Découverte d’une nouvelle espèce d’hominidé dans le nord-est de la Chine

Une communauté de chasseurs habiles et organisés d’il y a 300 000 ans.

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| Pixabay
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En effectuant des fouilles dans le nord-est de la Chine, des chercheurs ont découvert une nouvelle espèce d’hominidé qui aurait vécu dans la région il y a environ 300 000 ans. Baptisée Homo juluensis, il s’agirait d’une petite communauté de chasseurs qui a disparu après l’arrivée des humains modernes depuis l’Afrique. Cette lignée inclurait potentiellement les énigmatiques Dénisoviens et contribue à une organisation plus précise de l’arbre généalogique complexe et exceptionnellement diversifié des hominidés en Asie.

Contrairement à d’autres périodes paléoanthropologiques, le Quaternaire tardif, une période s’étendant entre la fin du Pléistocène moyen et le début du Pléistocène tardif (il y a entre 300 000 et 50 000 ans avant notre ère), n’a commencé à être étudié de manière approfondie que récemment. Alors qu’on pensait initialement que les homininés (la branche des hominidés incluant les chimpanzés, les bonobos et le genre Homo) comprenaient trois principales espèces — notamment Homo erectusHomo neanderthalensis ou Homo sapiens —, des études récentes ont mis en évidence une importante diversité morphologique chez les fossiles du Quaternaire tardif en Asie de l’Est.

Au cours des dernières années, un certain nombre de nouveaux taxons d’homininés d’Asie de l’Est ont été proposés, dont l’Homo floresiensis de l’île de Flores en Indonésie, l’Homo luzonensis de l’île de Luzon aux Philippines et l’Homo longi de Harbin en Chine. Cela suggère non seulement que le registre des hominidés est plus étendu qu’on le pensait, mais indique également un degré de complexité longtemps sous-estimé.

Des chercheurs estiment que cette étonnante diversité résulte probablement d’une combinaison de dispersions et d’introgressions (transfert de gènes d’une espèce vers une autre génétiquement proche pour qu’une interfécondation puisse avoir lieu) se produisant tout au long du Quaternaire tardif, plutôt que d’un événement unique de dispersion et remplacement, tel que précédemment suggéré.

La nouvelle espèce, découverte par des chercheurs de l’Université d’Hawaï à Manoa et de l’Académie chinoise des sciences, corrobore ces hypothèses et contribuerait à dissiper au moins une partie de la confusion concernant les différentes espèces d’hominidés qui vivaient en Asie de l’Est à l’époque. « Cette étude clarifie un registre fossile d’hominidés qui tend à inclure tout ce qui ne peut pas être facilement attribué à Homo erectus, Homo neanderthalensis ou Homo sapiens », explique dans un communiqué de l’Université d’Hawaï, Christopher J. Bae, auteur principal de l’étude, détaillée dans la revue Nature Communications.

Une petite communauté de chasseurs disparue il y a 50 000 ans

Les fossiles d’Homo juluensis ont été découverts pour la première fois dans les années 1970 dans le site de Xujiayao, situé à la frontière entre les provinces du Shanxi et du Hebei, dans le nord-est de la Chine. Les chercheurs ont exhumé de nombreux fragments d’os appartenant à 16 individus différents, ainsi que des milliers d’outils en pierre et en os d’animaux indiquant un site d’abattage de chevaux. Selon l’équipe, il s’agissait probablement d’une communauté de chasseurs habiles et organisés chassant les chevaux sauvages en groupe. Les outils suggèrent qu’ils excellaient en dépeçage de la viande et consommaient même la moelle et le cartilage.

Ils fabriquaient également des vêtements en peau d’animaux, ce qui concorde avec les hivers rigoureux caractérisant le nord de la Chine. Ces anciens chasseurs auraient également vécu en groupes relativement réduits, ce qui les exposait à un risque de disparition plus élevé, en étant par exemple fréquemment piégés par les tempêtes de neige.

« C’est en partie pour cette raison que la densité de population d’Homo juluensis n’a probablement jamais été aussi élevée que lorsque les humains modernes ont quitté l’Afrique en plus grand nombre. Ils ont génétiquement submergé les populations indigènes comme les Neandertalensis et les Juluensis », suggère Bae au South China Morning Post. En effet, les analyses de l’équipe ont montré que les gènes d’Homo juluensis ont commencé à disparaître progressivement lorsque les premiers humains modernes sont arrivés en Chine depuis l’Afrique, il y a environ 120 000 ans. Ils ont fini par complètement disparaître il y a environ 50 000 ans.

homo juluensis
Nouvelle organisation des fossiles d’hominidés d’Asie de l’Est proposée par la nouvelle étude après la découverte de nouvelles espèces. © Bae et al.

Une lignée incluant les Dénisoviens ?

Les Homo juluensis avaient une tête étonnamment volumineuse avec un crâne large et affaissé pouvant abriter des dents relativement grandes. Le volume de leur crâne était compris entre 700 et 1 800 centimètres cubes, contre 1 450 et 1 350 centimètres cubes pour les Néandertaliens et Homo sapiens, respectivement. En comparant leurs dents avec celles des Dénosiviens, les chercheurs ont relevé de fortes similitudes suggérant que ces derniers pourraient être inclus parmi les Homo juluensis en tant que sous-groupe. Plus précisément, la morphologie de leur surface occlusale des molaires serait quasiment similaire.

Toutefois, les chercheurs proposent que cette hypothèse puisse être sujette à débat parce que de nombreux experts (surtout Occidentaux, selon eux) estiment que les fossiles d’hominidés chinois devraient être inclus parmi les Dénisoviens et non l’inverse. Néanmoins, Bae et son collègue estiment que les Dénosiviens désignent une population générale et non une espèce et devraient ainsi, si possible, être inclus au sein d’une espèce. « D’après les dents et l’analyse de la datation, nous pensons que Denisova appartient très probablement à Homo juluensis en raison de leurs similitudes », affirme Bae.

Davantage de recherches et de collaborations entre paléoanthropologues sont nécessaires pour trancher la question. « Bien que nous ayons commencé ce projet il y a plusieurs années, nous ne nous attendions pas à pouvoir proposer une nouvelle espèce d’hominidés et ensuite à pouvoir organiser les fossiles d’hominidés d’Asie en différents groupes. En fin de compte, cela devrait aider à la communication scientifique », conclut Bae.

Source : Nature Communications

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