Alors que la planète dépassera officiellement 1,5 °C de réchauffement d’ici 2030, le nouveau projet de texte sur les résultats des négociations de la COP30 ne comporte aucune mention de l’élimination progressive des combustibles fossiles. Le texte a été publié alors même que 29 pays en faveur de la transition énergétique ont menacé de bloquer tout accord qui n’en fera pas mention. La tension est à son comble à Belém et les pourparlers devraient se poursuivre ce weekend pour tenter de trouver un accord satisfaisant pour toutes les parties.
Lors de la signature de l’Accord de Paris en 2015, les pays se sont engagés à limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C au-dessus de la moyenne préindustrielle et à le maintenir en dessous de 2 °C. Des négociations annuelles lors de la Conférence des Parties (COP) ont été effectuées depuis pour atteindre cet objectif.
Les COP ont suscité un certain espoir lorsqu’une décision prise lors de la COP28, en 2023, a établi pour la première fois l’engagement – dit « Bilan Mondial » – de tous les pays à s’affranchir progressivement des combustibles fossiles. Bien qu’aucun calendrier ni protocole pour y parvenir n’ait été fixé, l’engagement a été considéré comme historique.
Cependant, depuis sa signature, les pays pétroliers, comme l’Arabie Saoudite et l’Iran, ont tenté de s’y opposer, si bien que la tentative de le réaffirmer lors de la COP29 de 2024 a échoué. Lors de la COP30, qui s’est tenue à Belém, au Brésil, entre le 10 et 21 novembre, les négociations en faveur de l’abandon des combustibles fossiles semblent une nouvelle fois s’être soldées par un échec.
En réponse, une lettre officielle a été adressée à la présidence de la COP indiquant que de nombreux gouvernements favorables à une feuille de route pour la transition énergétique l’ont érigée en « ligne rouge » dans les négociations.
« Nous ne pouvons soutenir un résultat qui ne comporte pas de feuille de route pour la mise en œuvre d’une transition juste, ordonnée et équitable hors des énergies fossiles. Cette attente est partagée par une vaste majorité des Parties, ainsi que par la communauté scientifique et par les personnes qui suivent de près nos travaux. Le monde attend de ce Protocole de COP qu’il témoigne de la continuité et des progrès accomplis après le Bilan mondial. Tout autre résultat serait inévitablement perçu comme un recul », peut-on y lire, selon The Guardian.
Au total, 29 pays ont signé la lettre, notamment : la France, l’Autriche, la Belgique, le Chili, la Colombie, le Costa Rica, la Croatie, la Tchéquie, l’Estonie, la Finlande, l’Allemagne, le Guatemala, le Honduras, l’Islande, l’Irlande, le Liechtenstein, le Luxembourg, les Îles Marshall, le Mexique, Monaco, les Pays-Bas, le Panama, les Palaos, la Slovénie, l’Espagne, la Suède, la Suisse, le Royaume-Uni et le Vanuatu.
Ces pays ont déclaré ne pas tenir compte de toute décision entravant la transition énergétique. Une proposition de feuille de route pour la transition énergétique figurait dans la première version d’un accord potentiel issu de deux semaines de négociations. Mais face aux pressions des pays pétroliers, le Brésil semble avoir finalement cédé en publiant une version provisoire présentée par la présidence qui ne tient pas compte de cette feuille de route et qui ne comporte même pas le terme « énergies fossiles ».
Fracture entre pays pétroliers et défenseurs de la transition
Lors de la proposition de feuille de route pour réduire les combustibles fossiles et de la lettre ouverte de ses partisans, on ne savait pas immédiatement comment les pays opposés allaient réagir. Mais d’après The Guardian, le Brésil aurait subi des pressions de la part de certains pays pétroliers, ceux-ci menaçant notamment de se retirer des pourparlers si la feuille de route était approuvée.
Plutôt que de tenir compte de cette feuille de route, la dernière version publiée du texte de synthèse des négociations propose d’accroître les financements pour permettre aux pays, en particulier ceux en développement, de s’adapter aux impacts à venir du réchauffement climatique. L’augmentation des fonds pour soutenir les échanges commerciaux et la réduction des émissions de gaz à effet de serre a aussi été abordée.
Cependant, « le succès de ce Protocole de COP ne se mesure pas à l’adoption d’un texte à tout prix. Sa véritable réussite réside dans la qualité des résultats obtenus. Adopter un texte faible ou vide de sens signifierait un échec du multilatéralisme climatique et un manquement envers les générations futures, qui méritent une planète habitable », a précisé Irene Vélez Torres, ministre de l’Environnement de la Colombie, au journal.
Cela a créé des tensions géopolitiques palpables, avec d’un côté les pays favorables à la transition énergétique et d’un autre côté ceux dont l’économie dépend en grande partie des combustibles fossiles. Les négociations de cette année ont également été marquées par des manifestations des communautés indigènes qui déplorent un manque d’écoute et de considération, ainsi que l’absence notable des États-Unis, qui, rappelons-le, se sont à nouveau retirés de l’Accord de Paris.
La présidence brésilienne prise en étau
Le Brésil a exercé une forte pression sur les négociateurs pour parvenir rapidement à un accord. Cependant, si on espérait qu’un accord satisfaisant pour toutes les parties puisse être trouvé avant la clôture officielle de la COP, les négociations ont été retardées par un incendie dans une partie de la zone de pourparlers de l’ONU. Aucun blessé grave n’a été signalé mais la zone concernée est restée fermée pendant plusieurs heures.
Alors que les négociations se poursuivent toujours, un certain nombre de questions restent à résoudre. Elles incluent par exemple les plans climatiques nationaux, trop peu ambitieux pour limiter le réchauffement à 1,5 °C, les financements climatiques et le niveau de transparence dont ils devront faire l’objet, ainsi que le montant des fonds d’adaptation pour les pays en développement, les plus vulnérables aux effets du réchauffement climatique.

