En 2017, l’équipe de l’Event Horizon Telescope (EHT) publiait la première image de la structure d’un trou noir supermassif. Mais au-delà de cette incroyable prouesse d’imagerie, les astrophysiciens ont également récolté de très nombreuses données sur la dynamique du trou noir M87*, notamment ses émissions de jets astrophysiques. Ces résultats ont été récemment publiés et devraient aider à mieux comprendre comment de tels jets se forment et son éjectés par les trous noirs.
Il y a deux ans, les astronomes de la collaboration Event Horizon Telescope ont dévoilé des images du trou noir supermassif M87*, situé à 55 millions d’années-lumière de la Terre et aussi massif que 6.5 milliards de Soleils. Au printemps 2017, alors que l’équipe EHT rassemblait certaines des données qui aboutiraient à l’image tant attendue, près de 20 autres télescopes puissants au sol et dans l’espace étudiaient également le trou noir.
Une nouvelle étude décrit cet énorme ensemble de données, qui contient des observations sur une large gamme de longueurs d’onde recueillies par le télescope spatial Hubble de la NASA, l’observatoire Chandra X-ray, l’observatoire Neil Gehrels Swift, le Nuclear Spectroscopic Telescope Array (NuSTAR) et Fermi Gamma Telescope, ainsi qu’un certain nombre d’autres instruments.
« Nous savions que la première image directe d’un trou noir serait révolutionnaire. Mais pour tirer le meilleur parti de cette image remarquable, nous devons savoir tout ce que nous pouvons sur le comportement du trou noir à ce moment-là, en observant sur tout le spectre électromagnétique », déclare Kazuhiro Hada, de l’Observatoire astronomique national du Japon.
Mieux comprendre la dynamique des jets astrophysiques
Ce comportement comprend l’émission de jets, des faisceaux de particules éjectés par le disque d’accrétion du trou noir. Les astronomes pensent que de tels jets sont la source des rayons cosmiques de haute énergie. Le nouvel ensemble de données rassemble les résultats de la campagne d’observation simultanée la plus intensive jamais entreprise sur un trou noir avec des jets. Ainsi, observer ce processus pourrait fournir des informations clés sur la dynamique des jets et les origines des rayons cosmiques, entre autres.
« Comprendre l’accélération des particules est vraiment essentiel pour notre compréhension de l’image de l’EHT ainsi que des jets astrophysiques, dans toutes leurs longueurs d’onde. Ces jets parviennent à transporter l’énergie libérée par le trou noir à des échelles plus grandes que la galaxie hôte, comme un énorme cordon d’alimentation. Nos résultats nous aideront à calculer la quantité d’énergie transportée et l’effet des jets du trou noir sur son environnement », explique Sera Markoff, astrophysicienne à l’Université d’Amsterdam.
Une nouvelle campagne d’observation pour l’EHT
L’EHT, qui relie les radiotélescopes du monde entier pour former un instrument virtuel de la taille de la Terre elle-même, devrait recommencer à observer le trou noir M87* cette semaine après une interruption de deux ans. Le projet ne recueille des données que pendant une courte fenêtre au printemps de l’hémisphère nord chaque année, lorsque le temps a tendance à être clément sur ses différents sites d’observation. Des problèmes techniques ont entravé la campagne de 2019, et celle de l’année dernière a été annulée en raison de la pandémie de coronavirus.
Comme les années précédentes, la nouvelle campagne EHT comprendra également des observations du trou noir supermassif au cœur de notre propre galaxie, la Voie lactée : un objet de 4.3 millions de masses solaires connu sous le nom de Sagittarius A*. Les nouvelles données pourraient être encore plus révélatrices, car l’EHT a récemment ajouté trois grands télescopes à son réseau : le télescope du Groenland, le télescope de 12 mètres de Kitt Peak en Arizona et le Northern Extended Millimeter Array en France.