La quasi-totalité des panneaux photovoltaïques repose aujourd’hui sur des cellules en silicium mono- ou polycristallin, qui utilisent de l’argent pour conduire l’électricité. Problème : l’argent est cher (plus de 650 € le kilo actuellement) et se fait de plus en plus rare, ce qui ne fera qu’augmenter encore les prix. L’entreprise australienne SunDrive a donc eu l’idée de remplacer l’argent par du cuivre. Non seulement cette alternative fonctionne, mais elle a permis aux cellules solaires d’atteindre un nouveau record mondial d’efficacité (plus de 25%) — pour des panneaux commerciaux !
Le photovoltaïque a été développé dans un but écologique — les énergies renouvelables étant préférables aux énergies fossiles — mais la plupart des panneaux solaires conçus aujourd’hui reposent sur une ressource limitée : l’argent. À l’échelle mondiale, on estime que la fabrication d’énergie solaire représente 20% de la consommation industrielle annuelle totale d’argent dans le monde. En outre, l’extraction de l’argent contenu dans les minerais produit des émissions notables de CO2. Le cuivre, en revanche, est beaucoup plus abondant (68 ppm vs. 0,005 ppm dans la croûte terrestre) et environ 100 fois moins cher que l’argent (soit 8 € le kilo environ).
En 2015, la société SunDrive s’est donc lancé le défi de remplacer l’argent des cellules solaires par du cuivre, afin d’améliorer les perspectives à long terme de la technologie. Dans les années à venir, dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique, la demande en panneaux photovoltaïques va probablement rapidement augmenter ; il était donc urgent de proposer une alternative plus accessible en matière de coûts et plus durable.
Un record d’efficacité supérieur à celui des leaders du secteur
Le premier concept de cellule solaire au silicium à base de cuivre a été développé par Vince Allen, dans un garage de Sydney, dans le cadre de son projet de doctorat à l’Université de Nouvelle-Galles du Sud. Allen et son collaborateur, David Hu, lui aussi diplômé de l’UNSW Business School, ont ensuite lancé SunDrive dans l’espoir de commercialiser leur invention ; la première cellule solaire de taille industrielle à base de cuivre a ainsi vu le jour en 2019. Puis, en octobre 2020, la startup reçoit un financement de 3 millions de dollars de la part de l’Agence australienne des énergies renouvelables pour faire avancer le développement commercial de son dispositif.
Les cellules de taille commerciale conçues par SunDrive ont récemment été testées à l’Institut de recherche sur l’énergie solaire Hamelin, en Allemagne, qui a décerné à l’équipe la certification du nouveau record mondial d’efficacité ! En effet, les tests réalisés ont non seulement prouvé que le cuivre était un métal alternatif fiable, mais qu’il pouvait amener la technologie sur de nouveaux terrains : les cellules au cuivre ont atteint une efficacité de 25,54%, dépassant de peu le précédent record mondial d’efficacité de 25,26%, détenu par le chinois LONGi Solar — premier fabricant mondial de modules solaires monocristallins.
Si la fabrication de panneaux solaires représente aujourd’hui près de 20% de la consommation annuelle mondiale d’argent, ce nombre devrait rapidement augmenter, car la prochaine génération de cellules à haut rendement, actuellement en cours de développement, nécessite jusqu’à trois fois plus d’argent que leurs prédécesseurs ! Le cuivre est légèrement moins conducteur d’électricité que l’argent et adhère moins bien à la surface de la cellule solaire, mais il semble qu’Allen et Hu aient trouvé le moyen de contourner le problème.
Une ressource abondante et plus facile à recycler
C’est la première fois qu’une cellule de taille commerciale, reposant sur autre chose que l’argent, accomplit de telles performances. « Je pense que cela pourrait vraiment changer la donne pour l’industrie. […] Afin de limiter le réchauffement climatique, nous devrons installer des térawatts de panneaux solaires. Cela nécessitera beaucoup de métal » souligne Alison Lennon, professeure en ingénierie photovoltaïque à l’Université de Nouvelle-Galles du Sud et conseillère SunDrive. Or, le cuivre est une ressource plus abondante, moins chère, mais aussi plus facile à recycler. En d’autres termes, c’est le matériau parfait pour cet usage.
C’est un peu l’histoire de « David contre Goliath » dans le secteur des panneaux solaires et grâce à ce nouveau record du monde d’efficacité, le projet de SunDrive a fini par susciter l’intérêt de l’industrie photovoltaïque chinoise. « Personne n’aurait jamais pensé que ces gars seraient en mesure de battre ce record du monde, d’autant plus que les Goliaths de l’industrie ont consacré beaucoup d’argent à ce problème sans atteindre ce résultat », ajoute Lennon.
Aujourd’hui, le solaire ne représente que 3% de la production mondiale d’électricité. Une efficacité accrue signifie qu’il est possible de générer plus de puissance, donc plus d’électricité, pour une même surface. Et avec ce record du monde, le professeur Lennon affirme que SunDrive a réellement le potentiel de changer l’industrie des panneaux solaires, tant pour les producteurs que les consommateurs. « Si les fabricants peuvent désormais utiliser cette technologie pour produire de l’électricité à un coût par watt bien inférieur, alors cela sera répercuté sur le consommateur », conclut-elle.