Elon Musk nourrit depuis des années l’ambition de coloniser Mars. Mais avant d’envisager l’établissement d’une ville sur la planète rouge, plusieurs défis techniques majeurs restent à relever, dont le choix et le développement des matériaux de construction. Acheminer une simple brique à travers les 225 millions de kilomètres séparant la Terre de Mars coûterait environ deux millions de dollars. En d’autres termes, bâtir une cité martienne impliquerait des coûts astronomiques. Des chercheurs proposent toutefois une solution surprenante, invitant les colons à contribuer à la construction de leurs habitats avec leur propre sang.
Pour ces pionniers, transporter les matériaux nécessaires à la construction d’une ville martienne est inenvisageable. Le régolithe, cette poussière minérale omniprésente sur Mars, apparaît certes comme une ressource clé accessible sur place, mais ses propriétés mécaniques restent limitées.
D’une part, sa structure fine le rend moins résistant que le béton, et l’absence de liants naturels sur Mars complique encore la tâche. D’autre part, la faible pression atmosphérique martienne exposerait les structures en régolithe à de violentes variations de pression. À cela s’ajoutent des températures extrêmes et des radiations intenses, compliquant davantage le défi technique.
Un matériau innovant contenant du sang humain ?
Une piste singulière a émergé des travaux de chercheurs de l’Université Kharazmi, à Téhéran (en Iran). Ceux-ci ont étudié onze types de béton potentiellement exploitables en fonction des ressources disponibles sur Mars. Parmi eux, un substrat baptisé AstroCrete, conçu à partir de régolithe mélangé à des fluides corporels, a particulièrement retenu leur attention. Les autres options incluent le béton polymère et celui à base de soufre. « Bien que cela puisse sembler étrange, le sang pourrait servir à fabriquer un béton solide ou des briques pour la construction sur Mars », expliquent les chercheurs dans une étude publiée dans la revue Acta Astronautica.
AstroCrete n’est pas une idée nouvelle : en 2021, une équipe de l’Université de Manchester avait déjà proposé ce matériau atypique. Selon eux, une ressource inattendue — l’équipage lui-même — pourrait contribuer significativement à la construction martienne. Leur inspiration provenait de techniques romaines antiques. « Nous avons cherché à développer des matériaux semblables au béton pour Mars, mais nous n’avions jamais imaginé que la réponse était en nous depuis le début », avait alors déclaré le Dr Aled Roberts dans un communiqué.
Dans l’Antiquité, un mélange insolite de sang et d’urine conférait au béton une solidité remarquable. En reprenant cette idée, les chercheurs ont découvert que l’albumine sérique humaine — une protéine présente dans le plasma sanguin — pouvait servir de liant naturel. Associée aux particules de régolithe, elle permet de produire un matériau affichant une résistance à la compression de 25 mégapascals (Mpa). Plus étonnant encore, l’ajout d’autres fluides corporels comme l’urine, la sueur et les larmes augmenterait cette résistance jusqu’à 300 %, selon les résultats de l’étude.
Les chercheurs iraniens estiment qu’il faudrait environ 72 semaines pour collecter suffisamment de plasma sanguin pour produire l’AstroCrete nécessaire à la construction d’un habitat martien. Par ailleurs, l’impression 3D de ce matériau pourrait simplifier le processus. Enfin, ils évoquent l’usage potentiel du carbonate de calcium présent sur Mars pour créer un mortier de chaux, ouvrant de nouvelles perspectives de construction.