Voie Lactée vs Andromède : la collision annoncée n’est plus si certaine

Ironiquement, la collision semble devenir moins probable à mesure que les données s’affinent…

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Cette image de NGC 520 offre un exemple de scénarios possibles de rencontre entre notre Voie lactée et la galaxie d'Andromède. | NASA, ESA, Hubble Heritage (STScI/AURA)-ESA/Hubble Collaboration et B. Whitmore (STScI)
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En effectuant 100 000 simulations informatiques avec de nouvelles données, des astronomes ont constaté qu’il n’y a que 50 % de probabilité que notre galaxie entre en collision avec celle d’Andromède dans les dix prochains milliards d’années. Ces résultats remettent en question la théorie de longue date selon laquelle la Voie Lactée entrera en collision avec sa plus grande voisine dans seulement 4,5 milliards d’années.

Les astronomes savaient dès 1912 que la gigantesque galaxie d’Andromède se dirigeait vers nous, laissant présager une collision avec notre galaxie dans un futur lointain. Environ un siècle plus tard, les données du télescope spatial Hubble ont permis de déterminer avec plus de précision ses mouvements et de constater qu’une collision frontale entre les deux galaxies semble presque certaine.

Cette rencontre galactique pourrait provoquer une augmentation des naissances d’étoiles, engendrer des supernovas et perturber les orbites stellaires, y compris celle du Soleil. Des simulations suggéraient même que cette collision serait quasi inévitable. En analysant des données d’observation de Hubble s’étendant sur cinq à sept ans, des astronomes ont conclu en 2012 que la fusion aura lieu dans environ 4,5 milliards d’années et donnera naissance à une nouvelle grande galaxie elliptique surnommée « Milkoméda » ou « Androway ».

« La collision imminente entre notre galaxie et Andromède est un résultat si célèbre qu’on le retrouve partout, des manuels scolaires aux ouvrages jeunesse », explique, dans un communiqué de l’Université d’Helsinki, Jehanne Delhomelle, de l’Université de Toulouse. Cependant, de nouvelles données remettent en question cette estimation, rendant notamment la collision moins probable que prévu.

Cette incertitude s’expliquerait par la complexité accrue des analyses et par le fait que davantage de données sont prises en compte dans les modélisations. Paradoxalement, le seul moyen de déterminer l’issue finale est de collecter encore davantage de données afin d’affiner les modélisations. « C’est l’une des beautés de la démarche scientifique, que même des résultats largement acceptés puissent toujours être remis en question, voire invalidés. Nous devons rester ouverts aux nouveaux résultats, même s’ils sont surprenants à première vue », indique Delhomelle.

Delhomelle et ses collègues des universités d’Helsinki et de Durham ont, dans cette perspective, introduit de nouvelles données de Hubble et du télescope spatial Gaia dans les simulations afin de déterminer l’évolution des deux galaxies au cours des dix prochains milliards d’années. Les résultats – récemment publiés dans la revue Nature Astronomy – indiquent une issue radicalement différente des précédentes estimations.

Cela ne signifie cependant pas que les calculs précédents étaient erronés, nuance Till Sawala, de l’Université d’Helsinki, autrice principale de l’étude. « En partant des mêmes hypothèses, nous avons obtenu les mêmes résultats. Nous avons simplement pu explorer un champ des possibles beaucoup plus vaste », précise-t-elle.

Seulement 2 % de probabilité de collision frontale dans 4,5 milliards d’années

L’équipe a effectué 100 000 simulations dites « de Monte Carlo » en prenant en compte 22 variables différentes qui pourraient affecter la collision potentielle entre la Voie Lactée et Andromède. Les modèles s’étendaient sur une période de dix milliards d’années dans le futur. Les chercheurs ont également pris en compte les effets de M33, la grande galaxie satellite d’Andromède, et du Grand Nuage de Magellan (LMC), une galaxie satellite de la Voie Lactée.

Résultat : la probabilité d’une collision frontale entre Andromède et la Voie Lactée n’est que d’environ 50 %, et la date la plus probable de la fusion se situerait entre sept et huit milliards d’années – soit bien plus tard que précédemment estimé. Des issues complètement différentes pourraient se produire en prenant en compte les mouvements de M33 et du LMC. Cette différence s’explique par le fait que les précédentes simulations se concentraient uniquement sur l’interaction entre la Voie Lactée, Andromède et la galaxie du Triangle.

Or, bien que le LMC ne fasse qu’environ 15 % de la masse de la Voie Lactée, son attraction gravitationnelle perturbe suffisamment le mouvement de notre galaxie pour réduire significativement le risque de fusion avec la galaxie d’Andromède. La masse supplémentaire de M33 attirerait un peu plus la Voie Lactée vers Andromède, mais le LMC exerce une force opposée en les éloignant.

« La Voie Lactée et Andromède resteraient seules dans le même plan alors qu’elles orbitent l’une autour de l’autre, mais cela ne signifie pas qu’elles doivent s’écraser. Elles pourraient toujours se croiser », indique Sawala dans un billet de blog de la NASA. « Cela ne signifie pas que le LMC nous sauvera de cette fusion, mais cela la rend un peu moins probable », précise-t-elle.

Dans la moitié des simulations, la Voie Lactée et Andromède se rapprochent d’environ un demi-million d’années-lumière de distance (voire moins) avant de s’éloigner à nouveau. Leurs moments orbitaux se dégradent ensuite progressivement en raison d’un processus de friction dynamique entre les halos de matière noire qui les entourent. Cela pourrait, à terme, finir par les fusionner.

Cependant, une grande partie des simulations indiquent également que les deux galaxies ne se rapprochent pas suffisamment pour que la friction dynamique soit efficace. Dans ce cas, elles continuent à orbiter l’une autour de l’autre quasiment sans perturbation pendant très longtemps. D’après les chercheurs, la probabilité d’une collision directe d’ici quatre à cinq milliards d’années, comme le suggéraient les précédentes simulations, n’est que de 2 %.

collision andromede scenario
Ces images de galaxies illustrent trois scénarios possibles de rencontre entre notre Voie lactée et la galaxie voisine d’Andromède. En haut à gauche : les galaxies M81 et M82. En haut à droite : NGC 6786, une paire de galaxies en interaction. En bas : NGC 520, deux galaxies en fusion. © NASA, ESA, STScI, DSS, Till Sawala (Université d’Helsinki) ; Traitement d’images : Joseph DePasquale (STScI)

Une incertitude bientôt révolue ?

L’incertitude quant à l’avenir de notre galaxie pourrait ne pas durer, car les chercheurs prévoient bientôt une nouvelle série de simulations avec des modèles physiques améliorés. Gaia fournira aussi prochainement des mesures plus précises de variables essentielles, dont les mouvements spécifiques d’Andromède.

Toutefois, étant donné que le Soleil deviendra une géante rouge et rendra la Terre inhabitable d’ici entre un et 1,5 milliard d’années, une collision avec Andromède n’aura aucun impact sur l’avenir de l’humanité. Néanmoins, « la fusion potentielle Voie Lactée-Andromède serait un événement rare et transformateur pour les deux galaxies, et sa modélisation est donc cruciale », estime Peter Johansson de l’Université d’Helsinki.

Vidéo de présentation de l’étude :

Source : Nature Astronomy
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