Le célèbre homme d’affaires, PDG de Tesla et SpaceX, avait été choisi pour animer l’émission Saturday Night Live du samedi 8 mai, sur NBC. Lors du traditionnel monologue d’ouverture, il a révélé qu’il était atteint du syndrome d’Asperger. L’occasion pour lui de contribuer à déstigmatiser ce trouble du spectre autistique.
Bien qu’un minimum de fibre artistique soit généralement requis pour présenter le Saturday Night Live (SNL), c’est Elon Musk qui s’est livré à l’exercice samedi dernier ; il était évidemment très attendu dans ce rôle d’animateur. Il se confie aux téléspectateurs dès l’ouverture de l’émission : « En fait, j’entre dans l’histoire ce soir en tant que première personne atteinte du syndrome d’Asperger à animer le SNL — ou du moins la première personne à l’admettre », a-t-il déclaré.
Le syndrome d’Asperger est une forme d’autisme, qui se caractérise par des difficultés significatives dans les interactions sociales. Le milliardaire sud-africain en plaisante : « Donc, je n’aurai pas beaucoup de contact visuel avec les acteurs ce soir ». Ce trouble peut également être associé à des intérêts spécifiques ou des comportements répétitifs. Il se différencie des autres troubles du spectre autistique par l’absence de déficience intellectuelle.
« Vous pensiez que j’allais aussi être un mec normal ? »
Contrairement à ce qu’il affirme, Musk n’est pas la première personne atteinte du syndrome d’Asperger à animer le SNL : un ancien membre de l’émission, l’acteur Dan Aykroyd, a également confié qu’il était atteint de ce syndrome et a lui-même animé le SNL en 2003.
La révélation de Musk a tout de même « fait le buzz » ; elle montre les progrès considérables qui ont été réalisés en matière de déstigmatisation des troubles neuro-atypiques. Le fait qu’il ait abordé le sujet avec humour et légèreté a largement contribué à cette réussite. « Mais ne vous inquiétez pas, je suis assez doué pour exécuter « l’humain » en mode émulation », a-t-il plaisanté. Voici un aperçu de ses différentes interventions :
Plutôt désinvolte, à grand renfort d’autodérision, Musk s’est prêté au jeu. Il a commencé par souligner qu’il n’avait pas beaucoup de variations d’intonation dans sa façon de parler, ce qui, de son point de vue, « est une excellente comédie ». Il a plaisanté ensuite sur sa réputation de génie, de perturbateur, d’entrepreneur, ainsi que de partisan des tendances fragmentaires de l’économie numérique telles que les cryptomonnaies. « Parfois je dis ou tweete des choses bizarres. Mais c’est comme ça que mon cerveau fonctionne », résume-t-il.
Le milliardaire a également exposé sa vision du futur : il croit en une énergie future renouvelable, et pense que « l’humanité doit devenir une civilisation spatiale multiplanétaire ». Enfin, pour revenir sur son syndrome d’Asperger, il a déclaré : « J’ai réinventé les voitures électriques et j’envoie des gens sur Mars dans une fusée, vous pensiez que j’allais aussi être un mec normal ? ».
Il a par ailleurs évoqué le nom de son fils, X Æ A-XII, affirmant qu’il se prononçait « comme un chat courant sur un clavier ». Bien qu’il utilise lui-même Twitter pour faire ses annonces, il a également déploré la masse de discussions dont il faisait l’objet sur les réseaux sociaux, revenant sur cet « incident » en septembre 2018, où il avait été filmé en train de fumer du cannabis lors d’un podcast. « Les gens sont réduits à la chose la plus stupide qu’ils aient jamais faite », regrette-t-il. Il a alors (un peu maladroitement) comparé son cas à celui d’O.J. Simpson, dont le public ne retient « que » le fait qu’il soit un double meurtrier…
Il a également invité sa mère, Maye Musk, à venir sur le plateau, pour évoquer un souvenir d’enfance. « Tu te souviens quand j’avais 12 ans, j’ai créé mon propre jeu vidéo ? », lui a demandé son fils. « Je me souviens qu’ils t’ont payé 500 $. Tu étais trop jeune pour ouvrir un compte bancaire, alors j’ai dû en ouvrir un pour toi. […] Tu as transformé ce jeu vidéo sur l’espace en réalité », a-t-elle déclaré. Tous deux ne semblent toutefois pas très à l’aise et force est de reconnaître que l’échange manque un peu de spontanéité… Au moment de quitter la scène, Madame Musk ajoute un trait d’humour en évoquant son cadeau de fête des Mères à venir : « J’espère que ce ne sont pas des Dogecoins ». Après avoir grimpé toute la semaine précédant l’émission, la monnaie a d’ailleurs dégringolé ce samedi soir, perdant environ 30% de sa valeur ; dimanche, le Dogecoin s’échangeait autour de 40 cents.
Une intervention qui fait débat
À noter que Musk a été réprimandé par les régulateurs pour ses déclarations sur ses entreprises publiques dans des canaux inhabituels pour un PDG. Il a rétorqué que SNL était en direct et que cela représentait aussi un risque pour lui. « Je pourrais dire quelque chose de vraiment choquant, comme ‘je conduis une Prius’ », a-t-il plaisanté.
Blague à part, la présence de Musk dans cette émission de divertissement a suscité quelques réactions négatives. Les téléspectateurs, les critiques et même certains des membres de la distribution de l’émission semblaient remettre en question le choix de l’hôte. Aidy Bryant, qui fait partie de la troupe du Saturday Night Live depuis plusieurs années, a exprimé sa désapprobation en partageant un message du sénateur Bernie Sanders, qui dénonçait « l’obscénité morale » de la répartition des richesses en Amérique en précisant que « les 50 personnes les plus riches d’Amérique détiennent aujourd’hui plus de richesses que la moitié la plus pauvre de notre population ».
Marlow Stern, un rédacteur en chef du Daily Beast, a quant à lui vivement critiqué le monologue de Musk, le qualifiant de « trompeur et profondément maladroit ». « Musk déforme les faits en affirmant que les gens se sont surtout opposés à ses blagues idiotes sur Twitter », écrit-il. En réalité, les gens ont critiqué ses tweets antisyndicaux, mais aussi la fois où il a accusé sans aucune preuve un plongeur britannique d’être un pédophile (alors qu’il avait contribué au sauvetage d’enfants pris au piège dans une grotte thaïlandaise), où il s’est moqué des pronoms de genre (« un cauchemar esthétique » selon l’homme d’affaires), ou encore la fois où il a diffusé des informations erronées sur la COVID-19, explique le journaliste.
En résumé, Elon Musk est une personne complexe. Bien qu’il ait toujours des idées étonnantes et qu’il soit à l’avant-garde des technologies les plus innovantes, qui pourraient sans aucun doute bénéficier à toute l’humanité, il est aussi incroyablement problématique. Pas sûr que son syndrome d’Asperger puisse excuser toutes ses maladresses…