Le 15 juin, la sonde Solar Orbiter de l’Agence spatiale européenne (ESA) s’est approchée du Soleil à une distance extraordinairement « courte » : elle s’est trouvée à moins de 77 millions de kilomètres de la surface de l’étoile, soit environ la moitié de la distance Terre-Soleil. La première occasion pour les scientifiques d’obtenir de nouvelles images du Soleil de très près !
Certes, des images haute résolution et en gros plan ont récemment été obtenues, grâce au télescope solaire Daniel K.Inouye situé à Hawaï, révélant les détails de la surface de l’astre. Mais Solar Orbiter est à même de réaliser ses observations sans aucune contrainte liée à l’atmosphère terrestre. Ce qui présage de nouveaux clichés époustouflants…
Bientôt de nouvelles données sur l’environnement solaire
Pendant les quelques jours qui suivent ce périhélie, l’équipe de scientifiques qui encadre la mission va pouvoir tester la dizaine d’instruments embarqués sur le vaisseau spatial, parmi lesquels six télescopes qui permettront d’obtenir des images très rapprochées du Soleil, en plusieurs points et simultanément. Daniel Müller, membre du projet Solar Orbiter de l’ESA, se réjouit du résultat : « Pour la première fois, nous serons en mesure de rassembler les images de tous nos télescopes et de voir comment ils prennent des données complémentaires des différentes parties du Soleil, y compris la surface, l’atmosphère extérieure, ou couronne solaire, et l’héliosphère plus large qui l’entoure ».
Les télescopes d’imagerie ultraviolette embarqués sur Solar Orbiter ont la même résolution spatiale que ceux du Solar Dynamic Observatory (SDO) de la NASA, qui capture des images haute résolution du Soleil depuis une orbite proche de la Terre. « Parce que nous sommes actuellement à la moitié de la distance du Soleil, nos images ont une résolution deux fois supérieure à celle du SDO pendant ce périhélie », explique Müller.
Le principal objectif de ces premières observations est donc de vérifier que les télescopes de la sonde fonctionnent correctement. Les scientifiques attendent également avec impatience les données collectées par les quatre instruments chargés de mesurer in situ certaines propriétés de l’environnement : un analyseur de vent solaire, un détecteur de particules énergétiques, un magnétomètre et un analyseur d’ondes radio et de plasma. « C’est la première fois que nos instruments in situ opèrent à une distance aussi proche du soleil, ce qui nous donne un aperçu unique de la structure et de la composition du vent solaire », explique Yannis Zouganelis, responsable adjoint du projet Solar Orbiter de l’ESA.
Ces photos inédites du Soleil mettront une semaine pour parcourir les 134 millions de kilomètres qui séparent le vaisseau de la Terre. « Nous avons une fenêtre de téléchargement de neuf heures tous les jours, mais nous sommes déjà très loin de la Terre, donc le débit de données est bien inférieur à ce qu’il était dans les premières semaines de la mission », explique Daniel Müller. Ces images seront téléchargées depuis la station de l’ESA à Malargüe en Argentine, puis traitées et diffusées au public à la mi-juillet, selon un communiqué officiel de l’ESA. Les données des instruments in situ seront quant à elles rendues publiques plus tard cette année, après un étalonnage de tous les capteurs.
Une observation des pôles à haute résolution
Solar Orbiter, lancé le 10 février 2020, a donc achevé sa phase de mise en service et va entamer sa phase de croisière qui durera jusqu’en novembre 2021. La mission devrait durer 7 à 10 ans au total. Son objectif étant d’examiner notre étoile sous toutes les coutures : vents solaires, champs magnétiques, particules solaires, etc. La sonde doit également permettre d’observer attentivement les régions polaires, plus difficiles à observer depuis le plan de l’écliptique – le plan dans lequel les planètes du système solaire tournent autour de l’astre. L’analyse des pôles permettra aux experts de mieux comprendre le comportement du champ magnétique généré, qui est à l’origine du vent solaire affectant l’ensemble de notre système solaire.
Pendant sa mission, il est prévu que l’orbiteur solaire se rapproche encore davantage, à une distance de 42 millions de kilomètres, soit plus proche du Soleil que ne l’est Mercure (qui se trouve en moyenne à 58 millions de kilomètres de notre étoile) ! Pour se déplacer hors du plan de l’écliptique, et ainsi observer correctement les pôles du Soleil, le vaisseau exploitera la gravité de Vénus.
Bien entendu, plus la sonde va s’éloigner de la Terre, plus les équipes terrestres mettront du temps à récupérer les données collectées. Daniel Müller précise qu’il faudra parfois plusieurs mois pour télécharger toutes les données captées dans l’espace lointain. Fort heureusement, la sonde dispose des capacités de stockage nécessaires pour permettre un téléchargement ultérieur, dès lors que la connexion avec la Terre est meilleure.
À noter que le record de « proximité solaire » appartient à la sonde solaire Parker, lancée par la NASA en août 2018. Cette année, le 29 janvier, elle s’est trouvée à « seulement » 18,6 millions de kilomètres de la surface solaire, soit 3 millions de kilomètres de moins que lors de ses précédents vols rapprochés. Le même jour, son écran thermique a lui aussi battu un record : il a dû résister à une température de 621 °C tout en maintenant les instruments qu’il protégeait à 30 °C !
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C’est à ce jour l’engin spatial ayant frôlé le Soleil au plus proche ; il est même prévu que Parker s’en approche à près de 6 millions de kilomètres ! Cette sonde n’est toutefois pas équipée d’instruments d’observation directe du Soleil.