Prévu à l’origine pour aujourd’hui, le 24 décembre (après avoir été reporté une première fois), le lancement tant attendu du télescope James Webb a finalement été différé à demain en raison de mauvaises conditions météorologiques (des vents de haute altitude au niveau du site de lancement de Kourou). Il se trouve pour l’instant à bord de la fusée Ariane 5, prêt à décoller. Le lancement est prévu au plus tôt pour 12h20 UTC (soit 13h20 en France) ; la fenêtre de lancement durera une trentaine de minutes au total. Encore quelques heures de patience seront donc nécessaires avant d’assister à cet événement majeur.
Le télescope spatial James Webb est un observatoire spatial conçu par la NASA, en collaboration avec l’Agence spatiale européenne et l’Agence spatiale canadienne. Il est destiné aux observations dans l’infrarouge proche et moyen (et dans une partie de la lumière visible) ; la taille de son miroir principal (6,5 mètres de diamètre), ainsi que les résolutions angulaire et spectrale de ses instruments, permettront de collecter des images avec une rapidité et une précision sans précédent. C’est pourquoi les astronomes du monde entier attendent avec impatience sa mise en service.
« Personnellement, je ne peux pas croire que le jour est presque arrivé. Je suis tellement excitée pour le lancement ! », a déclaré Amber Straughn, scientifique adjointe du projet Webb pour les communications, sur le blog du projet. L’instrument a été conçu pour étudier plus avant l’Univers primitif, en particulier la composition des premières étoiles, et pour récolter davantage de données sur l’évolution des galaxies. Il devrait également permettre de caractériser d’autres systèmes planétaires et rechercher les éléments propices à l’apparition de la vie sur ces autres mondes.
Un mois d’angoisse à venir
Pour l’équipe du projet, c’est l’aboutissement de plusieurs décennies de travail — le développement du télescope ayant officiellement démarré en 1989. « Comme pour la plupart des projets extraordinaires qui sont transformateurs, il y a eu des ralentisseurs, il y a eu des revers en cours de route », reconnaît Bill Nelson, administrateur de la NASA. Le projet a en effet subi divers aléas de par les défis technologiques inhérents à cet instrument hors normes. Celui-ci est doté d’un gigantesque miroir de plus de six mètres de diamètre, ainsi que d’un immense bouclier thermique (de 22 mètres sur 12) destiné à protéger les instruments de la chaleur du Soleil. Tous deux seront repliés sur eux-mêmes au moment du lancement et seront progressivement déployés au cours du transit du télescope vers sa destination.
C’est au point de Lagrange L2, situé à environ 1,6 million de kilomètres de la Terre, que sera positionné le puissant télescope spatial. Durant tout le trajet, qui durera environ un mois, le bouclier thermique protégera le miroir primaire du Soleil, dont la chaleur pourrait entraîner une déformation de surface qui compromettrait la réussite de la mission. C’est donc un mois particulièrement éprouvant qui se profile à l’horizon pour l’équipe du projet, tant les procédures à venir sont complexes — l’ensemble de la procédure comprend plus de 300 étapes ! « À l’exception des deux premiers déploiements effectués juste après la séparation du vaisseau spatial, tous nos déploiements seront contrôlés par l’homme », a précisé Amber Straughn.
Le risque qu’un dysfonctionnement survienne n’est jamais nul. Mais les multiples tests réalisés sur Terre augurent toutefois que le voyage devrait se dérouler sans accroc. Thomas Zurbuchen, administrateur associé des missions scientifiques de la NASA, a déclaré lors de la conférence de presse du 20 décembre qu’il était particulièrement confiant et que toute l’équipe se rendra sur le pas de tir pour assister au lancement. « Des tests rigoureux nous permettent de nous asseoir ici et de nous dire que nous avons fait le travail nécessaire pour aller jusqu’au lancement », a-t-il affirmé.
Un événement à suivre en direct dès demain midi
À savoir que lors de la phase de définition du projet, l’estimation du coût de développement du télescope spatial oscillait entre 1 et 3,5 milliards de dollars (pour un lancement prévu entre 2007 et 2011). En octobre 2021, le coût total du télescope spatial est finalement estimé à 9,7 milliards de dollars, dont 8,8 milliards ont été consacrés au développement du télescope et 861 millions seront dédiés aux diverses opérations propres à la mission principale, qui devrait prendre fin en 2026.
Mais l’investissement est justifié : le James Webb a un énorme potentiel scientifique et beaucoup d’espoir repose sur lui. « Il s’agit d’une mission extraordinaire. C’est un exemple brillant de ce que nous pouvons accomplir lorsque nous rêvons en grand », a souligné Nelson. Ce télescope permettra d’étudier chaque phase de l’histoire cosmique, depuis l’intérieur de notre système solaire aux galaxies les plus lointaines de l’Univers primitif. Il pourrait également déceler les toutes premières traces de vie extraterrestre. De nombreuses équipes d’astronomes à travers le monde comptent sur lui pour approfondir leurs recherches — et toutes aussi nombreuses seront donc les personnes à retenir leur souffle pendant un mois, jusqu’à ce que le télescope soit en place.
La diffusion du lancement commencera à 12h00 UTC+1 (heure française) le 25 décembre et sera accessible, entre autres, depuis le site de NASA Television, le site web de l’agence, ainsi que sur sa chaîne YouTube. Il est également possible de rejoindre l’événement Facebook dédié pour suivre le lancement en direct et interagir avec les autres spectateurs. La NASA a par ailleurs prévu de tenir une conférence de presse environ 30 minutes après la fin de la diffusion.