L’ornithorynque est un animal semi-aquatique de l’est de l’Australie (y compris la Tasmanie) pour le moins mystérieux. Si mystérieux que lorsque les scientifiques britanniques l’ont rencontré pour la première fois, ils se sont demandés s’il ne s’agissait pas d’un canular élaboré avec différents morceaux d’animaux (différents). Et cela peut se comprendre, l’animal possède un bec de canard, une queue de castor, des pattes palmées et possède même du venin. Mais un autre élément retient à présent la curiosité des scientifiques : son lait.
Des études antérieures ont révélé que le lait d’ornithorynque confère une protection antimicrobienne aux jeunes animaux de l’espèce. Mais à présent, une nouvelle étude menée par des scientifiques du CSIRO (Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation, l’organisme gouvernemental australien pour la recherche scientifique et industrielle) a découvert que le lait d’ornithorynque est particulièrement efficace contre les bactéries : « L’ornithorynque est un animal si étrange qu’il serait logique qu’il possède aussi une biochimie hors du commun », explique un membre de l’équipe de recherche, la biologiste moléculaire Janet Newman. « En examinant de plus près leur lait, nous avons caractérisé une nouvelle protéine qui a des propriétés antibactériennes uniques, avec le potentiel de sauver des vies », ajoute-t-elle.
En utilisant des techniques de cristallisation des protéines mises au point au Centre de cristallisation collaboratif du CSIRO, les chercheurs ont pu reproduire la protéine dans le laboratoire et déchiffrer sa structure moléculaire en 3D, afin de découvrirr d’où proviennent ses propriétés antimicrobiennes de manière précise. Ce qu’ils ont découvert, était un pli protéique unique, jamais vu auparavant, qui présente une structure également unique de boucles : ce que les chercheurs ont surnommé « Shirley Temple », d’après les boucles dorées caractéristiques de l’actrice américaine portant ce nom.
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Selon l’équipe de recherche, cette caractéristique pourrait avoir évolué dans le lait de l’animal pour aider à protéger les jeunes ornithorynques, qui ne se nourrissent pas des trayons. En effet, l’ornithorynque n’a pas de mamelons apparents : son lait est émis à travers de petites ouvertures dans la peau (des pores) et s’amasse en gouttelettes accrochées aux poils de la mère, que les petits ornithorynques lèchent quand leur mère est étendue sur le dos.
Toujours selon les chercheurs, il serait possible que l’ornithorynque ait évolué pour produire ces boucles antimicrobiennes Shirley Temple comme moyen de défense contre les bactéries attirées par ce lait exposé, assurant que les jeunes ornithorynques puissent s’en nourrir, sans que le lait n’attire les bactéries.
À l’heure actuelle, il ne s’agit que d’une hypothèse, mais maintenant que nous connaissons la structure moléculaire de cet antimicrobien naturel, l’équipe suggère que nous pourrions être en mesure de répliquer la protéine afin d’élaborer de nouveaux médicaments antibiotiques, ce qui nous permettrait de combattre le fléau grandissant des super bactéries résistantes aux antibiotiques.
Il ne s’agit pas de la première fois que cet animal mystérieux nous vient en secours. En effet, en 2016, des chercheurs ont découvert que l’hormone contenue dans le venin de l’ornithorynque pouvait nous aider à développer de nouveaux types de traitements contre le diabète. « Il y a une citation de Louis Pasteur qui dit : « Le hasard ne favorise que les esprits préparés ». Vous pouvez faire des découvertes inattendues dans toutes sortes d’endroits et dans tous domaines », a déclaré Newman.