Les observations réalisées par les télescopes spatiaux ont permis aux scientifiques de mieux comprendre les géants cosmiques que sont les trous noirs. Récemment, une équipe d’astronomes de la NASA a réalisé une découverte fascinante concernant l’une des galaxies les plus mystérieuses : Centaurus A. En utilisant l’observatoire à rayons X Chandra, les chercheurs ont observé l’interaction spectaculaire entre les gigantesques jets de plasma émis par le trou noir supermassif en son centre et un objet non identifié. Les données recueillies pourraient permettre d’améliorer notre compréhension de l’évolution des galaxies.
Située dans la constellation du Centaure, à environ 12 millions d’années-lumière de la Terre, Centaurus A (NGC 5128) est l’une des galaxies les plus énigmatiques connues. Elle intrigue les scientifiques par sa structure hybride : une large bande sombre de poussières et de gaz semble témoigner de la collision ancienne entre une galaxie elliptique géante et une galaxie spirale de plus petite taille. Ce mélange confère à Centaurus A un aspect unique, combinant les caractéristiques typiques d’une galaxie elliptique massive et d’une galaxie spirale.
Au cœur de cette galaxie réside un trou noir supermassif dont la masse est estimée à 55 millions de fois celle du Soleil. Celui-ci éjecte des particules et de matière à des vitesses proches de celle de la lumière, formant des jets de plasma qui s’étendent sur de vastes distances. Ces émissions, visibles dans les longueurs d’onde radio, fascinent les chercheurs depuis des décennies. En étudiant Centaurus A avec les instruments de Chandra, les astronomes ont récemment mis en évidence une région en forme de « V », dont les bras font chacun environ 700 années-lumière. Ces deux branches convergent vers une source lumineuse de rayons X désignée sous le nom de C4.
Selon les scientifiques, C4, situé sur le trajet des jets du trou noir, a provoqué une onde de choc accompagnée d’émissions intenses de rayons X. « Si les chercheurs ont une hypothèse sur les phénomènes en jeu, l’identité exacte de l’objet frappé demeure un mystère, car il est trop éloigné pour que ses détails soient visibles, même avec les télescopes les plus puissants », indique la NASA dans un communiqué.
Un phénomène hors du commun
Les trous noirs, en raison de leur gravité extrême, capturent la lumière et la matière dans leur voisinage immédiat, formant un disque d’accrétion en rotation. Cependant, une partie de cette matière est expulsée sous forme de jets colossaux qui s’étendent sur de vastes distances, comme le montrent les observations de Centaurus A. Bien que les scientifiques aient une compréhension globale de la formation de ces jets, la nature exacte de l’objet percuté par le jet reste incertaine.
Selon les résultats de l’étude, publiée dans The Astrophysical Journal et dirigée par le Dr David Bogensberger, astrophysicien à l’Université du Michigan, l’objet en question pourrait être une étoile massive. Cependant, les capacités des observatoires actuels ne permettent pas de discerner les détails de cet objet. Les émissions de rayons X associées à C4 se révèlent également atypiques.
Contrairement aux autres obstacles rencontrés par les jets, qui produisent généralement des taches elliptiques, C4 présente des caractéristiques inhabituelles. « Ces rayons X pourraient résulter d’une collision entre les particules du jet et un gaz soufflé par un vent en sens inverse à celui de l’étoile », avancent les chercheurs. Une telle interaction aurait engendré des turbulences, augmentant la densité du gaz dans le jet et provoquant ainsi ces émissions lumineuses.
La forme en V de cette structure intrigue également les astronomes. Sur le bras inférieur du V, les rayons X semblent s’aligner parallèlement au jet, à l’image d’un sillage laissé par un bateau remontant le courant. En revanche, le bras supérieur, plus évasé, s’écarte nettement de l’axe du jet. « Les astronomes cherchent à comprendre pourquoi C4 affiche cette asymétrie après la collision. Cela pourrait être lié à la nature de l’objet percuté ou à la manière dont l’interaction s’est produite », conclut la NASA.