Selon une nouvelle enquête impliquant plus de 88 000 études liées au climat, publiées entre 2012 et 2020, plus de 99,9% des articles scientifiques évalués par des pairs s’accordent à dire que le changement climatique est principalement causé par les activités de l’Homme. Ce résultat vient confirmer les conclusions d’une étude similaire réalisée en 2013, qui évaluait le consensus à 97%.
L’étendue du consensus scientifique sur le changement climatique d’origine humaine est d’un grand intérêt pour la société. En effet, certaines personnes continuent de croire que l’augmentation des températures, la fonte des glaces, la multiplication des ouragans, des incendies et des inondations, ne sont que le fruit d’une évolution « naturelle » du climat sur laquelle nous n’aurions aucune influence. Or, s’il subsiste le moindre doute quant à notre responsabilité dans cette situation, les arguments en faveur de l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre auront nécessairement moins de poids.
« Il est essentiel de reconnaître le rôle principal des émissions de gaz à effet de serre afin de pouvoir mobiliser rapidement de nouvelles solutions, car nous assistons déjà en temps réel aux impacts dévastateurs des catastrophes liées au climat sur les entreprises, les personnes et l’économie », a déclaré Benjamin Houlton, professeur d’écologie et de biologie évolutive à l’Université Cornell et co-auteur de l’étude.
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Un climatoscepticisme dépendant nettement de l’orientation politique
De nombreux efforts ont été déployés au fil des ans pour quantifier l’étendue du consensus scientifique sur le changement climatique anthropique. L’enquête précédente portait sur des études publiées entre 1991 et 2012 ; le consensus de 97% qui en est ressorti, largement couvert par les médias en 2013, avait déjà eu un impact notable sur la prise de conscience mondiale. La présente enquête examine la littérature publiée de 2012 à novembre 2020, soit 88 125 articles sur le climat au total.
Les chercheurs ont commencé par examiner un échantillon aléatoire de 3000 articles à partir de cette base. Ils ont découvert que seuls quatre d’entre eux étaient sceptiques quant au changement climatique d’origine humaine, un résultat qui a surpris l’équipe. « Nous savions que [les articles sceptiques sur le climat] étaient extrêmement faibles en matière d’occurrence, mais nous pensions qu’il devait encore y en avoir plus dans les 88 000 », a déclaré Mark Lynas, membre de l’Alliance for Science et premier auteur de l’étude. Avec un consensus désormais supérieur à 99%, il est désormais indéniable que les activités humaines modifient le climat.
Pourtant, les sondages d’opinion montrent que la cause réelle du changement climatique est toujours sujette à débat, notamment aux États-Unis. En 2016, une enquête du Pew Research Center a révélé que de nombreuses personnes sont sceptiques face aux opinions des climatologues : seulement 27% des adultes américains pensaient que « presque tous » les climatologues s’accordaient à dire que le changement climatique est dû à l’activité humaine.
Il apparaît que contrairement à d’autres domaines scientifiques (médecine, agroalimentaire), ces avis varient fortement selon l’orientation politique. Un sondage Gallup publié en avril 2021 a révélé que depuis 2001, l’écart se creuse de plus en plus entre démocrates et républicains sur la question de savoir si le réchauffement climatique est causé ou non par les humains.
Parmi les politiciens américains élus, la division est tout aussi nette : selon le Center for American Progress, il y avait 139 élus au 117e Congrès (séance en mars 2021), dont 109 représentants et 30 sénateurs, « qui refusent de reconnaître les preuves scientifiques du changement climatique causé par l’homme ». Ces mêmes 139 élus négationnistes du climat ont reçu plus de 61 millions de dollars de contributions de la part des industries du charbon, du pétrole et du gaz.
Une question désormais « complètement réglée »
Les tentatives précédentes pour quantifier le consensus sur le changement climatique ont utilisé de nombreuses méthodologies différentes. Pour réaliser cette nouvelle étude, l’équipe a utilisé la même méthodologie que celle utilisée lors de l’enquête de 2013, avec quelques améliorations importantes. Ils ont commencé par effectuer une première recherche avec les mots-clés : « climate change », « global climate change » et « global warming ». La première expression n’avait pas été utilisée en 2013 ; elle a été ajoutée ici car dans le cas contraire, la majorité des articles sceptiques n’auraient pas été retournés par la requête, expliquent les chercheurs.
Pour identifier autant d’articles climatosceptiques que possible dans l’ensemble de données, ils ont également créé un algorithme capable de repérer les mots-clés typiques de ce genre d’articles, tels que « solaire », « rayons cosmiques » et « cycles naturels ». L’algorithme a été cette fois appliqué aux 88 125 articles (y compris à l’échantillon de 3000 articles), puis le programme les a ordonnés afin que les plus sceptiques apparaissent en haut du classement.
Parmi les 1000 études que le logiciel de correspondance de mots-clés a identifiées comme étant les plus susceptibles d’être climatosceptiques sur l’ensemble de données, les chercheurs ont retenu, après examen manuel, 28 articles étant implicitement ou explicitement sceptiques, tous publiés dans des revues mineures ; un seul de ces articles était déjà apparu dans l’échantillon de 3000 items. Avec 31 articles aux conclusions climatosceptiques sur 88 125, « nous pouvons dire que le consensus sur le changement climatique anthropique (ACC) est d’au plus 99,966% », résument les chercheurs.
Si le résultat de 97% de l’étude de 2013 laissait encore planer le doute, ces résultats dissipent aujourd’hui toute incertitude, a déclaré Lynas. « Cela devrait être le dernier mot », a-t-il ajouté. « Cette question a été complètement réglée, et la réalité de l’ACC n’est pas plus controversée parmi les scientifiques que ne l’est la tectonique des plaques ou l’évolution », concluent les chercheurs.