Un gène fœtal réactivé permet la régénération du cœur après une lésion, selon une étude

Vers des thérapies régénératives cardiaques de nouvelle génération ?

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Des chercheurs ont identifié un gène fœtal dont la réactivation permettrait de régénérer les cellules musculaires du cœur adulte après une lésion. Bien que le gène soit toujours présent et faiblement exprimé dans les cellules adultes, son activité reste fortement limitée, rendant la régénération cardiaque pratiquement impossible. Les tests in vitro sur des cellules cardiaques humaines ont montré un potentiel de régénération encourageant. Ces résultats pourraient contribuer au développement de nouvelles approches de thérapie régénérative.

Malgré les progrès des thérapies et les efforts de prévention, les maladies cardiovasculaires demeurent la première cause de mortalité dans le monde. On estime que 19,8 millions de personnes sont mortes de ces affections en 2022, soit environ 32 % de l’ensemble des décès à l’échelle mondiale. 85 % de ces décès sont dus à un infarctus du myocarde ou à un accident vasculaire cérébral (AVC).

Les lésions cardiaques majeures, consécutives par exemple à un infarctus ou à une insuffisance cardiaque, demeurent difficiles à traiter en raison de la capacité très limitée — voire inexistante — des tissus cardiaques adultes à se régénérer. En réaction à une lésion, le muscle cardiaque (ou myocarde) forme principalement un tissu cicatriciel, appelé « fibrose », qui n’apporte qu’une réparation temporaire et contribue à la morbidité comme à la mortalité liées aux pathologies cardiaques.

Bien que de nombreuses thérapies aient été mises au point pour atténuer les symptômes, le rétablissement complet à l’état antérieur à la maladie demeure quasi impossible. Des thérapies moléculaires et cellulaires, telles que l’utilisation de cellules souches ou progénitrices, ont été explorées au cours des deux dernières décennies pour tenter de régénérer le myocarde à différents stades de la maladie. Ces approches n’ont toutefois montré qu’une efficacité limitée lors des essais cliniques.

Réactiver un programme fœtal pour relancer le cœur adulte

Une équipe de l’École de médecine Icahn du mont Sinaï, à New York, propose aujourd’hui une alternative régénératrice fondée sur l’activation d’une voie fœtale, susceptible de s’avérer plus efficace. Les résultats — détaillés dans la revue npj Regenerative Medicine — suggèrent que cette approche pourrait restaurer la capacité du cœur adulte à se régénérer naturellement après une lésion.

Si certains animaux, comme certains métazoaires, possèdent naturellement la capacité de régénérer leurs cellules cardiaques, les mammifères semblent moins avantagés, en particulier à l’âge adulte. « On a mis en évidence un faible renouvellement des cardiomyocytes dans le cœur humain sain, mais ce renouvellement est très limité et diminue avec l’âge. Par conséquent, la régénération cardiaque en réponse à une lésion telle qu’un infarctus du myocarde demeure un défi clinique », écrivent les chercheurs dans leur étude.

L’équipe s’est alors concentrée sur un gène appelé Cycline A2 (CCNA2), un régulateur majeur du cycle cellulaire des cardiomyocytes, fonctionnel durant le développement fœtal mais inactivé peu après la naissance. Chez le fœtus, il joue un rôle essentiel dans la division et la croissance des cellules, favorisant la prolifération de nouvelles cellules cardiaques. Cependant, cette voie d’activité est très limitée dans les cellules adultes.

Les études sur la réactivation du gène dans les cellules adultes n’ont jusqu’ici porté que sur des modèles animaux. Des expériences précédemment menées sur des porcs adultes ont montré que son activation induisait avec succès le renouvellement des cellules cardiaques après un infarctus. Les animaux traités présentaient une augmentation pouvant atteindre 55 % du nombre de nouvelles cellules dans les zones péri-infarctus. Ils présentaient également une diminution significative de la fibrose et une amélioration de la fonction cardiaque. Les essais sur des souris ont produit des résultats similaires.

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Feuille de route translationnelle et modèle mécanistique de la thérapie génique CCNA2 pour la régénération cardiaque. © Bouhamida et al.

Des cellules cardiaques humaines adultes regénérées avec succès

La nouvelle étude visait à reproduire ces résultats, cette fois sur des cellules cardiaques humaines issues d’adultes âgés de 41 et 55 ans, ainsi que sur des cellules cardiaques murines adultes. Un vecteur viral a été utilisé pour introduire le gène CCNA2 activé dans les cellules en culture. Les chercheurs ont ensuite réalisé une imagerie cellulaire en temps réel pour suivre la division et la morphologie des cellules, ainsi qu’un séquençage d’ARN pour analyser les modifications d’expression génique.

L’activation du gène CCNA2 a permis de régénérer les cellules cardiaques humaines, les nouvelles cellules conservant la structure et la fonction du muscle cardiaque et continuant à réguler efficacement le calcium, élément essentiel à la contractilité. Le séquençage des cellules de souris régénérées a également révélé des signatures de division active et de reprogrammation cellulaire.

« Pris ensemble, ces résultats suggèrent que la reprogrammation partielle induite par CCNA2 reflète une activation contrôlée des programmes de développement, cohérente avec les réponses régénératrices observées dans les cœurs néonataux, et s’aligne sur des preuves antérieures selon lesquelles de modestes augmentations de l’expression des gènes du cycle cellulaire peuvent améliorer la capacité de régénération cardiaque », écrivent les auteurs.

Si des travaux supplémentaires seront nécessaires avant d’envisager des essais cliniques, ces résultats constituent une piste intéressante pour la régénération cardiaque chez l’adulte. Par ailleurs, « contrairement à la transplantation cellulaire ou aux mitogènes non spécifiques, CCNA2 intègre la stimulation de la prolifération à la fidélité de lignage, offrant ainsi une stratégie plus sûre et plus efficace pour la régénération cardiaque », concluent les chercheurs.

Source : npj Regenerative Medicine

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