Processus bioénergétique non exclusif aux végétaux, la photosynthèse est utilisée par de nombreuses bactéries, comme les « bactéries pourpres » (un type de protéobactérie phototrophe). Pourtant, la structure interne de Gemmatimonas phototrophica — qui vit dans le désert de Gobi — est unique en son genre. Son architecture compacte, stable et robuste, s’avère très efficace pour absorber et piéger l’énergie solaire. Une possibilité de développer la biologie synthétique à énergie solaire ?
La photosynthèse signifie littéralement « synthèse [de matière organique] par la lumière » et correspond à la captation de l’énergie lumineuse provenant du soleil et à son stockage sous forme de matière organique. Les végétaux et les bactéries photosynthétiques produisent alors leurs propres composants à partir de l’énergie solaire (ils sont autotrophes) et alimentent la plupart des écosystèmes de la planète.
L’appareil photosynthétique relativement simple des phototrophes à base de bactériochlorophylle est formé d’un centre de réaction entouré d’un anneau interne capable d’absorber la lumière du soleil à 868 nm. De plus petits anneaux externes sont parfois présents, mais un anneau supplémentaire a été trouvé chez Gemmatimonas phototrophica, dont la structure est de fait plus grande que les autres complexes photosynthétiques. Ce nouvel anneau ajoute des bandes d’absorption de 800 et 816 nm à celle de l’anneau intérieur.
Un complexe stable et efficace pour absorber la lumière
« L’architecture du complexe est très élégante, un véritable chef-d’œuvre de la nature », a déclaré dans un communiqué Michal Koblizek, de l’Institut de microbiologie de l’Académie des sciences de la République tchèque. « Il présente non seulement une bonne stabilité structurelle, mais aussi une grande efficacité de récolte de la lumière ». En détail, la lumière captée est acheminée vers les « chromophores » (au centre), l’équivalent de la chlorophylle chez les plantes.
C’est le début de la photosynthèse : ces chromophores excités par la lumière transfèrent leurs électrons le long d’un chemin qui entraîne les atomes d’eau dans une série de réactions qui utilisent le dioxyde de carbone pour produire des sucres. La lumière permet de maintenir les molécules de sucre entre elles, véritable complexe que nous-mêmes pouvons décomposer pour produire notre énergie.
Même si le centre de réaction de G. phototrophica est assez similaire aux protéobactéries, son architecture reste unique. En revanche, la construction de cette structure de photosynthèse nécessiterait plus d’énergie que d’autres types plus connus, expliquent les chercheurs. « Cela pourrait être compensé par son extraordinaire stabilité, et la robustesse du complexe représente probablement un avantage évolutif ». Pu Qian, biologiste structurel de l’Université de Sheffield, ajoute : « Cette étude structurelle et fonctionnelle a des implications passionnantes, car elle montre que G. phototrophica a fait indépendamment évoluer sa propre architecture compacte, robuste et très efficace pour récolter et piéger l’énergie solaire ».
G. phototrophica a été isolée d’un lac d’eau douce dans le désert de Gobi. Cette bactérie a acquis sa capacité de photosynthèse par un transfert horizontal de gènes à distance d’une protéobactérie phototrophe (un type de bactérie ancestrale et complètement différente). Un bon exemple de transfert de la phototropie à un hôte non phototrophe à la base.
Cet épisode intrigant de l’évolution est défini par les chercheurs comme pertinent pour la biologie synthétique et pour reprogrammer une bactérie hétérotrophe — capable de produire de la matière organique uniquement à partir de sources de carbone organique et qui n’utilise pas l’énergie solaire — en une bactérie autotrophe.