Commotions cérébrales : la psilocybine aiderait le cerveau à se réparer

Le composé atténue les lésions et restaure la plasticité cérébrale.

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| Pixabay
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Une expérience sur des rats révèle que la psilocybine atténue les lésions et restaure la fonction et la plasticité cérébrales suite à des commotions légères et répétées — similaires à celles subies par les athlètes. Le composé a également réduit le taux de protéines tau phosphorylées se formant suite aux traumatismes crâniens. Ces données ouvrent la voie à une potentielle alternative thérapeutique à la fois pour les traumatismes crâniens et les maladies neurodégénératives telles qu’Alzheimer.

Souvent sous-estimées, les commotions cérébrales peuvent avoir des conséquences comportementales et neurobiologiques graves. Étant donné qu’elles ne provoquent généralement pas de saignement et ne présentent pas de lésions externes évidentes, elles peuvent être difficiles à détecter.

Elles peuvent aussi entraîner une inflammation cérébrale, une altération de la circulation sanguine, ainsi qu’une confusion et une désorientation temporaire. Toutefois, les conséquences comportementales et cognitives du traumatisme s’estompent généralement dans les heures qui suivent le choc initial.

Cependant, les commotions cérébrales à répétition peuvent engendrer des effets à long terme. Elles sont fréquemment observées chez les athlètes, les militaires et chez les victimes de violences domestiques. Les chocs répétés à la tête peuvent entraîner des déficits moteurs, cognitifs et comportementaux prolongés, pouvant persister plusieurs mois, voire plusieurs années. Des études ont également montré qu’ils sont associés à un risque accru de démence, de Parkinson et d’encéphalopathie traumatique chronique (ETC).

« Il n’y a pas de contusion ni de saignement au cerveau [pour les simples commotions] », écrit dans un article de blog Craig Ferris, professeur de psychologie à l’Université Northeastern. « Tout ce que vous voyez, c’est la bosse sur la tête due à l’œdème sur la peau. C’est tout à fait normal, mais si vous avez deux chocs ou plus, vous avez alors ces problèmes prolongés de neuroinflammation, de changements dans la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique et de modifications dans la connectivité », précise-t-il.

À ce jour, il n’existe aucun traitement approuvé pour les commotions répétées à la tête. Et bien qu’aucun rapport n’ait jusqu’à présent fait état de l’utilisation de la psilocybine pour traiter les traumatismes crâniens, des effets bénéfiques sur la neuroinflammation ont été rapportés. Dans le cadre d’une étude préliminaire prépubliée sur le serveur bioRxiv, Ferris et ses collègues mettent pour la première fois en évidence ses effets sur les lésions cérébrales.

Une augmentation de la connectivité cérébrale

L’équipe de Ferris suggère que la psilocybine pourrait être utilisée pour traiter les lésions cérébrales en raison de ses effets anti-inflammatoires et de sa capacité à favoriser la neuroplasticité et la croissance cellulaire. Des études antérieures ont également exploré le composé pour une utilisation thérapeutique potentielle dans différents troubles mentaux, notamment la dépression, l’anxiété et la toxicomanie.

Pour étayer leur hypothèse, les chercheurs ont sélectionné des modèles murins de commotions cérébrales répétées. Pour ce faire, des rats femelles âgés de 9 mois ont subi un choc par jour à la tête pendant trois jours consécutifs, sans anesthésie, afin de reproduire les conditions dans lesquelles les traumatismes se produisent chez les humains. Les chocs ont été effectués de sorte à ne pas provoquer de déchirure du crâne, de contusion ou de saignement.

Les animaux ont reçu une dose unique de 3 mg/kg de psilocybine après chaque choc, tandis que le groupe témoin n’a pas été traité. Des analyses de sang et des IRM ont été effectuées dans l’heure qui a suivi chaque choc afin d’observer les effets du traitement sur la structure et l’activité cérébrale. Les comportements cognitifs et moteurs des modèles ont été évalués à l’aide d’un test de marche sur poutre, ainsi que des tests Rotarod et Beam Walk, couramment utilisés chez les modèles de Parkinson pour évaluer l’équilibre et la fonction motrice.

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Protocole expérimental et évaluation comportementale a. Chronologie des procédures expérimentales. b. Comportement moteur lors des tests Beam Walk, Rotarod et Open Field. c. Comportement cognitif issu de la reconnaissance d’objets nouveaux et comportements émotionnels agoraphobie et thigmotaxis recueillis à partir du test Open Field. © Eric K. Brengel et al.

Les chercheurs ont constaté que les animaux traités présentaient une inflammation cérébrale significativement réduite par rapport à ceux non traités. Cet effet était particulièrement prononcé au niveau de certaines régions, telles que l’hippocampe, le cortex somatosensoriel, le cortex préfrontal, le thalamus, le cervelet, le système olfactif et les noyaux gris centraux. Une hyperréactivité réduite au CO₂ chez les animaux traités a également été observée.

Une augmentation remarquable de la connectivité cérébrale a aussi été notée chez les rats ayant reçu de la psilocybine. Alors que les rongeurs non traités présentaient une perte marquée de la connectivité neuronale au niveau du thalamus et du cortex sensimoteur, ceux ayant reçu le traitement retrouvaient une connectivité comparable à celle des animaux sains, voire supérieure dans certaines zones.

« Cela a vraiment eu des effets incroyables », affirme Ferris. « Nous avons découvert qu’en cas de traumatisme crânien, les connexions fonctionnelles dans le cerveau diminuent. Vous administrez de la psilocybine et non seulement tout revient à la normale, mais le cerveau devient hyperconnecté ».

Plus étonnant encore, la psilocybine a réduit la phosphorylation de la protéine tau, un phénomène couramment observé après des chocs traumatiques à la tête et fortement impliqué dans la maladie d’Alzheimer. La mise en évidence de cet effet laisse entrevoir un usage élargi du composé pour le traitement d’autres troubles neurodégénératifs. Si l’implication directe de la protéine tau phosphorylée dans Parkinson reste débattue, des recherches supplémentaires pourraient préciser le rôle potentiel de la psilocybine dans cette pathologie. Le composé pourrait aussi être envisagé comme traitement prophylactique.

Source : bioRxiv

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