Lorsqu’un trou noir accrète de la matière, les phénomènes de friction thermique prenant place dans son disque d’accrétion, couplés à la dynamique complexe de son champ magnétique, peuvent être à l’origine de l’émission d’un jet constitué de particules chargées ultra énergétiques voyageant à des vitesses relativistes, appelé jet astrophysique. Et pour la première fois, des chercheurs ont imagé un tel jet provenant de la collision de deux galaxies possédant un noyau galactique actif.
Une équipe de chercheurs du Clemson University College of Science, en collaboration avec des collègues internationaux, rapporte la première détection haute résolution d’un jet relativiste émergeant de deux galaxies en collision — en substance, la première preuve photographique que la fusion des galaxies peut produire des jets de particules chargées voyageant à des vitesses relativistes. L’étude a été publiée dans la revue The Astrophysical Journal.
L’équipe a capturé l’image à l’aide d’un des plus grands télescopes terrestres au monde, le télescope infrarouge optique Subaru de 8.2 mètres, situé au sommet d’une montagne à Hawaï. Ils ont effectué des observations ultérieures avec le Gran Telescopio Canarias et le télescope William Herschel sur l’île de La Palma au large des côtes espagnoles, ainsi qu’avec le télescope spatial Chandra X-Ray Observatory de la NASA.
Un jet astrophysique émergeant de la collision de deux galaxies
Les astrophysiciens avaient précédemment découvert que ces jets pouvaient être trouvés dans des galaxies de forme elliptique, qui peuvent se former lors de la fusion de deux galaxies spirales. Maintenant, ils ont une image montrant la formation d’un jet à partir de deux galaxies plus jeunes en forme de spirale.
« Pour la première fois, nous avons trouvé deux galaxies spirales sur le point d’entrer en collision, qui ont produit un jet naissant qui émerge tout juste du centre de l’une des galaxies », déclare Vaidehi Paliya. Le fait que le jet soit si jeune a permis aux chercheurs de voir clairement son hôte.
Selon Ajello, d’autres ont déjà imagé à plusieurs reprises des collisions galactiques. Mais lui et ses collègues sont les premiers à capturer deux galaxies fusionnant avec émission d’un jet astrophysique. « En règle générale, un jet émet une lumière si puissante que nous ne pouvons pas voir la galaxie derrière lui. C’est comme essayer de regarder un objet tandis qu’une lampe est pointée vers vos yeux. Tout ce que vous pouvez voir est la lampe de poche. Ce jet est moins puissant, donc nous pouvons réellement voir la galaxie dans laquelle il est né », explique Stefano Marchesi.
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Mieux comprendre la dynamique des galaxies en collision possédant un noyau galactique actif
Les jets font partie des phénomènes astrophysiques les plus puissants de l’Univers. Ils peuvent émettre plus d’énergie dans l’Univers en une seconde que notre soleil n’en produira pendant toute sa vie. Cette énergie est sous forme de rayonnement électromagnétique. On pense que les jets sont nés de galaxies plus anciennes de forme elliptique avec un noyau galactique actif (AGN) ; c’est-à-dire une zone centrale abritant un trou noir supermassif.
Les astrophysiciens pensent que toutes les galaxies ont des trous noirs supermassifs situés au centre, mais tous ne sont pas des AGN. Par exemple, le trou noir massif de la Voie lactée est dormant. Les modèles théoriques avancent que les AGN grossissent en attirant par gravité le gaz et la poussière par un processus appelé accrétion. Et par une combinaison d’effets de friction thermique et de recombinaison magnétique, certaines particules sont éjectées sous forme de jets.
Ajello affirme que l’image de l’équipe a capturé les deux galaxies, une galaxie Seyfert 1 connue sous le nom de TXS 2116-077, et une autre galaxie de masse similaire, car elles entraient en collision pour la deuxième fois en raison de la quantité de gaz vue sur l’image. « Finalement, tout le gaz sera expulsé dans l’espace, et sans gaz, une galaxie ne pourra plus former d’étoiles. Sans gaz, le trou noir s’éteindra et la galaxie restera dormante ».