Dans l’industrie des casinos en ligne, le Canada est devenu un acteur important. Le pays affiche une valeur globale de près de 30 milliards de dollars canadiens par an. Selon les spécialistes, ce chiffre va encore augmenter les années à venir. De plus, les joueurs optent désormais pour les casinos en ligne plutôt que les casinos physiques, comportant de nombreuses possibilités sécurisées de paiements. L’impact financier pour l’État est-il comparable entre ces deux types de casinos, quand le métavers modifie profondément l’expérience du jeu ?
Les jeux d’argent sont intimement liés à l’évolution de l’Homme. Chaque époque a connu ses jeux de prédilection, permettant à l’Homme de décupler ses richesses (ou non), ce qui les rend indissociables de l’économie d’une société. Existant depuis plus de 5000 ans, les premiers jeux d’argent ont été découverts lors de fouilles archéologiques, réalisées dans les vestiges de la Chine ancienne et de l’Ancienne Babylone. La nature humaine incite l’Homme à jouer : provoquer le hasard et la chance, jouer les probabilités, miser de l’argent, prendre des risques, etc. L’Homme est joueur ! Les innovations technologiques ont de ce fait été liées très vite à l’univers du jeu, facilitant l’accès et le rendant de plus en plus attractif, à l’image du métavers.
Le terme de métavers est utilisé pour décrire la vision qui sous-tend les développements en cours des univers virtuels 3D totalement immersifs. Un univers virtuel 3D, ou monde virtuel, est un environnement créé artificiellement à l’aide de programmes informatiques, hébergeant une communauté d’utilisateurs présents sous forme d’avatars et pouvant s’y déplacer, y interagir socialement et parfois économiquement. L’attractivité de ces nouveaux mondes virtuels tend à accroître l’addiction à ces jeux d’argent en ligne.
Prenons l’exemple du Canada et plus particulièrement le Québec, pour illustrer cet engouement. Les revenus du casino en ligne de Loto-Québec ont augmenté de 132% ou 60 millions au premier semestre de 2020-2021, par rapport à la même période l’année précédente. Au Québec comme dans d’autres provinces canadiennes, les joueurs accèdent de plus en plus aux jeux d’argent et de hasard via des plateformes numériques. Cet engouement a été accéléré par la pandémie de COVID-19, mais de nombreux joueurs semblent garder leurs habitudes.
Des innovations technologiques au service des jeux en ligne
En effet, les possibilités presque infinies qu’offre le numérique et l’informatique dans le développement rapide des jeux mobiles ont permis aux promoteurs des casinos en ligne et, en l’occurrence ceux situés au Québec, d’offrir au public une diversité de jeux des plus traditionnels aux plus contemporains. Le monde du casino virtuel est dominé par une multitude de jeux, dont les plus pratiqués sont les machines à sous pouvant avoir jusqu’à 5 rouleaux, mais aussi le blackjack, le poker, la roulette à 37 numéros et les jeux de grattage qui se sont digitalisés.
L’industrie du jeu en ligne cherche continuellement à personnaliser les plateformes et les expériences de jeu, selon le profil du joueur en enregistrant des données sur son comportement et sa localisation. C’est ce qui transparait dans les casinos en ligne liés au métavers. L’utilisation d’avatars pouvant interagir avec le monde virtuel du casino, comporte un certain nombre d’informations personnelles permettant à la plateforme de jeu de rendre cette expérience de jeu unique, voire addictive. En effet, l’autre avantage des casinos en ligne, participant à leur succès, est leur disponibilité temporelle : tous les jours et à toute heure.
Il existe encore d’autres raisons qui poussent les joueurs vers les jeux en ligne. En effet, le système blockchain, le Bitcoin et les monnaies numériques s’immiscent dans ces jeux. C’est ainsi qu’il est désormais possible aux joueurs de bénéficier d’une option de paiement sûre, pour déposer et encaisser de l’argent sur internet. Notons également que la confidentialité totale est assurée pour toutes ces opérations.
Le développement des paiements en ligne est lié pour l’essentiel, à l’évolution des technologies informatiques. Elles ont entraîné l’émergence de nombreux outils numériques performants dans l’univers de la banque et des jeux en ligne.
C’est en 1984 que les paiements en ligne, liés au jeu, font leur apparition avec l’acceptation des cartes de débit. Au départ, ces cartes ne sont tout d’abord acceptées que comme méthodes de paiements pour les dépôts. Leur popularité et leur sécurité amèneront par la suite les casinos virtuels à accorder la possibilité aux joueurs de s’en servir pour retirer leurs gains après une victoire. Actuellement, la plupart des casinos virtuels utilisent la quasi-totalité des méthodes de paiements proposées par les banques classiques et les banques en ligne : cartes de crédit, cartes de débit, portefeuilles électroniques, virement bancaire, cryptomonnaies.
Par exemple, associée au compte en banque, la carte de crédit permet de déposer de l’argent instantanément sur le compte casino avant de jouer. Le virement bancaire quant à lui, permet de transférer des fonds directement du compte en banque vers celui du casino en échangeant les détails du compte, sans l’intermédiaire de la carte.
Le portefeuille électronique est un système ou une application dans lequel sont stockées des données personnelles et des données bancaires. Lors d’un paiement en ligne, il suffit de saisir un identifiant et un mot de passe, souvent complétés par un dispositif d’authentification forte. L’avantage réside dans la possibilité de ne pas saisir ses coordonnées complètes à chaque transaction, de ne pas donner directement au casino son numéro de carte bancaire.
Enfin, le Bitcoin est la monnaie virtuelle la plus utilisée au monde et l’une des rares à être acceptée par de nombreux sites de paris en ligne. Globalement, le traitement des transactions en Bitcoin au casino s’effectue bien plus rapidement et cela implique aussi des frais réduits comparés aux autres solutions de paiement.
Une réglementation stricte induisant un impact économique fort
L’histoire de la régulation des jeux de hasard et d’argent au Québec a oscillé entre la condamnation morale et l’acceptation au nom de la charité ou d’intérêts pécuniaires. Les autorités ont à différents moments légalisé, fermé les yeux, ou interdit le jeu.
Pour assurer la sécurité du marché virtuel, les jeux virtuels en ligne sont régis par des dispositions légales. Chaque province est autorisée à créer sa propre législation sur les jeux de casinos en ligne. Par exemple, l’univers du casino en ligne au Québec est régi par Loto-Québec qui régularise la totalité des jeux en ligne de cette province. Seuls les Canadiens ayant 18 ans sont autorisés à jouer. Il faut préciser que les joueurs français ne sont pas acceptés dans ces casinos virtuels, conformément aux lois françaises. Ils ne peuvent utiliser que les plateformes françaises. Néanmoins, les sites de paris sportifs, de poker et de courses hippiques, domiciliés en dehors de la France, sont autorisés à les accepter.
Selon le Forum Économique Mondial, les risques liés à la cybersécurité font dorénavant partie des principaux risques globaux d’affaires. Les cas très médiatisés de vols de données survenus en 2019 ont eu pour conséquence une conscience accrue de cet enjeu au sein de la population. Loto-Québec se conforme aux plus hautes normes de gestion de risques et de sécurité par sa certification Norme de contrôle de sécurité de la WLA (World Lottery Association) renouvelée en 2019. La WLA regroupe près de 150 sociétés de loterie provenant de plus de 80 pays. Pour atteindre ce niveau supérieur de certification, Loto-Québec a démontré qu’ils intégraient à leurs activités quotidiennes les sept principes du jeu responsable adoptés par l’association, notamment la protection des clients et des groupes vulnérables, et l’information au public et aux joueurs.
En raison de tous ces dispositifs, les joueurs s’adonnent davantage aux jeux en ligne. Ceci constitue une grande partie de l’économie du pays avec des ressources financières importantes. La contribution de Loto-Québec au ministère des Finances s’élève à 432,6 millions de dollars pour l’année financière 2020-2021. Cet argent sert à financer les grandes missions de l’État, dont la santé, l’éducation et les infrastructures, ainsi qu’à rembourser la dette provinciale.
Un marché gris existe
L’impact des jeux en ligne est facilement visible quand on analyse les chiffres liés à l’arrêt de toutes activités physiques de casino, de paris sportifs, etc. lors de la COVID-19. Ainsi, selon la chaire de recherche sur l’étude du jeu de l’Université Concordia de Montréal, les mesures de confinement ont eu pour corollaire une migration des activités hors ligne vers les jeux d’argent en ligne. En réponse à la fermeture des nombreux établissements de jeu, plusieurs opérateurs ont effectué un virage numérique. Au Canada, certains opérateurs rapportent que le secteur des casinos en ligne a connu une croissance de 77% par rapport à la même période l’année précédente.
Malheureusement, une part non négligeable échappe à l’économie du pays. Bien caque les innombrables publicités de jeu en ligne fassent la promotion de plateformes gratuites — ce qui est légal —, elles sont toutes une porte d’entrée vers une plateforme payante, ce qui ne l’est pas. Pourtant, l’offre illégale demeure plus qu’abondante et ces autres joueurs de l’industrie sont avantagés, n’étant pas encombrés par les contraintes réglementaires qui régissent l’offre de Loto-Québec.
Sylvia Kairouz, titulaire de la chaire de recherche sur l’étude du jeu de l’Université Concordia de Montréal et membre du Groupe de travail sur le jeu en ligne en 2014, recommandait au gouvernement québécois d’ouvrir le marché du jeu en ligne aux opérateurs privés. Ce qui serait la meilleure solution pour contrôler le marché du jeu en ligne, protéger les consommateurs et générer des revenus à l’État, en imposant, à ces opérateurs, des licences et certaines conditions.
En effet, dans une interview accordée à Radio-Canada en février 2021, S. Kairouz mettait néanmoins en garde sur la multiplication des jeux vidéo en ligne qui misent sur la monétisation des joueurs et des joueuses, et ne rentrent pas dans le cadre de législation de Loto-Québec. Elle souligne : « Nous sommes dans l’économie du gratuit. […] On télécharge un jeu en trois secondes sur nos téléphones, sur nos tablettes, on peut jouer tout de suite, il y a un attrait dans ça. Par contre, ces jeux sont faits de sorte à pousser le joueur à s’accrocher, à jouer, et à un moment donné, le but, c’est de le pousser à monétiser [son jeu] ».
Il est donc indéniable que l’industrie du jeu en ligne, et notamment les casinos, à l’heure du métavers rendant les expériences des joueurs attractives et addictives, impacte de manière largement positive l’économie de tout un pays. Mais l’offre toujours plus nombreuse de plateformes non réglementées pourrait mettre à mal cette manne financière, surtout lorsque la sécurisation du métavers fait débat et n’est toujours pas résolue.