Un pulsar est une étoile à neutrons en rotation, possédant un puissant champ magnétique et produisant périodiquement un rayonnement électromagnétique dans la direction de son axe magnétique. Un pulsar émet généralement à haute énergie, dans les fréquences radio ou X (parfois aussi simultanément dans l’infrarouge proche et le visible). Des astrophysiciens ont donc été surpris de découvrir une émission étendue exclusivement située dans les infrarouges, autour du pulsar RX J0806.4-4123.
Les pulsars produisant des signaux longue distance et présentant des émissions étendues sur plusieurs fréquences du spectre ne sont pas nouveaux. Toutefois, RX J0806.4-4123 est bien le premier pulsar détecté dont la fréquence d’émission de sa zone périphérique se situe exclusivement dans les infrarouges. Un tel phénomène, observé par une équipe d’astrophysiciens américano-turque, pourrait indiquer de nouvelles propriétés jusqu’alors inconnues.
« Cette étoile à neutrons particulière appartient à un groupe de sept pulsars à rayons X — appelé les « Sept Magnifiques » — plus chauds que ce qu’ils devaient être compte-tenu de leur âge et de l’énergie disponible, au regard de la perte d’énergie par rotation » explique Bettina Posselt, astrophysicienne à l’université de Penn. « Nous avons observé une zone étendue d’émissions infrarouges autour de l’étoile à neutrons sur environ 200 unités astronomiques ».
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Cette observation est le résultat d’une longue investigation débutée en 2009 par Posselt et ses collègues, lorsque ces derniers ont tourné le Very Large Telescope (VLT) vers les Sept Magnifiques (situés à 3300 années-lumière de la Terre), dans l’objectif de détecter des objets secondaires moins massifs en périphérie de ces derniers, dans l’infrarouge proche.
Les premiers résultats ont révélé une émission plus intense dans la zone où se situait RX J0806.4-4123. Une nouvelle observation datant de 2014, effectuée au moyen du télescope Hershel, a confirmé la première [observation] en détectant un fort signal infrarouge à la longueur d’onde de 160 µm.
En 2016, les astrophysiciens poursuivent leur enquête grâce au télescope Gemini et observent, une nouvelle fois, un fort rayonnement infrarouge au niveau du pulsar. C’est le télescope spatial Hubble qui donne l’ultime confirmation aux chercheurs sur la présence d’une source d’infrarouge étendue et longue distance. Les résultats de la découverte ont été publiés dans la revue The Astrophysical Journal.
Les auteurs avancent deux hypothèses possibles pour expliquer ce phénomène. La première propose l’existence d’un disque de matière autour du pulsar. « Une première théorie suggère l’existence d’un disque de matière en coalescence autour de l’étoile à neutrons issu de la supernova » indique Posselt.
« Un tel disque serait composé de matière provenant de l’étoile massive progénitrice (l’étoile disparue suite à la supernova). L’interaction de ce disque avec le pulsar aurait augmenté sa température et ralenti sa rotation. Si la présence d’un disque résultant d’une supernova est confirmé, cela pourrait changer notre compréhension de l’évolution des étoiles à neutrons ».
La seconde hypothèse suggère l’existence d’un type particulier de nébuleuse : une nébuleuse de vent de pulsar. Elle apparaît lorsque le rémanent d’une supernova est soufflé par les puissants vents stellaires du pulsar.
Les vents des pulsars sont formés de particules accélérées par les lignes électriques du fort champ magnétique des étoiles à neutrons. Bien que les nébuleuses de vent de pulsar ne soient pas rares, c’est la première fois que l’une d’elles n’est détectée que dans les infrarouges.
« Tandis que l’étoile à neutrons se déplace dans le milieu interstellaire à une vitesse plus grande que la vitesse du son, une onde de choc se forme à la frontière de l’interaction entre le milieu interstellaire et le vent du pulsar. Les particules impactées émettent alors un rayonnement synchrotron, générant l’émission infrarouge observée. Typiquement, les nébuleuses de vent de pulsar sont observées dans les rayons X ; observer une nébuleuse de vent de pulsar uniquement dans les infrarouges est donc passionnant » explique Posselt.
Cependant, il faudra encore attendre avant que les astrophysiciens ne statuent sur l’une ou l’autre de ces hypothèses. En effet, même si les observations ont été menées grâce aux instruments infrarouges de Hubble, ce dernier est spécifiquement tourné vers l’observation dans les ultraviolets et le visible. Des données plus détaillées seront certainement fournies par le télescope James Webb, spécialement destiné aux infrarouges.