Nous connaissons tous au moins une technologie « prédisant » en quelques sortes une action future probable, nous y sommes même habitués. Pourriez-vous trouver facilement un exemple ? Si vous n’y parvenez pas tout de suite, c’est qu’en effet, vous y êtes déjà trop habitués. Laissez-nous donc le faire à votre place : le dictionnaire avancé de vos smartphones, qui choisit pour vous (parfois incorrectement certes) les mots suivants afin de vous faire gagner du temps. Et bien sachez que bientôt, ce type de technologie logicielle sera capable de véritablement « jeter un oeil dans le futur » (simulation prédictive), pour deviner des actions que vous aurez à peine eu le temps d’imaginer vous-mêmes.
Bien qu’il ne s’agisse pas encore d’un logiciel capable de prédire l’avenir avec une certitude divine, cette technologie promet, et pourrait peut-être un jour, à l’image de la série Netflix « Altered Carbon », nous permettre de profiter des services d’un assistant robotisé, qui nous préparera notre café ou dîner avant même que nous le demandions.
Un processus informatique développé par des chercheurs de l’Université de Bonn en Allemagne, a permis de repousser les limites des simulations informatiques prédictives, permettant d’anticiper avec précision les comportements humains avec quelques minutes d’avance.
Les générations actuelles de logiciels d’anticipation ne permettent que de définir ce que nous ferons dans les prochaines secondes. « Nous voulons être capables de prédire le moment et la durée des activités des minutes, voire même des heures, avant qu’elles ne se produisent », explique Jürgen Gall, le responsable de l’équipe de recherche.
L’objectif était de déterminer si un programme informatique pouvait énumérer une séquence d’actions jusqu’à cinq minutes dans le futur, en se basant sur les premières étapes d’une activité. Pour entrer dans les détails, lors des premiers tests, les chercheurs ont élaboré un logiciel capable de « deviner » les actions futures d’un chef cuisinier, en lui donnant comme base un certain nombre de vidéos montrant des personnes préparant des repas simples, tels qu’un petit-déjeuner ou une salade.
Par la suite, ils ont fourni au programme une toute nouvelle vidéo montrant une autre personne préparant un repas similaire, et ont observé comment ce dernier prédisait les étapes à venir, avec leur durée respective.
Ci-dessous, quelques exemples du logiciel en pleine action :
Et là, vous êtes probablement en train de vous dire : « Mais, c’est simple de s’imaginer ce qu’il fera ensuite avec des actions aussi prévisibles ? ». Certes, pour un humain… Mais ce type de raisonnement n’a rien de facile pour un ensemble d’ordinateurs dotés d’une intelligence artificielle.
L’équipe a testé deux approches différentes, en utilisant plusieurs types de réseaux neuronaux artificiels : le premier anticipait les actions futures et « réfléchissait » avant d’anticiper à nouveau, tandis que l’autre se chargeait de construire directement une matrice avant de croiser les probabilités. Mais bien entendu, plus le logiciel devait regarder loin dans le futur, plus il commettait d’erreurs.
Concernant les résultats comparatifs des deux méthodes, c’est l’approche réflective qui l’emporte. En effet, elle a fait un peu mieux que la méthode matricielle pour une prédiction allant jusqu’à 20 secondes. Par contre, les deux méthodes ont montré des résultats similaires pour les prédictions allant au-delà de 40 secondes.
« L’exactitude était supérieure à 40% pour les courtes périodes de prévision, mais elle a ensuite diminué au fur et à mesure que l’algorithme prédisait des actions futures plus lointaines », explique Gall.
Pour pousser les tests à l’extrême, les scientifiques ont découvert que leur meilleure version du programme pouvait prédire correctement une action pour une durée allant jusqu’à 3 minutes dans le futur, avec un taux de réussite de 15%. À première vue, ces chiffres n’impressionnent peut-être pas, mais ces résultats permettent de préparer un terrain solide pour les futures technologies d’intelligence artificielle, qui seraient capables de faire des prédictions littéralement surhumaines.
L’équipe présentera ses résultats à la IEEE Conference on Computer Vision and Pattern Recognition, à Salt Lake City (États-Unis). Des résultats qui susciteront certainement un certain intérêt concernant les logiciels prédictifs.
Cependant, il est évident qu’il y a encore beaucoup de chemin à faire avant d’aboutir à un système très efficace et surtout, autonome. En effet, l’objectif final serait de faire en sorte que les programmes acquièrent suffisamment d’expérience par eux-mêmes, sans le besoin d’être formés.
Et concernant les premières applications potentielles de cette technologie ? Premièrement, elle pourrait nous aider à améliorer l’intelligence artificielle actuelle des véhicules autonomes, ou nous permettre de rentrer tranquillement à la maison quand nous sommes en retard pour préparer le dîner, en faisant chauffer l’eau, le temps du trajet, pour qu’on puisse rapidement préparer nos pâtes une fois arrivés.
Les applications potentielles ne manquent pas, mais il est d’abord nécessaire de rendre cette technologie plus mature en augmentant sa fiabilité, et donc de la rendre plus sûre. Une technologie qui a un bel avenir devant elle, pour autant que son implémentation ne soit pas prématurée.