Les astronomes viennent de détecter une vaste population de galaxies de l’Univers primitif jamais observées auparavant

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À gauche, une image en champ profond de Hubble. À droite, des observations effectuées avec ALMA. | 2019 Wang et al.
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Des astronomes viennent de découvrir de très nombreuses galaxies primitives, à plusieurs milliards d’années-lumière de la Terre. Plus précisément, il s’agit là de 39 galaxies massives, invisibles jusqu’à présent et qui changent notre compréhension de l’Univers primitif.

« C’est la première fois qu’une si vaste population de galaxies massives est découverte et confirmée au cours des deux premiers milliards d’années de l’Univers, dont la vie compte aujourd’hui 13.8 milliards d’années. Auparavant, ces galaxies étaient invisibles pour nous », a déclaré l’astronome Tao Wang, de l’Université de Tokyo. « Cette découverte va à l’encontre des modèles actuels pour cette période d’évolution cosmique et aidera à ajouter certains détails qui manquaient jusqu’à présent », a-t-il ajouté.

En effet, aujourd’hui, l’Univers est âgé d’environ 13.8 milliards d’années, ce qui signifie (du moins en théorie) que nous pouvons regarder dans le passé pour voir quelles conditions étaient présentes au début de l’Univers. Par exemple, une source lumineuse qui se trouve à 10 milliards d’années, prend 10 milliards d’années pour voyager à travers l’espace jusqu’à nous rejoindre : de ce fait, lorsque nous voyons quelque chose d’aussi lointain, nous le voyons tel qu’il était il y a 10 milliards d’années.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Mais concrètement, c’est beaucoup plus compliqué. En effet, plus la source de lumière est éloignée, plus la lumière sera faible lorsqu’elle nous parviendra. Vous pouvez l’imager avec une torche : elle sera plus brillante à vos yeux si elle est située à 10 mètres de vous, que si elle est située à 100 mètres (à cette distance, elle vous paraîtra plus petite et plus pâle). À 1000 mètres, vous ne pourrez peut-être même plus la voir à l’œil nu.

De plus, l’Univers est en expansion, ce qui étend encore les ondes lumineuses tandis qu’elles voyagent à travers l’espace, les déplaçant vers l’extrémité rouge du spectre visible. Ce phénomène est connu sous le nom de décalage vers le rouge (ou redshift en anglais) : où plus un objet est éloigné, plus il y aura d’espace en expansion entre nous et l’objet, augmentant de ce fait le décalage vers le rouge.

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À gauche, une image en champ profond de Hubble. À droite, des observations effectuées par ALMA, dans la longueur d’onde submillimétrique. Crédits : 2019 Wang et al.

Lorsque le télescope spatial Hubble a « parcouru l’espace-temps » comme jamais auparavant pour effectuer sa série de photos du champ profond, l’image composite résultante étant connue sous le nom de Deep Field, il a capturé un large spectre de longueurs d’onde, allant de l’ultraviolet au proche infrarouge, révélant certaines des galaxies les plus lointaines jamais observées.

Mais l’étude de ces galaxies apportait une complication supplémentaire : « Nous les avons détectées dans les longueurs d’onde infrarouges et submillimétriques [entre l’infrarouge lointain et les micro-ondes] », a déclaré Wang. « Ces galaxies sont si sombres dans l’ultraviolet au proche infrarouge car elles contiennent une énorme quantité de poussière, qui absorbe la lumière à des longueurs d’onde plus courtes », a-t-il ajouté.

À ces longueurs d’onde, il est difficile de caractériser les galaxies. La spectroscopie, par exemple, qui est la technique utilisée pour déterminer les propriétés des étoiles sur la base d’un spectre de rayonnement électromagnétique, devient extrêmement difficile avec une variété de longueurs d’onde aussi limitée.

Cependant, les chercheurs ont été en mesure de déterminer que ces galaxies étaient substantielles : avec une densité de l’espace ayant un ordre de magnitude deux fois plus élevé que les galaxies stellaires extrêmes connues jusqu’à présent. À savoir que la densité de l’espace est la quantité d’éléments se trouvant dans l’espace à un endroit donné (étoiles, planètes, etc.) qui se retrouvent à l’intérieur d’une galaxie : et certaines galaxies sont plus encombrées que d’autres.

Les chercheurs ont également pu confirmer que ces anciennes galaxies massives forment de nouvelles étoiles 100 fois plus rapidement que la Voie lactée. De plus, théoriquement, plus une galaxie est massive et plus le trou noir situé en son centre sera également massif.

Une étude réalisée plus tôt au cours de cette année a également montré à quel point ces trous noirs sont courants (plus que ce que l’on pensait précédemment). Ce qui remet en question notre compréhension de la manière et la vitesse dont ils se forment.

Ces galaxies massives nouvellement découvertes ne sont qu’une autre partie du mystère de l’Univers… « L’existence de ce grand nombre de galaxies massives et poussiéreuses est totalement inattendue dans les modèles actuels et les simulations, ce qui montre que l’Univers pouvait former des systèmes massifs de manière bien plus efficace lorsqu’il était primitif, chose que nous ne pensions pas auparavant. Cela apporte de nouveaux défis aux théoriciens et aux modélisateurs », a expliqué Wang.

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Cette nouvelle découverte aide également à résoudre une autre problématique qui a longtemps occupé certains astronomes : la vaste population de galaxies massives à bas décalage vers le rouge. En effet, les enquêtes précédentes de l’Univers n’avaient pas permis de découvrir assez de galaxies pour expliquer la formation de galaxies massives qui sont survenues plus tard.

Mais à présent, sur la base de ses résultats, l’équipe a estimé qu’il y avait de nombreuses galaxies à haut décalage vers le rouge mais montrant une masse plus faible, qu’on n’avait pas détectées jusqu’à présent. Selon les chercheurs, il s’agirait d’au moins 530 galaxies de ce type par degré carré.

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Quelques-unes des 66 antennes des radio télescopes qui composent ALMA. Crédits : 2019 Kohno et al.

À présent, l’équipe de recherche souhaite effectuer plus d’observations grâce à l’Atacama Large Millimeter/Submillimeter Array (ALMA) dans le but d’obtenir des informations plus détaillées concernant le décalage vers le rouge de ces 39 galaxies récemment découvertes, ainsi que pour obtenir de plus amples informations quant à leur taux de formation d’étoiles et leur teneur en poussière.

Quant à l’analyse spectroscopique des galaxies, elle devra peut-être attendre le lancement du télescope spatial James Webb, le successeur de Hubble, qui sera normalement lancé en 2021. « J’ai hâte que des observatoires comme celles qui seront effectuées avec le télescope spatial James Webb, basé dans l’espace, puissent montrer de quoi ces bêtes primordiales sont réellement constituées », a déclaré Wang.

Source : Nature

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