Ce pistolet à colle modifié imprime en 3D les greffes osseuses directement sur les fractures

Le matériau d’impression est conçu pour stimuler la repousse de l’os et s’adapter aux fractures complexes.

pistolet colle greffes
| Image générée par IA
⇧ [VIDÉO]   Vous pourriez aussi aimer ce contenu partenaire

En modifiant un simple pistolet à colle, des chercheurs sont parvenus à imprimer en 3D des greffes osseuses directement au niveau des fractures et des lésions. Le matériau d’impression est optimisé pour stimuler la repousse de l’os et s’adapter aux fractures complexes. Il contient aussi des antibiotiques et permet d’intégrer, en seulement quelques minutes, les greffons au cours des interventions chirurgicales.

Le tissu osseux est l’un des seuls de l’organisme à pouvoir naturellement s’auto-réparer quasi indéfiniment à la suite d’une fracture ou d’une lésion. Cependant, cette capacité d’autoréparation peut être limitée en cas de fractures importantes (ou irrégulières) ou des lésions provoquées par la résection d’une tumeur osseuse. Pour stimuler la repousse naturelle de l’os, ces cas nécessitent parfois des transplantations osseuses.

Les transplantations osseuses peuvent être effectuées à l’aide d’os de donneurs, mais cette approche est limitée à la fois en raison de la pénurie de dons et des complications post-transplantations. Des implants artificiels métalliques ou en composites de polymères sont utilisés pour pallier ces limites, mais ils ne peuvent garantir une repousse optimale en cas de lésions ou de fractures complexes. Sans ajustement précis entre l’implant et le tissu osseux hôte, la repousse de l’os est compromise, ce qui pose un risque pour sa stabilité à long terme.

La conception des implants s’est significativement améliorée grâce aux avancées en matière d’impression 3D. La technologie a notamment permis de concevoir des implants personnalisés s’adaptant à chaque patient et chaque fracture. L’approche reste toutefois limitée, car les implants nécessitent généralement de longs traitements après l’impression et leur fabrication nécessite des numérisations à haute résolution des défauts à réparer sur le site du receveur. Ces processus engagent non seulement des coûts élevés, mais prennent également du temps.

Une impression directement au bloc opératoire

Une équipe de l’Université sud-coréenne de Sungkyunkwan a considérablement simplifié l’approche en développant un dispositif permettant d’imprimer directement les implants in situ. « Notre technologie propose une approche unique en développant un système d’impression in situ permettant la fabrication et l’application en temps réel d’un support directement sur le site chirurgical », explique dans un communiqué, Jung Seung Lee, co-auteur de l’étude et professeur associé de génie biomédical à l’Université Sungkyunkwan. « Cela permet une correspondance anatomique très précise, même en cas de défauts irréguliers ou complexes, sans nécessiter de préparation préopératoire telle que l’imagerie, la modélisation et le découpage. »

pistolet greffes
Résumé graphique de l’étude. © Dans Yeop Jeon et al.

Le matériau d’impression utilisé par les chercheurs comprend deux composants principaux : l’hydroxyapatite (HA), un minéral naturellement présent dans les os et favorisant la cicatrisation, et le polycaprolactone (PCL), un thermoplastique biocompatible. Le PCL se liquéfie à des températures avoisinant les 60 °C. Mais, appliqué à l’aide d’un pistolet à colle, il se refroidit suffisamment pour ne pas provoquer de lésion lors de la transplantation, tout en s’intégrant parfaitement aux sillons de l’os fracturé.

La proportion d’HA et de PCL permet d’ajuster la dureté de l’implant de sorte à répondre aux besoins anatomiques des patients. En outre, la compacité et la commande manuelle du pistolet permettraient au chirurgien d’ajuster la direction, l’angle et la profondeur d’impression en temps réel.

« Nous avons également démontré que ce processus pouvait être réalisé en quelques minutes. Cela constitue un avantage significatif en termes de réduction du temps opératoire et d’amélioration de l’efficacité de la procédure en conditions chirurgicales réelles », ajoute Lee. La composition du matériau faciliterait également la repousse naturelle de l’os. Il se dégrade naturellement au fil du temps pour être remplacé progressivement par les nouvelles cellules osseuses.

Des implants capables de lutter contre les infections

D’autre part, l’équipe a optimisé le matériau d’implant en y incorporant de la vancomycine et de la gentamicine, deux composés antibactériens. Les infections constituent un problème fréquent lors de la transplantation d’implants osseux. Le matériau a inhibé avec succès la croissance d’Escherichia coli et Staphylococcus aureus, deux bactéries fréquemment responsables d’infections postopératoires, lors de cultures en milieu liquide sur boîte de Petri.

Le matériau est conçu de sorte à diffuser progressivement les médicaments sur une période de plusieurs semaines directement au niveau du site de transplantation. « Cette approche d’administration localisée offre des avantages cliniques significatifs par rapport à l’administration systémique d’antibiotiques en réduisant potentiellement les effets secondaires et en limitant le développement de la résistance aux antibiotiques, tout en protégeant efficacement contre l’infection postopératoire », explique Lee.

Une meilleure croissance et une densité osseuse plus élevée

Pour tester le nouveau dispositif, les chercheurs ont sélectionné des lapins blancs de Nouvelle-Zélande (Oryctolagus cuniculus) qui ont subi des fractures fémorales sévères. Les fractures ont d’abord été renforcées à l’aide de plaques et de vis métalliques avant de combler les défauts des os avec soit le nouveau matériau, soit du ciment pour os standard fréquemment utilisé en traumatologie.

Après un suivi de 12 semaines, les lapins traités avec le nouveau matériau ont globalement obtenu de meilleurs résultats, notamment une meilleure formation et croissance du tissu osseux, que ceux traités avec le ciment osseux. Aucun signe d’infection ou de nécrose tissulaire n’a été observé avec le nouveau traitement.

« Les résultats [détaillés dans la revue Device] ont montré que le groupe d’impression présentait de meilleurs résultats sur des paramètres structurels clés tels que la surface osseuse, l’épaisseur corticale et le moment d’inertie polaire, suggérant une cicatrisation et une intégration osseuses plus efficaces », indique Lee. À la fin du suivi, le matériau implanté s’est naturellement dégradé d’environ 10 %.

Il faut toutefois garder à l’esprit que l’application clinique de la technologie nécessitera davantage d’améliorations, ainsi que des essais sur des modèles animaux plus grands. Dans cette optique, l’équipe prévoit d’améliorer le potentiel antibactérien du matériau d’impression, puis d’établir des protocoles de fabrication et de stérilisation standardisés. « Si ces étapes sont franchies avec succès, nous envisageons que cette approche devienne une solution pratique et immédiate pour la réparation osseuse directement au bloc opératoire », conclut Lee.

Source : Device
Laisser un commentaire