Après la réussite du premier vol d’essai à haute altitude du Starship, accompli au mois de mai, la société spatiale dirigée par Elon Musk se prépare à envoyer son vaisseau en orbite. Le premier prototype du Super Heavy, le lanceur super lourd spécialement conçu pour cette manœuvre, vient d’être mis en place sur son pas de lancement, comme en témoignent les images publiées par Elon Musk sur son compte Twitter.
Les images et les vidéos partagées par le PDG cette semaine montrent le propulseur « Booster 4 » en train d’être déplacé vers le support de lancement orbital de SpaceX. Au cours du week-end dernier, les ingénieurs ont installé un nombre impressionnant de 29 moteurs Raptor à la base de cette fusée, de près de 70 mètres de hauteur et de 9 mètres de diamètre. Surmonté du Starship, l’engin atteindra une hauteur totale d’environ 120 mètres.
Jusqu’à présent, le Starship n’a accompli que des vols de haute altitude, n’excédant pas dix kilomètres. Il s’agira cette fois-ci de l’emmener en orbite basse, à plusieurs centaines de kilomètres, ce qui nécessite une poussée bien plus importante — estimée à 72 MN selon SpaceX — que celle mise en œuvre lors des précédents vols d’essai (le Starship était alors propulsé par trois moteurs Raptor, optimisés pour le vol atmosphérique).
Une construction ultra rapide
La vitesse à laquelle les projets de SpaceX avancent est souvent spectaculaire. Le développement du prototype Booster 4 en est un nouvel exemple. Les ingénieurs de la société ont installé les 29 moteurs à la base de l’engin en un temps record, quasiment du jour au lendemain (à noter que 33 moteurs sont prévus pour la configuration finale). Le Super Heavy se trouve désormais sur le site de lancement.
La société doit à présent effectuer plusieurs tests techniques de son lanceur (des tests de pression et de résistance au feu notamment), qui seront sans aucun doute très minutieux compte tenu de la puissance de cette fusée. Parallèlement, SpaceX a quasiment achevé la construction du S20, le dernier prototype du Starship, qui sera placé sur le lanceur afin d’obtenir le système Starship au complet. Pour rappel, ce dernier sera entièrement réutilisable, ce qui réduira considérablement les coûts de lancement ; l’engin est donc voué à remplacer tous les véhicules spatiaux de SpaceX.
Selon un document déposé auprès de la Federal Communications Commission, il est prévu que le premier vol orbital dure 90 minutes environ : le lanceur et le vaisseau devraient se séparer environ 170 secondes après le décollage, puis le Super Heavy tentera d’amerrir dans le golfe du Mexique. Le Starship devrait quant à lui continuer son voyage en orbite, pour finir par atterrir « en douceur » à environ 100 kilomètres au large de la côte nord-ouest de Kauai, dans l’archipel d’Hawaï.
Il est clair que SpaceX a travaillé d’arrache-pied pour accélérer le développement de son lanceur super lourd et ainsi pouvoir tester la mise en orbite du Starship au plus vite. Mais avant cela, le projet doit passer l’examen d’évaluation de la Federal Aviation Administration (FAA), qui vise à déterminer si les installations de lancement orbital de la société sont bien conformes aux normes environnementales. De cet examen dépend évidemment l’approbation des vols d’essai.
Un impact environnemental qui pourrait retarder le lancement
La FAA avait bien achevé une évaluation environnementale de la zone en 2014, mais cet examen était alors spécifique à la série de fusées Falcon de SpaceX, beaucoup plus petites que les engins construits aujourd’hui par la société. Un porte-parole de la FAA avertissait ainsi le mois dernier que « l’examen environnemental pourrait recommander de démonter la tour de lancement ».
La procédure sera donc sans doute délicate, d’autant plus que les relations entre SpaceX et l’organisme de régulation sont quelque peu tendues ; en effet, à plusieurs reprises, la société d’Elon Musk a initié des tests de prototypes avant même d’avoir obtenu le feu vert de la FAA… En outre, une fois qu’une ébauche de cette évaluation sera rendue publique, elle sera ouverte aux commentaires du public pour une période minimale de 30 jours. Ce n’est qu’à l’issue de cette période que la FAA décidera si des travaux supplémentaires sont nécessaires ou non pour que le site soit conforme aux normes environnementales.
Finalement, il y a peu de chance que la FAA donne son feu vert au vol d’orbital avant cet automne, voire plus tard encore. Elon Musk sera-t-il capable de patienter tout ce temps ? Selon Ars Technica, il semblerait que SpaceX ait tout de même recruté pas mal de personnel, puis demandé à des centaines d’employés de son siège social et d’autres filiales de rejoindre le site de Boca Chica pour terminer l’installation du site de lancement et l’assemblage du Super Heavy. En achevant au plus vite le système Starship, Elon Musk pourrait bien inciter la FAA à accélérer le processus réglementaire — et ce, avec l’appui de la NASA et du Département américain de la Défense, qui ne souhaiteraient certainement pas voir « leur nouveau jouet » sur le banc de touche.