repose en grande partie sur l’encodage de données photoniques. Les fibres optiques sont actuellement les infrastructures les plus utilisées à cet effet. Cependant, la demande croissante en matière de capacité d’information exige le développement de systèmes pouvant encoder et transporter de plus grands volumes de données.
Les vortex de lumière sont depuis quelques années explorés afin d’optimiser le transport photonique d’informations. Ces vortex visent à manipuler les défauts topologiques de la lumière de sorte à contrôler la manière dont elle est réfléchie et les informations qu’elle véhicule. Alors que certains défauts topologiques se forment spontanément et sont omniprésents dans la nature, d’autres peuvent provenir de la symétrie dans la structure des matériaux avec lesquels la lumière interagit. Cela affecte la forme et la structure du vortex résultant.
Par exemple, les matériaux dont la structure est agencée en carrés (ou en pavé) génèrent des vortex simples, tandis que les motifs hexagonaux génèrent un double tourbillon et ainsi de suite. Les tourbillons plus complexes nécessitent au moins des structures octogonales. Cependant, la génération de vortex suffisamment complexes pour l’encodage de données constitue un défi de taille.
La nouvelle conception de l’équipe de l’Université Aalto (en Finlande) surmonte ces défis et pourrait générer n’importe quel type de vortex. « Cette recherche porte sur la relation entre la symétrie et la rotationnalité du vortex, c’est-à-dire quels types de vortex peuvent être générés avec quels types de symétries. Notre conception de quasi-cristal est à mi-chemin entre l’ordre et le chaos », explique dans un communiqué Päivi Törmä, qui a dirigé l’étude, publiée dans la revue Nature Communications.
Vers des infrastructures de télécommunication nouvelle génération
La conception est un quasi-cristal composé de nanoparticules métalliques. À l’instar des cristaux classiques, les quasi-cristaux ont un spectre de diffraction discret, mais contrairement aux premiers, leur structure n’est pas périodique. Pour créer leur quasi-cristal, les chercheurs ont manipulé 100 000 nanoparticules métalliques dont le diamètre n’excède pas un centième d’un cheveu humain. L’ensemble interagit avec un faisceau de lumière dans un champ électrique contrôlé.
La structure du vortex de lumière généré est comparable à un cyclone. Il possède un « œil » calme et sombre au centre qui est entouré d’un anneau de lumière vive composé de flux orientés dans différentes directions. Afin d’identifier l’agencement optimal permettant de générer les vortex complexes, l’équipe a adopté une approche contre-intuitive consistant à identifier les points au niveau desquels les particules interagissent le moins avec le champ électrique.
« Un champ électrique présente des points chauds de fortes vibrations et des points où il est pratiquement inactif. Nous avons introduit des particules dans les points morts, ce qui a désactivé tout le reste et nous a permis de sélectionner le champ présentant les propriétés les plus intéressantes pour les applications », explique Jani Matti Taskinen, coauteur principal de l’étude.
Cette technique permettrait ainsi d’ajuster les motifs de sorte à générer des structures de vortex complexes en fonction des besoins. « Notre conception de quasi-cristaux utilise la théorie des groupes pour déterminer les nœuds de champ électromagnétique, où les nanoparticules plasmoniques sont positionnées pour maximiser le gain », écrivent les experts dans le document. La théorie des groupes est une méthode de calcul permettant de prédire le type de déformation que pourrait subir la structure d’un matériau.
Ces vortex complexes permettraient de stocker de grands volumes d’information dans un espace restreint. Ils pourraient être transportés à travers des fibres optiques, puis décompressés une fois arrivés à destination. Selon les estimations de l’équipe, ces fibres permettraient, dans le meilleur des cas, de transporter 8 à 16 fois plus d’informations que celles actuelles.
Cette approche pourrait ouvrir la voie à une nouvelle génération d’infrastructures de télécommunication. Toutefois, les améliorations nécessaires au concept pour des applications pratiques demanderont encore plusieurs années de recherche, ont précisé les scientifiques.