En utilisant la puissance combinée du télescope spatial James Webb (JWST) et du télescope spatial Hubble, des astronomes ont repéré un système extrêmement rare d’au moins cinq galaxies fusionnant, datant de seulement 800 millions d’années après le Big Bang. En plus d’être peu courantes, les fusions galactiques impliquent en effet généralement deux galaxies. La découverte de ce système aussi tôt dans l’Univers pourrait éclairer la manière dont les galaxies primordiales se sont formées.
Les fusions galactiques désignent le processus par lequel deux ou plusieurs galaxies se combinent pour n’en former qu’une seule. Cela se produit lorsque les galaxies, en se rapprochant, perturbent mutuellement leur moment angulaire, de sorte qu’il n’est plus suffisant pour les libérer de leur attraction gravitationnelle mutuelle.
Les fusions de galaxies se produisent généralement entre deux galaxies, et celles qui en impliquent davantage sont extrêmement rares, en particulier dans l’Univers primitif. « Si l’on considère l’ensemble des galaxies, 20 à 30 % d’entre elles seront en fusion. Il ne s’agira que de deux galaxies. La proportion de ces systèmes de fusion multiple sera bien plus faible, et nous n’avons pas encore de statistiques à ce sujet, mais certainement inférieure à 1 % », explique Christopher Conselice, professeur d’astronomie extragalactique à l’Université de Manchester, cité par Live Science.
L’équipe de l’Université Texas A\&M a repéré l’une de ces fusions galactiques multiples dans l’univers primitif. « Trouver un tel système avec cinq galaxies physiquement liées est exceptionnellement rare, tant dans les simulations actuelles que dans les observations », a déclaré au journal Weida Hu, auteure principale de l’étude et chercheuse postdoctorale à l’Université Texas A\&M.
« La probabilité de détecter ne serait-ce qu’une seule \[fusion de plusieurs galaxies] est assez faible, ce qui laisse penser que nous avons peut-être eu de la chance d’identifier ce système si tôt », a-t-elle ajouté. Les résultats de la recherche sont publiés dans la revue Nature Astronomy.
Une fusion révélé par le regard croisé de Webb et Hubble
Les chercheurs ont analysé les données combinées du JWST et du télescope spatial Hubble pour observer les détails du système de fusion multiple, baptisé « Quintette du JWST ». En effet, bien qu’il ait été détecté auparavant par Hubble, seules les données du JWST permettaient de confirmer que les galaxies interagissaient entre elles.
La caméra proche infrarouge du JWST (NIRCam) a montré la présence d’un vaste halo de gaz entourant le groupe de galaxies. Les cinq galaxies présentent également un décalage vers le rouge (ou redshift) similaire, ce qui indiquerait leur interconnexion. Le décalage vers le rouge constitue une mesure de distance cosmique, observable lorsque la lumière émise par des objets lointains s’étire vers des longueurs d’onde rouges. Plus un objet est éloigné, plus son décalage vers le rouge est marqué.
D’après les chercheurs, les galaxies principales sont séparées de 43 000 années-lumière, tandis que la paire la plus éloignée l’est de 60 700 années-lumière. Cette proximité suggère qu’elles finiront par fusionner pour former une seule et vaste galaxie. Le système pourrait par ailleurs inclure d’autres galaxies, trop peu lumineuses pour être détectées. Leur observation nécessiterait des instruments sensibles à plusieurs longueurs d’onde.
Deux apperçus de la fusion de cinq galaxies repéré par le JWST dans l’Univers primordial. Les galaxies individuelles sont nommées ELG1 à ELG5 et situées environ 800 millions d’années après le Big Bang. © NASA, ESA, CSA et STScI / Hu et al.Des similitude avec le « Quintette de Stéphan »
Le Quintette du JWST présente des similitudes frappantes avec le Quintette de Stéphan, un système de fusion multiple observé dans l’univers local, composé de quatre galaxies et d’une cinquième située à proximité mais non encore captée par le groupe. Les deux systèmes partagent une caractéristique remarquable : une traînée de matière reliant deux de leurs galaxies, signe d’une interaction dynamique.
Mais contrairement au Quintette de Stéphan, celui du JWST forme activement des étoiles. Les galaxies du Quintette de Stéphan, plus âgées, sont aujourd’hui bien moins productives, tandis que celles du Quintette du JWST donnent naissance à de nouvelles étoiles à un rythme étonnamment élevé pour une époque si précoce (800 millions d’années après le Big Bang). Les chercheurs estiment que le système atteint une masse stellaire totale de 10 milliards de masses solaires.
Cette masse stellaire et ce taux de formation exceptionnel suggèrent que l’ensemble pourrait évoluer vers une galaxie unique, extrêmement massive et inactive, entre 1 et 1,5 milliard d’années après le Big Bang. L’avenir du système dépendra toutefois de la présence éventuelle de trous noirs actifs en son sein. Les trous noirs galactiques pourraient en effet entraîner une suspension rapide de la formation d’étoiles.
Il convient toutefois de souligner que, si les images du JWST ont révélé des détails précis sur la structure du système, elles ne fournissent pas encore d’informations sur l’intensité des raies spectrales. Sans ces données, il est difficile de déterminer des caractéristiques essentielles telles que les mouvements internes du système ou la nature des gaz qui le composent.
Néanmoins, si d’autres systèmes semblables au Quintette du JWST venaient à être découverts, les chercheurs pourraient alors établir la fréquence de tels phénomènes et les conditions de leur apparition. Ils pourraient aussi déterminer si les fusions multiples sont réellement aussi rares qu’on le suppose aujourd’hui.
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