Un physicien vient de proposer une nouvelle hypothèse qui pourrait finalement expliquer les mystères de la matière noire, celle qui compose l’Univers à environ 27%.
Selon la nouvelle étude, tout ce que nous avons à faire pour pouvoir expliquer les effets de la matière noire dans l’Univers, est simplement de supprimer la gravité de l’équation. « Nos idées actuelles concernant l’espace, le temps, et la gravité doivent être repensées. Cela fait longtemps que nous savons que la théorie d’Einstein sur la gravité ne fonctionne tout simplement pas avec la mécanique quantique », explique l’auteur de l’étude, Erik Verlinde, de l’Université d’Amsterdam. « Je pense que nous sommes au bord d’une révolution scientifique », ajoute-t-il.
Le gros problème avec la matière noire, c’est qu’il y a plus de gravité dans notre Univers et dans les galaxies, que ce que peuvent produire toute la matière et le gaz qui existent. Les physiciens expliquent cette incohérence en suggérant qu’il doit y avoir quelque chose d’autre dans l’Univers, quelque chose que nous ne pouvons pas voir, de sombre… d’où l’appellation « matière noire ».
En effet, les physiciens prédisent que la matière noire composerait l’Univers à 27%. Beaucoup de candidats potentiels à la composer ont été analysés (dont les axions !), mais cela reste encore à découvrir et à prouver. De ce fait, le physicien Verlinde a décidé d’approcher le problème différemment : peut-être que le problème vient du fait que nous ne comprenons pas totalement la gravité ainsi que son fonctionnement.
Mais la matière noire n’est pas la seule incohérence gravitationnelle. Il faut savoir que le modèle standard de la physique n’explique pas les effets de la gravité. Et cette dernière, ainsi que d’autres théories connues de relativité générale, ne s’accordent pas avec notre compréhension de la mécanique quantique, conduisant les chercheurs à tenter de trouver une nouvelle « théorie du tout », qui pourrait relier ces deux éléments.
Ce qu’à fait Verlinde, est qu’il a supprimé la gravité de l’équation : il suggère que la gravité n’est pas une force fondamentale de la nature, mais plutôt un phénomène émergent, tout comme la température par exemple, qui découle du mouvement de particules microscopiques. En d’autres termes, la gravité serait un effet secondaire, et non la cause, de ce qui se passe dans l’Univers.
Verlinde avait proposé une hypothèse radicale concernant la gravité en 2010. Mais aujourd’hui, il est démontré dans sa nouvelle étude que lorsque celle-ci est considérée comme un effet secondaire dans l’Univers et non comme une force fondamentale, il n’est plus indispensable de trouver une nouvelle particule qui composerait obligatoirement la matière noire : le comportement des galaxies serait sensé, même sans elle. « Nous avons des preuves que cette nouvelle vision de la gravité est en accord avec les observations », a-t-il dit. « À des échelles importantes, il semblerait que la gravité ne se comporte pas de la manière dont elle est décrite dans la théorie d’Einstein », ajoute-t-il.
Afin de parvenir à cette conclusion, le physicien a cherché à comprendre exactement comment la gravité se forme, au niveau microscopique. Ses calculs suggèrent que la gravité est un phénomène émergent qui naît de l’entropie de l’Univers : l’entropie est une propriété de la thermodynamique qui décrit combien d’énergie est gaspillée dans un système (à quel point un système est chaotique). Nous pouvons également le décrire par la quantité d’information qu’il faut pour décrire un système : plus quelque chose est chaotique, plus il faudra d’informations pour le décrire (et plus il y a de l’entropie).
Le modèle de Verlinde applique l’entropie à ce que l’on appelle le principe holographique : en gros, il s’agit du fait que des fragments d’informations fondamentales seraient stockées dans le tissu spatio-temporel. Et ces « atomes » de l’espace, comme les décrit Verlinde, pourraient se mouvoir et progresser vers une entropie élevée. Selon les calculs du physicien, cela produirait une force entropique agissant comme la gravité.
Maintenant il sera nécessaire de tester cette nouvelle hypothèse, et c’est là que résidera la plus grande partie du challenge. En effet, le moyen le plus simple pour la discréditer serait de trouver une particule qui explique la matière noire. Mais les physiciens pourraient également confirmer ou non cette nouvelle hypothèse en appliquant ce modèle de gravité de Verlinde aux observations actuelles de l’Univers. L’étude a été prépubliée sur le site arXiv.org afin que la communauté scientifique puisse commencer à effectuer des tests. Il est important de relever le fait que l’étude n’a cependant pas encore été publiée dans une revue scientifique, nous devons donc, encore une fois, prendre notre mal en patience.
L’hypothèse reste tout de même intéressante : qu’elle s’avère vraie ou fausse, il reste important pour progrésser d’apprendre de nos erreurs passées et d’essayer de nouvelles techniques, d’aborder les problèmes de manière différente afin de tenter d’obtenir des réponses concluantes. Et il ne faut pas oublier que si nous souhaitons un jour parvenir à cette théorie du tout, il est plus que probable qu’une partie de notre compréhension du fonctionnement du monde et de l’Univers, va devoir changer.
« Beaucoup de physiciens comme moi travaillent sur des révisions de la théorie, et certains progrès majeurs ont été faits. Nous sommes peut-être au bord d’une nouvelle révolution scientifique, qui changera radicalement notre manière de voir et comprendre la nature même de l’espace, du temps et de la gravité », a expliqué Verlinde.