L’observation des ondes gravitationnelles a permis à l’astrophysique et à la cosmologie d’entrer dans une nouvelle ère. Le phénomène, prédit par Einstein, est riche en informations car ces ondes portent souvent les traces des objets ou des événements qui en sont à l’origine. Bien que, jusqu’à maintenant, les ondes gravitationnelles détectées soient ordinairement de très faible intensité, des physiciens ont montré que, dans le cas très hypothétique où leur amplitude serait gigantesque, la collision de celles-ci représenterait un danger pour la Terre.
Lorsque le physicien Albert Einstein publie ses travaux sur la relativité générale en 1915, ses équations montrent l’existence d’un phénomène d’oscillation de l’espace-temps sous l’effet de l’accélération de corps massifs. Cette oscillation prend la forme d’une onde se propageant à la vitesse de la lumière ; onde qui sera par suite baptisée « onde gravitationnelle ». Elles sont par exemple générées par la fusion d’étoiles à neutrons ou la coalescence de trous noirs.
Le 14 septembre 2015, la collaboration LIGO annonce la détection directe d’ondes gravitationnelles produites par la coalescence de deux trous noirs. À partir de cette découverte, l’astrophysique entre dans l’ère multi-messagers et l’étude des ondes gravitationnelles devient un domaine de recherche très actif. Mais certains physiciens se sont penchés sur des scénarios plus « exotiques », impliquant des ondes gravitationnelles d’intensité bien plus importante que celles détectées précédemment.
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C’est le cas des physiciens théoriciens Frans Pretorius de l’université de Princeton et William East de l’Institut Perimeter de physique théorique. Bien que leur modèle soit purement spéculatif et très peu probable, les physiciens montrent que la collision entre deux types d’ondes gravitationnelles particuliers d’amplitudes suffisantes pourrait donner naissance à un trou noir. Et si ce trou noir apparaissait suffisamment près de la Terre, alors notre planète serait menacée.
Lorsque des ondes gravitationnelles sont émises, elles se propagent dans toutes les directions, sous la forme d’une bulle voyageant dans l’espace. Lorsque la courbure des ondulations de l’espace-temps devient suffisamment grande, celles-ci peuvent apparaître plates, comme des ondes de lignes parallèles. Selon les équations d’Einstein, des particules voyageant à la vitesse de la lumière pourraient aussi théoriquement générer ces « ondes gravitationnelles planes ».
De précédentes études se sont penchées sur la collision potentielle entre deux ondes gravitationnelles de ce type. Les résultats ont montré que la collision contraindrait l’espace-temps jusqu’à son effondrement en singularité gravitationnelle ; telle que celle située au centre d’un trou noir.
Une singularité gravitationnelle est une région de l’espace où le champ gravitationnel diverge (devient infini). Cependant, de tels objets sont considérés comme purement mathématiques, correspondant à une « pathologie » de la relativité générale.
Dans tous les cas, lors d’une telle collision, la singularité se dissiperait presque aussitôt après sa formation. Toutefois, Pretorius et East ont étudié un autre scénario dans lequel une onde gravitationnelle courbe entrerait en collision avec une onde gravitationnelle plane. Ils ont également pris en compte la façon dont une telle collision affecterait l’évolution de la singularité.
Avec assez d’énergie, un horizon des événements émergerait autour de la singularité, formant ainsi un véritable trou noir qui absorberait la majorité de l’énergie provenant des ondes gravitationnelles.
Actuellement, aucun phénomène connu ne permet de libérer l’énergie nécessaire à la réalisation de ce scénario. Les ondes gravitationnelles détectées en 2015 n’ont affecté l’espace-temps que sur l’échelle de taille d’un proton. Donc pour former un trou noir, ces ondes devraient posséder une amplitude bien plus importante.
« Nous ne devrions pas nous trouver à proximité, et si c’était le cas, ces ondes étireraient la Terre sur plusieurs milliers de kilomètres, tout serait donc détruit » explique Vitor Cardoso, astrophysicien à l’université de Lisbonne. « Dès lors que nous détecterions le phénomène, nous serions tous morts ».
La Terre serait donc disloquée par de telles ondes gravitationnelles avant que ces dernières ne donnent naissance au trou noir qui aurait, de toute façon, à son tour, provoquer la même finalité pour notre planète.
En 2010, Pretorius avait déjà montré que la collision de particules à très haute énergie pourrait théoriquement générer des ondes gravitationnelles planes conduisant à la formation de micro trous noirs. ces travaux s’ajoutant ainsi aux autres existant concernant la manière de produire des trous noirs sur Terre.
Au-delà de l’aspect spectaculaire et très hypothétique de ces travaux, les résultats demeurent toutefois importants. En effet, cette étude offre un nouveau cadre d’étude à la cosmologie théorique quant à la dynamique de l’espace-temps et à la distribution de la matière. L’étude, disponible sur le serveur de pré-publication arXiv, doit encore faire l’objet d’une relecture et d’une validation par les paires avant d’être officiellement publiée.