Selon la K-12 School Shooting Database, qui recense les événements impliquant des armes à feu dans les établissements scolaires, cette année compte déjà près de 200 victimes de tels incidents, parmi lesquels 50 décès — un chiffre en augmentation ces dernières années. La société National Safety Shelters propose aux écoles d’installer des modules de sécurité, pouvant servir de refuge aux élèves en cas d’attaque armée. Environ 7$ par mois et par élève, ce serait le prix à payer pour que les jeunes Américains se sentent « en sécurité » à l’école.
Dernier événement dramatique en date : la tuerie d’Uvalde, au Texas, survenue le 24 mai. Un jeune homme de 18 ans équipé d’un fusil d’assaut a pénétré dans une école primaire et a tué 21 personnes, dont 19 enfants. C’est la fusillade la plus meurtrière dans une école américaine depuis la tuerie de l’école Sandy Hook, qui a eu lieu le 14 décembre 2012 ; 20 enfants ont perdu la vie ce jour-là. Une enquête récente menée outre-Atlantique a révélé que près de la moitié des enseignants envisagent de demander leur transfert ou de démissionner, par peur d’être confrontés à nouveau à une telle situation.
Malgré ces événements dramatiques, le lobby des armes continue de s’opposer fermement à tout changement législatif qui pourrait — sinon éliminer — largement réduire la fréquence de ces événements. Impossible d’agir à la source du problème, l’unique solution reste donc de se protéger au mieux de ces tueries de masse. Dans ce contexte, la société National Safety Shelters propose aux écoles des box, ressemblant à des casiers géants, qui résistent aux impacts de balles.
Une « safe room » pare-balles et anti-tornade
Selon un rapport fédéral sur la criminalité et la sécurité à l’école, l’année scolaire 2020-2021 a battu des records en matière de nombre de fusillades : le document recense 93 fusillades causant des victimes — dont 43 ont été mortelles — dans des établissements primaires et secondaires, publics ou privés.
Face à cette menace croissante, certains établissements scolaires ont mis en place des détecteurs de métaux, ou des vigiles armés. C’est une solution « sans coûts d’exploitation ou de maintenance » que propose National Safety Shelters : des armoires métalliques, construites avec de l’acier balistique de niveau III du National Institute of Justice. Ces box sont en théorie capables d’arrêter les balles des armes semi-automatiques, telles que les fusils AR-15 et AK-47. Ils sont munis d’une petite fenêtre pare-balles, qui permet d’observer ce qu’il se passe à l’extérieur (et qui prévient la claustrophobie).
Chacun occupe moins de 5% de l’espace de classe. « Chaque module, quelle que soit sa disposition ou sa taille, est conçu pour être immédiatement accessible, garantissant la sécurité des occupants en quelques secondes », affirme le communiqué de presse. Le district scolaire de Quitman, dans l’Arkansas, a pris la décision d’installer ce dispositif de protection dans chaque classe en 2018. Les responsables déclarent que l’installation de ces modules a eu un impact très positif sur les parents et les enseignants et ont été « le catalyseur d’une augmentation des revenus et des inscriptions ».
Dennis Truxler, surintendant du district scolaire de Quitman, rapporte une augmentation de 20% des inscriptions. Et une augmentation des revenus est sûrement la bienvenue, sachant que l’installation de ces box de survie coûte en moyenne 7$ par mois et par enfant ! Mais selon Truxler, l’augmentation du nombre d’inscriptions aurait largement couvert cet investissement. Une fois que le module est installé, il est prêt à l’emploi et n’entraîne aucun coût de maintenance.
En outre, ces « modules de sécurité » ont une double fonction : ils ont également été conçus pour résister aux forces destructrices des tornades de la catégorie la plus élevée. Un argument supplémentaire pour les districts scolaires situés dans l’un des États de la Tornado Alley (l’Oklahoma, le Kansas, l’Arkansas, etc.).
Des algorithmes qui « prédisent » les fusillades
D’autres « solutions » technologiques ont été suggérées pour protéger les élèves des fusillades. Bark Technologies, Gaggle.Net et Securly Inc., sont par exemple trois entreprises qui utilisent l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique pour prévoir les tueries. « Des études ont montré que, souvent, les enfants communiquent avant un acte de violence et qu’ils le font par voie électronique », a déclaré Bill McCullough, vice-président des ventes chez Gaggle.
Leurs algorithmes passent au crible les courriels, les SMS, les documents des étudiants et, dans certains cas, leur activité sur les réseaux sociaux — l’objectif étant de détecter des signes avant-coureurs de cyberintimidation, de mal-être, de dépression, etc. Lorsqu’un individu à risque est repéré, ses parents, les administrateurs scolaires, voire les forces de l’ordre, sont alertés. Selon Gaggle, ce système permet d’éviter chaque année des centaines de suicides. Bark Technologies aurait également signalé au FBI plusieurs fusillades plausibles depuis la mise en place de ses services.
Plus récemment, Axon Enterprise — la société à l’origine de la marque de pistolets paralysants Taser — a déclaré qu’elle prévoyait d’installer ses armes sur des drones et de les commercialiser comme système de défense auprès des écoles américaines. Selon un communiqué de l’entreprise, ces appareils seraient capables de neutraliser un tireur actif en moins de 60 secondes.
Le secteur des dispositifs de protection a nécessairement le vent en poupe dans un pays influencé par un lobby des armes tout-puissant. Fin juin, la Cour suprême des États-Unis a invalidé une loi de l’État de New York (en vigueur depuis 1913 !), qui limitait le port d’armes de poing en dehors de son domicile. Aujourd’hui, les 50 États américains autorisent le port dissimulé d’armes avec divers degrés de restriction : 13 d’entre eux autorisent leurs citoyens à porter une arme de poing dissimulée sans licence ni permis, tandis que dans 31 autres, une personne peut légalement porter une arme à feu ouvertement et facilement accessible, sur elle-même ou dans son véhicule, sans licence ni permis.