La Chine interdit tous les produits et services financiers liés aux cryptomonnaies

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| REUTERS/Dado Ruvic
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Malgré des premières mesures, émises en 2017, restreignant l’usage des cryptomonnaies, le marché avait pris de l’ampleur en Chine. Les régulateurs ont donc resserré d’un cran les restrictions : le pays interdit désormais à toute institution financière et société de paiement de fournir des services liés aux transactions de cryptomonnaies. L’annonce a provoqué un krach mondial.

Depuis 2017, les banques et sociétés de paiement en ligne chinoises n’ont pas le droit de proposer des services tels que l’ouverture de compte, l’enregistrement, la négociation, la compensation et la liquidation, liés aux cryptomonnaies. À cette liste s’ajoute désormais d’autres restrictions : il est notamment interdit d’accepter et d’utiliser les monnaies virtuelles comme moyen de paiement et de proposer l’échange de ces monnaies contre des yuans ou des devises étrangères.

Résultat : le Bitcoin, la cryptomonnaie la plus utilisée dans le monde, s’est effondré ; en une journée, il a perdu 30% de sa valeur et vaut à ce jour 32 000 euros (alors qu’il frôlait les 50 000 euros à la date du 8 mai). Plusieurs autres cryptomonnaies ont suivi la tendance : -25% pour l’Ethereum, -31% pour le Dogecoin, ou encore -49% pour le Binance Coin. La chute a provoqué un afflux d’ordres sur les plateformes dédiées, certaines ont même été forcées de bloquer une partie des retraits.

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Une menace pour la monnaie fiduciaire chinoise

Hier, l’une des plus grandes plateformes d’échanges, Binance, a ainsi annoncé sur son compte Twitter qu’elle bloquait temporairement les retraits d’ethereums pour cause de « congestion du réseau ». La faute à un communiqué émis par trois grandes fédérations bancaires du pays — la National Internet Finance Association of China, la China Banking Association et la Payment and Clearing Association of China — qui appellent à ne plus accepter ces monnaies virtuelles comme moyen de paiement. « Récemment, les prix de la cryptomonnaie ont monté en flèche et ont chuté, et le commerce spéculatif de la cryptomonnaie a rebondi, portant gravement atteinte à la sécurité des biens des personnes et perturbant l’ordre économique et financier normal », peut-on lire dans le communiqué, cité par Reuters.

Cela fait plusieurs années maintenant que la Chine lutte contre les cryptomonnaies. En septembre 2017, dans le but de protéger les investisseurs, le pays avait interdit tous les échanges nationaux de cryptomonnaies, ainsi que les initial coin offering (ICO, ou « offre de pièce initiale » en français) — qui consistent à effectuer une levée de fonds via l’émission d’actifs numériques (des tokens) échangeables contre des cryptomonnaies. Cette décision avait largement perturbé le marché mondial des monnaies virtuelles : à l’époque, le pays représentait 90% des échanges mondiaux de bitcoins !

Suite à ces premières mesures, la plupart des plateformes de négociation avaient fermé leurs portes, pour s’installer à l’étranger. Dès lors, de nombreux investisseurs chinois ont continué à utiliser ces plateformes délocalisées, notamment Huobi et OKEx, pour gérer leurs actifs virtuels. Ainsi, le marché chinois des cryptomonnaies a bénéficié d’un regain d’activité. Les cryptomonnaies ont fini par constituer une menace pour la monnaie fiduciaire chinoise, le yuan, ce qui a conduit les régulateurs à élargir les restrictions.

Le récent communiqué indique ainsi que les établissements financiers ne doivent plus accepter les monnaies virtuelles et « ne doivent pas fournir de services d’épargne, de trusts ou de nantissement de cryptomonnaie, ni émettre de produits financiers liés à la cryptomonnaie ». Les banques ont par ailleurs été invitées à surveiller plus étroitement les flux d’argent impliqués dans le commerce des monnaies virtuelles et à se coordonner pour mieux identifier les risques. Ces nouvelles mesures rendent l’achat de cryptomonnaies plus difficile pour les particuliers et menacent l’activité des mineurs, qui peineront à échanger leurs actifs contre des yuans.

Un yuan numérique pour mieux contrôler les flux

Dans ce contexte, il se trouve que la Banque populaire de Chine a décidé de lancer sa propre monnaie numérique, nommée Digital Currency Electronic Payment (DCEP). « L’utilisation de l’argent liquide diminue. Finalement, il sera remplacé par quelque chose au format numérique », a déclaré à CNBC Yan Xiao, chef de projet pour le commerce numérique au Forum économique mondial. Le vice-gouverneur de la Banque populaire de Chine, Fan Yifei, avait déclaré par ailleurs que la production et le stockage des espèces représentaient un coût élevé.

Une autre raison d’être de ce yuan numérique est d’accroître la concurrence dans le secteur des paiements numériques, actuellement dominé par Alipay (géré par Alibaba) et WeChat Pay (géré par Tencent). Cette monnaie fait donc actuellement l’objet de plusieurs tests, notamment à Shenzhen, Chengdu et Suzhou. La plateforme de commerce en ligne JD.com a elle aussi été sollicitée pour les essais, en offrant aux clients la possibilité d’acheter des produits en yuans virtuels. Il suffit d’installer l’application de portefeuille électronique sur son smartphone et d’y associer son compte bancaire.

Si cette nouvelle monnaie est définitivement et largement adoptée, toutes les transactions seront complètement traçables, comme l’explique Xu Yuan, chercheur principal au Centre de recherche sur la finance numérique de l’Université de Pékin : « En théorie, après le lancement du yuan numérique, il n’y aura aucune transaction que les autorités de régulation ne pourront pas voir ». Le principe s’oppose donc complètement aux cryptomonnaies, qui reposent sur un réseau informatique décentralisé et des technologies de cryptographie, qui confèrent à leur propriétaire un certain anonymat.

En résumé, la Chine semble vouloir écarter complètement les cryptomonnaies de son paysage financier pour mettre en avant sa propre monnaie numérique sur laquelle elle aurait un contrôle absolu. Pour Winston Ma, professeur adjoint à la NYU Law School, Pékin pourrait ne pas en rester là et déployer bientôt de nouvelles règles ciblant les actifs cryptographiques eux-mêmes.

Source : Reuters

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