Lorsque l’on entend le mot « pollinisateur », on pense généralement aux abeilles et aux papillons… Cependant, le domaine de la pollinisation animale regorge d’espèces diverses et variées, et parmi ces dernières, on compte un certain nombre de coléoptères — bien qu’ils soient moins efficaces dans cette « tâche ». Surtout, nous savons que les premiers pollinisateurs étaient des coléoptères ! Et récemment, des chercheurs ont découvert un coléoptère jusqu’ici inconnu ayant vécu durant le crétacé, il y a environ 99 millions d’années, et dont le dernier repas contenant du pollen permettra d’en apprendre plus sur le rôle des coléoptères dans la pollinisation à cette époque.
Quel était le rôle des coléoptères, premiers pollinisateurs à notre connaissance, dans la préservation et l’évolution des écosystèmes complexes du crétacé ? Grâce à la récente découverte d’un fossile de coléoptère préservé dans de l’ambre, réalisée par l’Institut de géologie et de paléontologie de Nanjing de l’Académie chinoise des sciences (NIGPAS) et l’Université de Bristol, nous sommes sur le point d’en savoir plus sur les premiers pollinisateurs des plantes à fleurs. Les résultats de l’étude ont été publiés dans la revue Nature Plants.
Selon diverses recherches précédentes, il y a 200 millions d’années, la Terre était aussi verte qu’aujourd’hui, couverte d’une végétation dense. Cependant, cette végétation n’était pas aussi variée qu’aujourd’hui. En effet, les plantes à fleurs (angiospermes), qui représentent plus de 80% de toutes les espèces végétales actuelles, n’ont commencé à se diversifier qu’au crétacé, il y a environ 125 millions d’années. Certains chercheurs ont attribué l’énorme succès évolutif des angiospermes à leurs relations mutualistes avec les insectes pollinisateurs, mais les preuves fossiles des pollinisateurs du crétacé étaient jusqu’à présent rares.
Arborez un message climatique percutant 🌍
Des adaptations anatomiques pour mieux polliniser
Dans cette étude, les paléontologues décrivent une nouvelle espèce de coléoptère fossile nommée Pelretes vivificus, conservée dans un morceau d’ambre du crétacé moyen et originaire du nord du Myanmar. La nouvelle espèce vivait dans la forêt tropicale birmane du crétacé il y a environ 99 millions d’années. Ses plus proches parents sont des coléoptères floraux à ailes courtes (Kateretidae) que l’on trouve aujourd’hui en Australie, fréquentant une grande variété de fleurs et se nourrissant de leur pollen.
« Pelretes vivificus est associé à des grappes de grains de pollen, ce qui suggère que les scarabées des fleurs à ailes courtes visitaient les angiospermes au crétacé. Certains aspects de l’anatomie du coléoptère, comme son abdomen poilu, sont également des adaptations associées à la pollinisation », a déclaré le professeur CAI Chenyang, paléontologue au NIGPAS.
La vallée de Hukawng, dans le nord du Myanmar, est l’un des plus riches gisements d’ambre connus. « Outre l’abondance inégalée d’insectes fossiles, l’ambre date du milieu du crétacé, au moment même où les angiospermes prenaient leur essor », déclare Erik Tihelka, entomologiste et paléontologue à l’université de Bristol. Les fossiles d’ambre du crétacé constituent une source importante de preuves pour comprendre la biologie des premières angiospermes.
Bien que Pelretes ne soit pas le premier coléoptère pollinisateur du crétacé à avoir été découvert dans de l’ambre, ce spécimen unique conserve un indice étrange sur son régime alimentaire. Le fossile est associé à des coprolithes de coléoptères (des boulettes fécales fossiles), qui fournissent un aperçu très inhabituel mais important du régime alimentaire des coléoptères floraux à ailes courtes durant le crétacé.
Un dernier repas fleuri
Les boulettes fécales fossiles sont entièrement composées de pollen, du même type que celui que l’on trouve en grappes autour du coléoptère et attaché à son corps, ce qui suggère que les Pelretes fréquentaient les angiospermes pour se nourrir de leur pollen. Cette découverte établit donc un lien direct entre les premières plantes à fleurs du crétacé et leurs insectes visiteurs ; elle montre que ces fossiles d’insectes n’ont pas été co-conservés avec le pollen de manière fortuite, mais qu’il existait une véritable association biologique entre les deux.
« Le pollen associé au coléoptère peut être attribué au genre fossile Tricolpopollenites. Ce groupe est attribué aux eudicots, un groupe vivant d’angiospermes dérivées, qui comprend les ordres Malpighiales et Ericales », explique le Dr LI Liqin, spécialiste des pollens fossiles au NIGPAS. « Cela montre que les pollinisateurs ont profité des premières angiospermes peu après leur diversification initiale et ont visité une gamme diversifiée de groupes au milieu du crétacé », écrivent les chercheurs dans leur document.