Le rover Curiosity a détecté les vestiges d’ondulations de vagues sur les rives d’anciens lacs martiens peu profonds, datant de 3,7 milliards d’années. Alors que certaines modélisations du passé climatique de Mars suggèrent que l’eau à sa surface était recouverte de glace durant cette période, ces nouvelles données montrent plutôt qu’elle était liquide et exposée à l’air libre. Cela indique aussi que l’eau liquide a probablement persisté plus longtemps à la surface de la planète que ce qui était initialement estimé.
Il y a des milliards d’années, Mars avait, à l’instar de la Terre, une atmosphère, une hydrosphère, une cryosphère et une lithosphère bien définies. L’atmosphère martienne était suffisamment chaude et épaisse pour que la planète dispose d’un large réseau hydrographique. Les astronomes estiment que la majeure partie de l’atmosphère et de l’hydrosphère de Mars a disparu en raison de la perte de son champ magnétique.
Les premières preuves visuelles du riche passé hydrographique de Mars ont été révélées dans les années 1970, lorsque la sonde Mariner 9 a photographié d’anciens canyons asséchés. Depuis, les preuves se sont multipliées, allant d’anciens lits de lacs et de rivières jusqu’à des océans profonds.
Cependant, un débat persiste concernant la période exacte de disparition de cette eau et sous quelle forme elle se présentait. Certains modèles paléoclimatiques suggèrent que l’atmosphère de Mars était suffisamment dense pour que l’eau à sa surface reste liquide relativement longtemps. En revanche, d’autres modèles suggèrent qu’il y avait effectivement de l’eau en abondance, mais recouverte d’une couche de glace lorsque le climat de la planète s’est rapidement refroidi.
« Bien qu’il existe des preuves géomorphiques de l’activité des eaux de surface sur Mars, les modèles climatiques manquent de consensus sur les conditions précises, le calendrier et la durée de l’eau de surface, en particulier si l’eau stagnante serait stable dans les conditions atmosphériques de la planète Mars primitive », indique la nouvelle étude, codirigée par le California Institute of Technology (Caltech).
En analysant de nouvelles données du rover Curiosity, l’étude met en évidence de nouvelles preuves géologiques suggérant que l’eau à la surface de Mars est restée liquide beaucoup plus longtemps qu’on le pensait et stagnait sous la forme de lacs et d’étangs peu profonds. « Le prolongement de la période de présence d’eau liquide accroît les possibilités d’habitabilité microbienne à une période plus tardive de l’histoire de Mars », explique dans un article de blog de Caltech Claire Mondro, auteure principale de la recherche – détaillée dans la revue Science Advances.
Des preuves fiables d’anciens lacs exempts de glace
Les formations géologiques analysées par Mondro et ses collègues ont été détectées par Curiosity dans le cratère Gale, une région que le rover explore depuis août 2012. Elles bordent deux anciens lits de lacs, dont l’un découvert au niveau de l’affleurement de Prow, une région autrefois recouverte de dunes, et l’autre à proximité de la bande rocheuse d’Amapari Marker.
Les structures prennent la forme de minuscules crêtes ou d’ondulations plus ou moins régulières. Sur Terre, ce type de structure se forme généralement au niveau des rives sous l’effet des vagues qui les frappent et les érodent régulièrement. « Les traces d’ondulations n’auraient pu se former que sous une eau ouverte à l’atmosphère et soumise à l’action du vent », explique Mondro.
Les experts recherchent ces caractéristiques depuis plus de deux décennies, les premières ayant été détectées en 2004 par la mission Opportunity. Cependant, on ne savait pas si l’eau à l’origine des formations s’était accumulée pour former des lacs ou des mers peu profondes ou si elle s’est juste écoulée. Des structures similaires ont également été relevées par Curiosity en 2014, mais les preuves fiables d’anciens lacs exempts de glace n’ont jusqu’à présent pas été détectées.
Les ondulations nouvellement détectées sont petites, mesurant environ 6 millimètres de haut et espacées de 4-5 centimètres. Cela suggère qu’elles ont été formées par de petites vagues. Des modélisations informatiques ont permis aux chercheurs de déduire que les lacs à partir desquels ces vagues se sont formées avaient une profondeur de moins de 2 mètres. Les données suggèrent en outre que les ondulations de la bande rocheuse d’Amapari Marker se sont formées un peu plus tard que celles de l’affleurement de Prow.
Par ailleurs, des analyses supplémentaires ont montré que les ondulations se sont formées il y a environ 3,7 milliards d’années, une période où l’on pensait initialement que l’atmosphère de la planète s’amincissait, la rendant progressivement plus froide et plus sèche. Finalement, ces résultats indiquent que le climat martien était encore suffisamment chaud et que son atmosphère était encore assez dense pour maintenir l’eau liquide à sa surface, ce qui remet en question certaines hypothèses précédentes.