Et la manœuvre est impressionnante ! Conçu pour l’observation de l’Univers primitif, le télescope James Webb va prendre son envol cette année, au mois d’octobre, pour se positionner au point de Lagrange L2. En attendant, sur Terre, c’est l’heure des derniers tests et vérifications pour cet engin de très haute technologie. La NASA vient de se livrer à l’un des tests les plus importants : le déploiement de son miroir de 6,5 mètres de diamètre.
Le télescope James Webb — ainsi nommé en hommage au second administrateur de la NASA, James Edwin Webb — effectuera ses observations dans l’infrarouge proche et moyen, à des longueurs d’onde comprises entre 0,6 et 28 µm. Son miroir primaire d’environ 700 kg se compose de 18 éléments hexagonaux, ce qui permet de le replier sur lui-même pour le lancement et de le déployer une fois dans l’espace. « Une merveille technologique » pour Lee Feinberg, responsable des éléments optiques du télescope au Goddard Space Flight Center de la NASA.
Ce processus de déploiement était donc le test ultime à effectuer pour s’assurer que le télescope sera à même d’accomplir sa mission une fois lancé dans l’espace. La simulation était quasi conforme à la réalité : les commandes de déverrouillage et de déploiement ont été transmises depuis la salle de contrôle du télescope, à Redondo Beach, en Californie. Et un dispositif de compensation de gravité a permis de simuler l’apesanteur à laquelle sera soumis l’engin dans l’espace.
Le plus grand et le plus puissant des télescopes spatiaux
La manœuvre s’est déroulée avec succès. L’ensemble des 18 miroirs se sont correctement mis en place, prêts à observer le cosmos. « Les miroirs légers, les revêtements, les actionneurs et les mécanismes, l’électronique et les couvertures thermiques, une fois entièrement déployés, forment un miroir unique et précis qui est vraiment remarquable », précise Lee Feinberg dans un communiqué officiel.
À titre de comparaison, la surface du miroir est six fois plus grande que celle du miroir de Hubble, ce qui permettra au James Webb de capturer une image neuf fois plus rapidement ! Son pouvoir de résolution atteint 0,1 seconde d’arc dans l’infrarouge. La vidéo suivante, proposée par la NASA, vous permettra d’apprécier en détail cet engin de haute technologie :
Comme vous pouvez le constater sur ces images, ce miroir repose sur une mécanique complexe : pas moins de 132 actionneurs et moteurs contribuent à plier/déplier, déplacer et positionner les différents miroirs hexagonaux ! Car pour scruter l’Univers lointain, le miroir doit être si grand qu’il ne peut être transporté tel quel dans une fusée ; imaginer une structure composée de plusieurs éléments mobiles et pliables, digne d’une œuvre d’origami, était le seul moyen de l’envoyer dans l’espace.
Le dispositif a donc passé une longue série de tests permettant de s’assurer que le mécanisme résistera à son long séjour dans l’espace. La couverture thermique et le blindage conçus pour protéger les miroirs et les instruments contre les interférences étaient eux aussi en place pendant les différentes simulations. Cet ultime test de déploiement marque ainsi le point de contrôle final prévu par l’équipe. « Je suis particulièrement fière de nos équipes qui ont construit les miroirs de Webb […]. L’achèvement de ce dernier test sur ses miroirs est particulièrement excitant en raison de la proximité du lancement plus tard cette année », a déclaré Ritva Keski-Kuha, responsable adjointe des éléments optiques du télescope au centre Goddard.
Bientôt prêt à observer les premières galaxies de l’Univers !
Les segments du miroir sont composés de béryllium, un métal particulièrement résistant et léger, dont le coefficient de dilatation thermique est faible aux températures spatiales ; il a d’ailleurs déjà été utilisé sur d’autres télescopes spatiaux, tels que le Spitzer de la NASA. Le miroir du James Webb est par ailleurs recouvert d’une fine couche d’or, d’une centaine de nanomètres d’épaisseur, elle-même recouverte d’une mince couche de verre. L’or permet de réfléchir les ondes électromagnétiques de l’infrarouge proche et moyen de façon optimale.
Cette étape de pliage et dépliage achevée, les ingénieurs vont à présent s’atteler aux derniers tests du télescope, notamment le déploiement des deux échangeurs de chaleur chargés de refroidir l’observatoire ; il est également prévu de tester une dernière fois la tour déployable. Composée d’un matériau composite graphite-époxy pour assurer la stabilité et la résistance face aux changements extrêmes de température, cette tour est chargée de séparer les miroirs et les instruments du module de service (pour les isoler de la chaleur et des vibrations issus de ce dernier).
Le lancement du James Webb est prévu pour la fin octobre 2021. Il sera lancé par une fusée Ariane 5, depuis la base de Kourou, en Guyane. Une fois arrivé au point de Lagrange L2, à environ 1,5 million de kilomètres de la Terre, le télescope déploiera ses « ailes » et les différents actionneurs positionneront et inclineront chacun des 18 miroirs selon des instructions bien spécifiques. Ceci fait, l’engin sera prêt à sonder les origines mystérieuses de notre univers et de notre système solaire.