Environ 15% de la population est concernée par une allergie au chat domestique, et la sensibilisation à l’allergène du chat est associée à l’asthme. Comme les traitements actuels restent limités quant à leur efficacité, des chercheurs de la société de biotechnologie InBio ont utilisé la technique d’édition du génome CRISPR-Cas9 en ciblant la petite protéine Fel d 1 (l’allergène majeur du chat). Les résultats indiquent qu’il s’agit d’un outil viable pour supprimer Fel d 1 dans les cellules de félins, ce qui pourrait diminuer les symptômes des personnes allergiques aux chats. Quelques années seront cependant nécessaires pour appliquer la méthode sur nos chats domestiques.
Le chat domestique (Felis catus) est la source la plus commune d’allergènes inhalés dérivés de mammifères, à cause de la protéine Fel d 1 sécrétée par les glandes salivaires et cutanées de tous les chats. Cependant, une étude de 2019 suggère que les quantités de Fel d 1 sécrétées dans la salive varient selon le chat, sans pour autant confirmer que certaines races sont moins susceptibles de déclencher des allergies.
Une chose est sûre, plus de 90% des personnes allergiques aux chats présentent des immunoglobulines E (IgE), c’est-à-dire des anticorps contre l’allergène principal du chat. Les objectifs de la nouvelle étude américaine étaient d’identifier les régions conservées des gènes de Fel d 1, et de supprimer certains gènes de Fel d 1 des cellules félines en utilisant la méthode CRISPR-Cas9 (découverte en 2012). Plus précisément, la protéine Fel d 1 est constituée de deux sous-unités différentes, et deux gènes (appelés CH1 et CH2) codent pour chaque sous-unité.
Les chercheurs ont extrait de l’ADN de 50 chats domestiques, afin de séquencer les gènes codant pour CH1 et CH2. Cela leur a permis d’identifier de multiples régions codantes conservées dans les gènes CH1 et CH2, convenant pour l’édition génomique CRISPR.
Par ailleurs, l’analyse des séquences des deux gènes de Fel d 1 a relevé plus de 25 substitutions uniques d’acides aminés à des fréquences allant de 2 à 98%, ce qui a donné lieu à des polymorphismes de Fel d 1 (plusieurs configurations différentes) avec 92 à 99% d’identité.
Des différences génétiques entre les chats domestiques et d’autres espèces de chats
Ils ont également trouvé de nombreuses différences entre les séquences des gènes CH1 et CH2 des chats domestiques et de celles de huit autres espèces de chats comme les lions, les tigres, les couguars et les chats de pêche. « Ces résultats impliquent que l’allergène pourrait être non essentiel pour les chats, étant donné le manque apparent de conservation évolutive », écrivent les auteurs de l’article publié dans The CRISPR Journal.
« Nos données indiquent que Fel d 1 est à la fois un candidat rationnel et viable pour la délétion du gène, ce qui pourrait être profondément bénéfique aux personnes souffrant d’allergies aux chats en éliminant l’allergène principal à la source », ajoutent-ils. Avec la technique CRISPR, ils ont supprimé soit le gène CH1 soit le gène CH2 des cellules de chat en culture. Il reste encore à essayer la méthode avec les deux gènes en même temps, afin de vérifier que la protéine Fel d 1 n’est alors pas produite. D’après le directeur de l’équipe CRISPR pour chats chez InBio, le délai pour appliquer la méthode aux chats domestiques devrait prendre plusieurs années.